Algérie

Avril 1980, un repère du combat démocratique



Avec l'éclosion du Printemps berbère, Avril 1980 a posé les termes du combat politique pacifique sur la place publique dans un pays où la violence politique était érigée en mode de gouvernance. Le mérite revient à une jeune élite d'après-guerre qui a sonné le glas de la dictature du parti unique. Les acteurs du Printemps berbère ont traduit une problématique identitaire dans un projet politique et sociétal avec comme socle la promotion des droits de l'Homme. C'est que, couplée aux libertés démocratiques, tamazight est, à vrai dire, consubstantielle à la question des droits de l'Homme.Les premières manifestations de rue organisées en mars 1980 ont désarçonné un pouvoir, par définition répressif. La répression dans le sang de ces premières manifestations pacifiques n'aura pas raison de la détermination de la militance berbériste. Bien au contraire. La perspective démocratique a fédéré les acteurs politiques qui se recrutaient dans un large spectre politique. L'appel à la grève générale du 16 avril 1980 a scellé le caractère populaire et massif du Mouvement berbère. Cette première grève avait paralysé plusieurs secteurs d'activité.
Ce saut qualitatif a permis au combat pacifique d'asseoir son assise sociale qui ne sera jamais démentie sur le terrain des luttes. Ainsi, après l'arrestation le 20 avril 1980 des acteurs les plus flamboyants du MCB, comme Saïd Sadi, Mouloud Lounaouci, Mustapha Bacha, Djamel Zenati et Saïd Khellil, un large mouvement de solidarité et de mobilisation populaire est né spontanément en Kabylie. Une mobilisation qui a abouti à l'élargissement des détenus politiques le 26 juin 1980. Ils étaient 24, immortalisés dans un chef-d'?uvre musical par Lounès Matoub. D'autres mouvements de contestation ont suivi, toujours réprimés dans le sang, comme c'est le cas du Printemps noir de 2001 en Kabylie. Au-delà des acquis qui ont jalonné les luttes sociopolitiques, Avril 80 a ouvert de larges perspectives pour le combat démocratique.
Aujourd'hui, le flambeau du combat démocratique est repris par une jeunesse qui n'a pas renié les repères historiques qui ont sédimenté les luttes successives du peuple algérien. Avec des méthodes de lutte adaptées au temps présent, l'insurrection citoyenne du 22 février 2019 emprunte à bien des égards à l'esprit d'Avril 80. Dans un réflexe de lucidité, la jeunesse d'aujourd'hui, acquise aux valeurs universelles, s'emploie à se réapproprier les repères de sa mémoire militante, façonnée par une génération d'exception qui a eu le génie d'inventer le combat
pacifique.

Yahia Arkat


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