Algérie

Au coin de la cheminée



Un lutin astucieux arriva un beau jour dans une ville et décida de s'installer chez un épicier. Ainsi il était sûr d'avoir tous les soirs un bon dîner. Tous les soirs, l'épicier lui préparait une assiettée de bouillie bien crémeuse, additionnée d'une cuillerée de confiture.Dans la même maison, au-dessus de la boutique, demeurait un étudiant si pauvre qu'il ne possédait que les deux ou trois livres dans lesquels il étudiait. Le lutin aurait souhaité être aussi instruit, mais la seule pensée d'habiter un grenier lui donnait des frissons.
Un matin, l'étudiant vint acheter un maigre bout de fromage, un morceau de pain et un peu de beurre. Alors que l'épicier lui enveloppait le tout dans une page d'un vieux livre tout déchiré, l'étudiant vit qu'il s'agissait d'un recueil rare et ancien de poèmes.
? Reprenez le beurre ! s'écria l'étudiant. Donnez-moi le livre. J'aime mieux lire que manger.
? Comme vous voudrez, dit l'épicier abasourdi.
Le lutin, caché derrière une caisse, était perplexe.
«Pourquoi la poésie serait-elle plus importante que la nourriture '»
Le soir venu, il grimpa jusqu'au grenier, et vit, par le trou de la serrure, l'étudiant en train de lire les poèmes à haute voix.
? Des mots ! Rien que des mots ! marmonna-t-il.
Mais il se produisit une chose étrange, merveilleuse. Le jeune homme était baigné d'une lumière douce, chaude comme un rayon de soleil, qui semblait provenir du livre, de même qu'un arbre extra-ordinaire commençait à sortir des pages. L'arbre se mit à grandir, jusqu'à ce que ses branches chargées de feuilles vertes, entourent complètement l'étudiant. A son pied jaillirent des fleurs, et les accents d'une musique exquise se firent entendre.
Après plusieurs nuits, le lutin revint coller son ?il à la serrure, et ce qu'il vit lui parut si beau qu'il resta dans les courants d'air jusqu'à ce que ses yeux se ferment malgré lui.
Une nuit, quelqu'un frappa contre les volets et cria : Au feu ! Au feu !
L'épicier se sauva dans la rue en pressant son argent contre sa poitrine, mais le lutin ne pensa qu'à une chose «Le livre de poèmes !»
Il monta quatre à quatre les escaliers, se précipita dans le grenier, et sans un regard pour l'étudiant encore endormi, saisit le livre qui était posé sur la table, sauta par la fenêtre, retomba sur le toit et se blottit entre deux cheminées, tenant contre son c?ur son trésor, enveloppé dans son bonnet rouge.
Le feu n'avait pas fait beaucoup de dégâts. Après la panique, le lutin remit le précieux livre sur la table du grenier.
? Ainsi va la vie ! se dit le lutin. Je prendrai l'étudiant pour maître, et je me résignerai à habiter le grenier. Mais je n'abandonnerai pas mon épicier. J'irai le voir tous les soirs, à l'heure du dîner.
Car, pour être un lutin, on n'en apprécie pas moins les nourritures terrestres.


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