Algérie

Au cœur du maquis de la Maouna ou les mémoires d’un moudjahid authentique (1re partie)



Publié le 03.09.2024 dans le Quotidien le soir d’Algérie

Par : Seridi Abdelhak officier de l’ALN

J’ai rejoint le maquis de la Maouna (Guelma, Zone 04, Région 03, Wilaya 02) alors que je n’avais que dix-neuf ans, ceci pour venger mes oncles maternels, Séridi El Hachemi, Touhami et Larbi assassinés par l’armée française et incinérés dans un four crématoire lors des tragiques événements du 08 Mai 1945.
Condamné à mort à deux reprises par l’armée française, j’ai réussi à lui échapper après avoir exécuté une première mission qui m’a été confiée par l’Ordre (qualificatif attribué à l’action armée, politique et culturelle menée par le FLN).
Durant mes faits d’armes, j’ai eu l’honneur et la chance de côtoyer les défunts moudjahidine, Boubnider (dit la voix arabe), El Hachemi Hadjeress, et Tabbouche Abderrahmane. Agé aujourd’hui de 87 ans, je me propose de livrer mes précieux et précis témoignages sur toute la période vécue au djebel de la Maouna parmi les vaillants maquisards de l’inoubliable ALN à laquelle nous devons notre indépendance.

• Acte I : pourquoi et comment j’ai rejoint le maquis :
Lors des évènements tragiques du 08 Mai 1945, mes oncles maternels, les chahid Séridi el Hachemi, Touhami et Larbi avaient été assassinés par l’armée française et incinérés comme des bêtes immondes, ainsi que tant d’autres chahid, dans un four crématoire pour avoir manifesté leur désir d’être libres et indépendants, eux qui avaient pourtant aidé la France à se débarrasser du nazizme.
L’armée coloniale ne pouvant cacher les odieux assassinats du 08 Mai 1945, niait cependant les avoir incinérés dans le four crématoire et distillait une information selon laquelle les chouhada avaient été enterrés à différents endroits.
J’accompagnais donc ma pauvre mère aux endroits indiqués et l’aidais à remuer la terre à la recherche des dépouilles de ses frères qu’elle chérissait tant, mais en vain, elle les pleurait tellement qu’elle avait fini par contracter une grave maladie des yeux,
Pour la consoler, je lui promets de les venger une fois devenu grand.
Dans un petit atelier de menuiserie attenant à notre domicile au n° 10 de la rue Zama (Emir-Abdelkader aujourd’hui), travaillaient deux braves menuisiers, les chahid Tahar Goubèche et Bouras Kaddour, lesquels d’après certaines indiscrétions entretenaient des relations avec l’Ordre, une occasion dorée pour moi ayant atteint l’âge de la majorité, de solliciter leur aide afin de regagner le maquis et venger mes oncles.
En qualité de résistants aguerris, ils n’accordaient, au départ, aucune attention à mes sollicitations, mais devant mon obstination et après s’être assurés de mon identité, sans l’ombre d’un doute, ils me chargeaient d’une mission «test de confiance»: Je devais remettre un couffin, dont j’ignore le contenu à ce jour, à un personnage, que je devais rencontrer à un endroit précis, ce que je fis.
Comment cet individu m’a-t-il reconnu ? Qui était-il ? Que contenait le mystérieux couffin ?
Le succès de la mission-test me permet de remplir une deuxième, d’une grande importance.
L’Ordre devait éliminer un collaborateur de la France coloniale de haut rang qui nuisait à la révolution.
Le chahid Amar, un vendeur ambulant de produits de la pêche, sensibilisé très tôt à la lutte armée que menait l’ALN, sa demeure était attenante à celle du chahid Souidani Boudjemaâ, fut chargé de l’exécution. Mon rôle consistait à lui remettre un pistolet automatique, dont l’Ordre m’a appris les rudiments de l’utilisation, et de lui désigner la cible. Le jour indiqué, je suivais le collaborateur qui se rendit à Dar El-Hakam (L’administrateur français). Arrivé à l’endroit choisi, je rejoignis le chahid Amar, lui remit l’arme et lui désignait la cible dont il s’approcha et ouvrit le feu à trois reprises, des cris s’élevèrent déjà du haut d’un balcon «Assassins- Assassins !»,
Amar avait déjà quitté les lieux transporté par un autre fidai au moyen d’une motocyclette. Quant à moi je rejoignis le café «Dahele» pour récolter des informations ; les sirènes de la police retentissaient au loin.
Quelques jours plus tard, l’Ordre m’informait que je devais rejoindre le maquis, le chahid Amar avait été appréhendé. En effet, au djebel, il a eu des problèmes de santé, en rejoignant son domicile pour se soigner, il fut arrêté. L’Ordre savait que les hommes du commandant Lafouchardière allaient torturer Amar et craignait pour ma personne.
Le chahid Amar fut guillotiné mais il ne put donner aucun renseignement me concernant, car ne connaissant pas ma véritable identité.
Au maquis, le responsable de région, le moudjahid Tabbouche Abderrahmane, m’affectait aux services du moudjahid Rabah Fisli, responsable du secteur militaire qui m’a remis un treillis et un fusil anglais 303, ainsi qu’une cartouchière. Durant deux mois, j’ai aidé le toubib Si Ahmed dans ses fonctions avant d’être désigné comme commissaire politique et affecté de nouveau au secteur du moudjahid Abdallah Guergour.
S. A.



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