ATTITUDES La môme

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Les cheveux ébouriffés, les yeux encore gonflés par le sommeil, une gamine pas plus haute que trois pommes traîne des tongues pointure 40 qu'elle a un mal fou à garder dans ses pieds de poupée. Traverser la rue est une véritable épreuve pour ce bout de chou. Il est 7h.
Dans la petite commune de Berahmoune, dans la wilaya de Boumerdès, le trafic se fait dense depuis quelque temps. Jadis, cette petite bourgade n'était guère fréquentée par les automobilistes. Aujourd'hui, pour fuir les embouteillages du matin, nos conducteurs ont trouvé la parade et bifurquent vers Berahmoune, un petit bourg fait de maisons et de magasins d'alimentation générale, dont une boulangerie. Et c'est justement là que notre gamine voulait se rendre. Elle avance un pied, perd sa tongue, recule pour éviter une voiture qui freine sec devant elle, le conducteur, horrifié, cache son visage. Il ne l'a même pas vue ! Il descend... Blême, il se précipite vers la fillette terrorisée. Elle traverse la rue en abandonnant ses tongues devant une foule ahurie et se précipite à l'intérieur de l'unique boulangerie du coin. Elle va chercher du pain pour le petit-déjeuner : une mission que lui a confiée sa chère maman. Elle n'a pas intérêt à venir bredouille à la maison ! Elle a beau s'égosiller par des « Amou, donnez-moi cinq pains», le boulanger, derrière son comptoir, ne l'entendra pas et ne la verra même pas. Elle ne lâchera pas prise pour autant et continuera de réclamer son pain, devant le va-et-vient incessant des clients pressés. Elle n'a dû son salut qu'à cet homme qui d'un ton ferme s'adresse au boulanger : «Donnez-lui son pain et laissez-la partir !» «Désolé, je ne l'ai pas vue. Je ne comprends pas comment des parents ont le courage de laisser sortir une fille de cet âge avec toutes ces voitures qui circulent, surtout à cette heure de la journée. C'est vraiment de l'inconscience !»