Algérie

Bachir Tartag relevé de ses fonctions: Limogeages et restructuration des services de renseignement


Le conseiller du président de la République, coordonnateur des services de sécurité, le général Bachir Tartag vient d'être relevé ou démissionné des fonctions qu'il occupe depuis septembre 2015.Athmane Tartag, Bachir de son nom des services de renseignement, a été nommé en tant que tel après le limogeage du général Toufik de la tête du département du renseignement et de la sécurité (DRS) par les soins de Bouteflika alors président de la République. L'on ne sait s'il a été limogé ou avait remis sa démission au président de la République avant que ce dernier ne l'ai fait lui-même. Ce serait peut-être pour ça que Bouteflika avait noté dans sa lettre de démission que « dans cette perspective, j'ai pris les mesures appropriées, dans l'exercice de mes prérogatives constitutionnelles pour les besoins de la continuité de l'Etat et du fonctionnement normal de ses institutions durant la période de transition devant mener à l'élection du nouveau président de la République». Si c'est le cas et pour beaucoup d'autres changements ou décisions, il aurait certainement agi après avoir négocié son départ avec Gaïd Salah.
Mais la thèse la plus probable pour beaucoup reste un limogeage de fait. Des analystes avancent en effet, depuis hier, que Tartag travaillait dans un cadre anticonstitutionnel tout autant que l'a été sa nomination. Ils affirment que son limogeage est l'?uvre du vice-ministre de la Défense, le chef d'état-major, le général de corps d'armée, ceci, même si la Constitution ne lui donne aucun droit, ni de nommer ni de limoger. Seul le président de la République a, selon l'article 92 de la loi suprême du pays, toutes les prérogatives dans ce sens, c'est-à-dire pour l'ensemble des domaines y compris ceux de la défense nationale. A moins que Gaïd n'ait décrété la loi martiale depuis la vacance du poste de président de la République.
Guerre de tranchées et recomposition de pouvoirs
Pour l'heure, rien n'est dit officiellement. Mais comme écrit dans ces mêmes colonnes, si l'application de l'article 102 devient effective, tout se fera sous le contrôle de l'armée. C'est en évidence le cas depuis le mercredi 2 avril, jour où le chef de l'Etat a été destitué de ses fonctions par le chef d'état-major de l'armée. Le coup d'Etat s'est alors confirmé. Si à la remise de sa lettre de démission au président du Conseil constitutionnel, Bouteflika n'avait sur son visage aucune expression de frayeur ni d'étonnement, Tayeb Belaïz et Abdelkader Bensalah avaient, eux, un regard terrifié et un visage blême.
Après qu'il se soit débarrassé de Bouteflika, Ahmed Gaïd Salah tente de récupérer et de renforcer ses pouvoirs le plus possible pour devenir l'homme fort du pays. Le départ de Tartag est plus qu'un simple limogeage. Il permet à Gaïd de rallier le DRS à l'état-major de la défense nationale comme il l'était quand le général Toufik régnait en maître des lieux. En opérant immédiatement ces restructurations des services du renseignement, de la sécurité et au-delà de la défense nationale, il veut les mettre à son service en ces temps de doute, de manipulations et de complots. L'arrestation rocambolesque d'un patron d'un média il y a plus d'une semaine, avait donné un avant-goût de ce qui pouvait se tramer dans la tête du pouvoir militaire. Il avait déclaré qu'il avait été arrêté par les services de sécurité et libéré par le chef d'état-major de l'armée. Drôle de situation pour ceux qui s'érigent aujourd'hui en gouvernants pour, disent-ils « satisfaire les revendications du peuple et réinstaurer la séparation des pouvoirs pour les nécessités d'un Etat de droit. » La remarque de taille et de fond qui s'impose est que les réseaux de Toufik restent intacts et activent au grand jour «du hirak». Pour ceux qui n'en étaient pas sûrs, la lettre que Liamine Zeroual a rendue publique samedi dernier faisant état de la tenue d'une réunion entre lui et l'ex-patron du DRS le confirme. Selon l'ancien président de la République, Toufik lui a proposé de présider une instance de transition. Ceci explique que l'ex-DRS veut et peut jouer un rôle de première ligne dans la révision des pouvoirs en faction. C'est véritablement une guerre de tranchées que les deux hommes forts du système se livrent aujourd'hui. Les analystes qui commentent le départ de Tartag le disent en filigrane lorsqu'ils annoncent que ce limogeage intervient pour protéger et encadrer le mouvement populaire dans une conjoncture dangereuse où tous les coups sont permis. Ceci, même si pour eux, la dangerosité qui prévaut est directement liée aux effrayants bruits de bottes et de chars qui parviennent des frontières de l'Algérie avec la Libye.
Bruit de chars et de bottes aux frontières
Le maréchal Haftar active depuis jeudi ses troupes pour assiéger Tripoli. Faïz Esserradj fait de même et organise pour la riposte. Rien n'est hasard. Haftar a déclaré en décembre dernier qu'il lui serait facile «de retourner la guerre vers l'Ouest», c'est-à-dire vers l'Algérie. L'homme est un pur produit américain, financé par les pays du Golfe et équipé militairement par la France. Ce n'est un secret pour personne. De puissants laboratoires reconnaissent depuis quelques mois que des centaines d'éléments de Daech ont été ramenés en Libye d'Irak et de Syrie. A dessein, bien sûr, comme suite logique à l'exécution du fameux projet du GMO israélo-américain (Grand Moyen-Orient) conformément aux objectifs de ses promoteurs.
Dépourvus de moyens logistiques nécessaires à leur mission, les services de renseignement ne pouvaient faire face à des tentatives de déstabilisation des territoires d'où qu'elles viennent. Bouteflika, alors chef de l'Etat, l'avait reconnu tout de suite après l'attaque terroriste de la base de Tiguentourine, à In Amenas. Ils les avaient déchargés de toute intervention dans le dénouement de cette conspiration pour exiger de l'armée de la prendre en charge jusqu'à la neutralisation complète de tous les assaillants.
Gaïd Salah, lui, s'est arrangé depuis 2015 de noter clairement dans ses communiqués sur la lutte contre le terrorisme que les terroristes arrêtés par ses troupes avaient rejoints le maquis surtout avant et jusqu'à 2015, périodes où Toufik dirigeait le DRS. La haine entre les deux hommes date de longtemps. Beaucoup pensent que le chef d'état-major ne composera pas avec lui et ne le laissera pas rebondir. Mais les alliances contre nature qui se sont tissées pour les besoins de la destitution de Bouteflika montrent que les choses peuvent évoluer selon une recomposition de pouvoirs nouveaux et anciens capables de brider et de prendre de cours les plus téméraires des contestataires.
Des têtes vont continuer de tomber. La rue a demandé hier avec insistance celles « des trois B », Bensalah, Belaïz et Bedoui. Les choses vont vite dans ce sens. Le chef d'état-major lui en a donné déjà quelques-unes. La justice a été actionnée pour juger la fratrie de Ali Haddad, celle des Kouninef et autres «collaborateurs». Les premières images de l'arrivée, mercredi soir à une heure tardive, de Ali Haddad au tribunal de Bir Mourad Raïs font peur. Le lynchage de l'homme d'affaires a été évité de justesse. Des actes de ce genre ne sont pas impossibles. Le peu d'Etat qui reste se doit de les empêcher par tous les moyens légaux. Réputée pour ses nombreuses frasques «en pots de vin » et en manquement à l'éthique, l'appareil judiciaire ne doit pas échapper à un impératif assainissement de ses rangs. Avant que la légalité ne devienne règlement de compte.
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