Algérie

Au pays du gaz, le diesel est roi : L'Algérie importe 330.000 tonnes de gasoil en deux mois



330.000 tonnes de gasoil importées via les traders en juillet et août : au pays du gaz, le diesel est roi. Les importations sont destinées à compenser un déficit de production de la raffinerie de Skikda. Dans l'est du pays, la «tension» persistante sur le gasoil est devenue une «crise» en raison de l'explosion de la contrebande.

Sonatrach a lancé, lundi, un appel d'offres pour l'achat de six cargaisons de gasoil, soit l'équivalent de 180.000 tonnes, pour le mois d'août, rapporte l'agence Reuters en citant des traders. Les contrats pour ces cargaisons livrables dans deux ports algériens seront attribués ce mercredi. L'Algérie a déjà eu recours aux traders au mois de juillet pour importer 150.000 tonnes de gasoil. L'opération a entrainé une hausse sensible des prix en Méditerranée, indique un opérateur cité par l'agence. Ces quantités de gasoil importé – 330.000 tonnes en tout – sont destinées à compenser un déficit de production de l'ordre de 350.000 tonnes de la raffinerie de Skikda, fermée, en partie, pour des travaux de maintenance. Ces importations, déjà prévues, ne sont pas une surprise, même si Sonatrach semble tenter de pallier dans l'urgence les effets d'une pénurie très perceptible notamment dans les wilayas de l'est du pays. Après des périodes de «tension», on parle carrément de «crise» dans ces wilayas depuis deux mois en raison d'une explosion de la contrebande vers la Tunisie. La loi du «marché» des temps de guerre pousse les Libyens à s'approvisionner en carburant dans la Tunisie voisine, ce qui crée cette contrebande triangulaire, Algérie-Tunisie-Libye.

Diésélisation du parc national automobile

Dans un reportage publié dans le supplément économique Maghreb-Emergent, Le Quotidien d'Oran (12 avril 2011) révélait l'ampleur du phénomène dans la région de Tébessa, où des jeunes trabendistes lançaient une boutade révélatrice : «A Tébessa, mieux vaut connaître un pompiste qu'un wali».

Les dits pompistes ont décidé, depuis longtemps, visiblement sur ordre des autorités, de limiter la vente à l'équivalent de 600 dinars de gasoil par véhicule. Cette régulation par la quantité n'a pas eu d'effet et la crise du gasoil s'est étendue des wilayas frontalières de Tébessa, Souk-Ahras et El-Tarf à Guelma et Annaba. Mais le phénomène de la contrebande à l'est, lié à la double conjoncture politique tunisienne et libyenne, n'a fait qu'accentuer une tendance déjà très forte à la surconsommation de gasoil en Algérie.

L'Algérie importe, bon an mal an, pour des centaines de millions de dollars de gasoil. La diésélisation du parc national automobile a accompagné l'explosion des achats de véhicules de tourisme ou utilitaires au cours de la décennie 2000. L'offre des concessionnaires en diesel augmente régulièrement en raison d'un prix de gasoil attractif. Toutes les tentatives menées par le ministère de l'Energie – il y a renoncé ces deux dernières années – pour augmenter le prix du gasoil se sont heurtées au rejet des députés, qui ont trouvé dans cette affaire une rare occasion de faire preuve d'indépendance. Le résultat est qu'au pays du gaz, le GPL reste boudé et le gasoil est roi. Pour réduire la facture d'importation, Sonatrach a entrepris de rénover les trois grandes raffineries du pays (Alger, Skikda et Arzew).

Pas d'importation de 2013 à 2019

Le PDG de Sonatrach, Nordine Cherouati, a annoncé à la fin 2010 que l'Algérie sera autosuffisante en matière de gasoil à partir de 2013 et jusqu'à 2019. Ces réhabilitations devraient permettre d'accroître de 5 millions de tonnes/an les capacités de traitement et «d'assurer même 120% de ses besoins à partir de 2013, selon M. Cherouati». Selon cette annonce, à partir de 2013, l'Algérie sera à l'abri du besoin d'importer du gasoil jusqu'en 2019. Les capacités de la raffinerie de Skikda vont être portées de 15 millions de tonnes/an à 16,5 mt/an, celle d'Alger, de 2,7 mt/an à 3,6 mt/ann et celle d'Arzew, de 2,5 à 3,75 mt/an.

Nordine Cherouati avait prévenu que pour 2011 et 2012, «l'Algérie aura probablement recours à l'importation (de gasoil)».




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