Algérie

Axe pénétrant de la ville côté Pêcherie: De vieux immeubles qui étranglent la route et déstructurent le périmètre



De toutes les portes de la ville d'Oran, celle côté Corniche est sans nul doute la plus engorgée et la plus résistante à tous les changements. Encombré à longueur d'année, l'axe de la Pêcherie se transforme littéralement en bouchon lors des pics de flux. A défaut de pouvoir soigner le mal à la racine en éliminant le goulot d'étranglement, on caresse le problème à coups d'opérations de relookage et de trompe-l'œil.

S'il est une artère pénétrante de la ville qui a fait le dos rond à tous les vents du changement, c'est bien son couloir d'accès côté Corniche-Ouest qui dessert Aïn El Turck via la route des tunnels. Et ce ne sont pas les éternels liftings tels l'aménagement de rond-point, trottoir, aire de stationnement, mur en voile, le ravalement de façades… qui peuvent donner l'illusion du contraire. Il y eut un temps où l'on voulut vraiment faire quelque chose de sérieux pour repenser le site et en défaire les vieux points noirs et l'on proposa ainsi l'élargissement et le dédoublement de l'artère qui va de la rue John F Kennedy jusqu'à l'ex-usine Bastos, le seul vrai remède. Mais l'idée fit long feu pour la simple raison qu'elle était « trop audacieuse » en ce sens qu'elle suggérait la démolition d'un pâté de vieux immeubles dont la plupart abritaient en leurs rez-de-chaussée des restaurants spécialité poisson.

UN ORDRE ÉTABLI QUI A LA PEAU DURE

Les concepteurs du schéma eurent beau joindre à leurs plans et relevés topos des documents mettant en avant l'expropriation pour cause d'utilité publique, la nature juridique « biens vacants » ou « biens de l'OPGI » de la majorité des bâtisses ciblées ainsi que l'état insalubre et/ou menaçant ruine de certains d'entre elles, tout en suggérant une solution conciliante de délocalisation par une légère translation géométrique de l'activité commerciale vers de nouveaux locaux neufs et appropriés dans le cadre d'un plan d'aménagement global du site, l'idée fut tuée dans l'œuf. Les raisons de la fin de non-recevoir réservée à cette esquisse de projet sont à rechercher, et ce n'est là guère un secret de Polichinelle, dans l'influence d'un certain lobby qui vit en cette idée innovante une menace existentielle pour son négoce. Pas question donc de toucher à l'ordre établi dans cet espace rigide et figé et la seule petite manœuvre permise c'est le traitement épiderme du site, à l'image de ce qui a été fait au temps de l'ex-wali Mouloud Cherifi avec la mise en place d'un petit giratoire, l'aménagement d'un parking en paliers, la construction d'une petite route en pente raide pour accéder au fort de Santa Cruz et la création d'un espace vert pour adoucir le paysage sur le talus abrupt de la Calère. Accessoire, superficielle et bien loin de l'idée fondamentale de restructuration et de reconfiguration, une telle action - de surcroît sans étude - qu'on a bien du mal à ranger dans les rubriques d'amélioration urbaine et de traitement paysager n'aura eu à l'évidence aucun effet en termes de résorption des points de cisaillement sur cet axe et de fluidification de la circulation dans les deux sens.

UNE CONTRAINTE MAJEURE QUI SE DRESSE DEVANT LA ROUTE

Le schéma reste le même, avec plus de complications même puisque le trafic automobile croît d'année en année : une route étroite à double sens qui débute du tunnel de la Pêcherie, fait un quart de tour autour d'un rond-point, poursuit tant bien que mal son petit chemin jusqu'au portail principal du port de pêche où elle voit soudain son tracé rectiligne se heurter à une contrainte physique qu'est le coin-angle d'un ensemble compact de vieux immeubles R 1 et R 2 dont les niveaux supérieurs sont délabrés et inoccupés et dont seul le RDC est « revitalisé » et plus ou moins entretenu pour les besoins de la restauration poissons et fruits de mer. Là, pour contourner l'obstacle, la route est obligée de se rétrécir davantage et de faire un détour via le flanc haut de cet îlot d'édifices - d'où avaient été pourchassés des tôliers et autres mécaniciens exerçant en noir - pour continuer via ex-Bastos soit en direction du centre-ville par la rampe du Commandant Ferradj (ex-Capitaine Vales) soit en direction de la route du port (RN11-AM). Dans le sens inverse Oran-Aïn El Turck, l'itinéraire n'est pas moins problématique avec comme gros casse-tête, là aussi, le même goulet d'étranglement causé par les immeubles désaffectés mais qui servent encore et toujours de fonds de commerce contre vents et marées. La situation devient infernale les jours où tous les ingrédients se mélangent : grand rush sur les plages de la Corniche, forte affluence sur les restaurants, arrivée/départ de car-ferries… avec comme résultat au final les récurrentes scènes cauchemardesques dues à la formation d'un immense embouteillage qui va bien au-delà de Monte-Cristo côté Mers El Kébir et du pont Zabana côté Oran. Sursaturée, la route de la Pêcherie, déjà sous-dimensionnée, est carrément bouchée par le pic de trafic, l'écoulement s'arrête, les véhicules s'enchevêtrent, se chevauchent, se télescopent, les klaxons et les cris fusent, l'adrénaline monte… c'est la galère ! Tenter d'éviter le piège par un dérivatif via Sidi El Houari ne sert à rien car on finit à coup sûr par retomber dans un autre piège tout aussi compliqué.

RASER POUR LIBÉRER L'ESPACE ET RESTRUCTURER

La solution ? Elle est dans l'élargissement de la rue axiale John F Kennedy du tunnel jusqu'à ex-Bastos et sa reconfiguration en profil autoroutier « 2 fois 2 voies » pour son raccordement, direct ou par le biais d'un giratoire, avec la route du port située en contrebas de Front de mer. Cette solution radicale et définitive a un coût, mais également des bienfaits bien plus supérieurs que le thème lié strictement à la route, notamment en matière de restructuration urbaine. En clair, il faut rayer de la carte l'ensemble des immeubles précaires pour libérer le tracé, l'élargir et le corriger ensuite. Le reste du foncier récupéré peut servir de lieu d'implantation d'un ensemble promotionnel de grand standing où les restaurateurs spécialité poisson déjà installés à la Pêcherie auront un emplacement de prédilection. D'où la nécessité d'une démarche inclusive et participative à l'égard de ces commerçants, en premier lieu, que doivent mener les instances institutionnelles dans les phases de préparation et de maturation de ce projet d'intérêt public. Dans le même contexte, il est utile voire indispensable, selon l'étude technique qui devra être faite, d'envisager la délocalisation du projet promotionnel R 5 de l'Agence foncière, prévu à la Calère en face de l'accès au port de pêche, en raison éventuellement de son empiètement sur le futur tracé de la route à reconfigurer. L'un des sites de remplacement possibles, une partie du grand parking aménagé en amont et qui n'a accueilli aucune voiture depuis son ouverture en 2018.




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