Algérie

Au Sud aussi, Khadidja divise l'opinion



Insidieux, banalisé, tu, le comportement et la parole raciste font pourtant partie du quotidien des Algériens. Même dans les coins reculés du pays, les plus proches des frontières africaines où la population métissée regorge de couleurs et d'origines ethniques, la loi des castes a la peau dure.L'affaire de Khadidja Benhamou, la nouvelle Miss Algérie sélectionnée pour porter ce titre tout au long de l'année 2019, aura marqué ce début d'année en remontant à la surface la question du racisme au sein de la population algérienne.
Choqués par les attitudes et propos blessants sur cette peau trop basanée ou ces traits trop africains au goût de certains, ne représentant pas la beauté algérienne selon d'autres ou ne rentrant pas dans les canons de la beauté classique telle qu'appréhendée par le commun des gens, les voix ayant soutenu la diversité ethnique et l'africanité de l'Algérie sont restées inaudibles. Au Sud, les réactions sont multiples.
Pour ou contre le concours en tant que tel, blessé ou pas par la véhémence des propos qui ont circulé sur la Toile et dans les médias, le sujet n'a pas laissé insensible et les interactions sur la Toile et au-delà dans la rue fusent de partout.
A Adrar, où le choc a commencé le jour même de l'élection d'une fille du cru en tant que Miss Algérie 2019, l'écrivain et chercheur universitaire Seddik Hadj Ahmed Ziouani a publié un post sur son compte Facebook évoquant un «traumatisme immédiat, puisque l'opinion publique locale est encore sous le choc du fait qu'une de ses filles désobéisse à ses codes sociaux».
Un constat qui a provoqué une kyrielle de réactions sur le mur de l'écrivain dont l'une décrivant «une pathologie nécessitant un traitement de choc voire une amputation».
C'est dire qu'une partie de l'opinion publique locale a soutenu la liberté de Kadidja à se présenter à ce concours et son droit à être respectée en tant que personne.
L'on estime alors quand même que «cette sélection a établi Adrar dans un sentiment de fierté et de représentativité nationale, une euphorie et une joie commanditées devant un public qui se joue de nous à présent».
Les gens sont suspicieux au Sud et crient au complot politique ourdi par les autorités pour miroiter à cette région du pays en quête d'équité territoriale et de développement un semblant de poids sur l'échiquier national, dira Radia. Et du Dr Ziouani d'ajouter «Je suis confus entre l'accusation d'apostasie venant d'Adrar et l'impossibilité de trouver un joyau dans les sables pour le reste de l'Algérie.
Le sujet est digne d'une thèse de doctorat en psychologie de la pensée collective face à la mondialisation.» Ailleurs au Sud, des voix se sont élevées contre «la discrimination et le racisme dans les propos des uns et des autres non seulement à l'encontre de Khadidja, mais aussi envers tout ce qui est brun ou noir et qui vient du sud du pays».
Khaled n'en démord pas : «Cette sélection n'est pas fortuite, elle veut nous détourner de l'essentiel.» Souad estime, quant à elle, qu'«il est impossible d'imaginer qu'une fille d'Adrar, sanctuaire du soufisme et des zaouïas, soit salie par ce concours de Miss et toute la polémique qui s'en est suivie, c'est une honte.»
Pour finir sur une note optimiste dans ce brouhaha raciste et intolérant, Lakhdar pense que «le Sud pluriel, vaste et beau, reste méconnu des Algériens et qu'il mérite d'être connu et promu par les plus éclairés d'entre eux.»


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