Algérie - A la une

ATTITUDES Voyage détonnant



naiyach@yahoo.fr
Les vacances de printemps furent une aubaine pour ce couple et leur petite fille pour quitter la ville, son vacarme et sa pollution. «Enfin le calme, la liberté, les montagnes, la nature et l'air pur», s'exclame Dounia, ce petit bout de chou de 6 ans. La petite famille s'embarque dans le bus, tout ce qu'il y a de confortable.
Dounia choisit le siège côté fenêtre, se débarrasse de son petit sac à dos, ôte sa parka et s'installe en attendant que le chauffeur fasse le plein. Encore deux places à combler et c'est le départ. Le receveur, un gentil garçon à l'accent kabyle, vérifie que tous les passagers sont assis, jette un dernier coup d'œil aux portes et donne le signal au conducteur. Ronflement de moteur, petit coup de klaxon pour que la voie soit dégagée et le bus prend la direction Est pour nous mener à Tizi-Ouzou. Le temps est mitigé mais il fait doux et il ne pleut pas. L'autocar vient d'entamer à peine quelques kilomètres, qu'un bruit de rafales de mitraillette fait sursauter Dounia, plongée dans sa bande dessinée. Elle se lève et aperçoit l'écran de télévision : «Oh ! j'ai oublié qu'il y a la télé !» Le papa lui demande de se rasseoir et de reprendre son livre. «Ne regarde pas il y a trop de violence, ce n'est pas un film pour toi.» Puis, agacée par tant de bruit, elle tente de continuer la lecture de son journal. Hurlements de femmes qu'on essaye d'égorger, sons de pistolets-mitrailleurs, de grenades, le top de la violence quoi ! Une violence servie à des spectateurs aux yeux hagards rivés sur le petit écran, la bouche ouverte pour beaucoup, ne voulant surtout rater aucune scène, soutenant leur héros et crachant sur les méchants. Les cris des actrices se font de plus en plus insistants, le sang de plus en plus abondant et le bruit des armes lourdes de plus en plus infernal pour le papa de Dounia qui a presque regretté d'avoir choisi ce bus. «La prochaine fois, avant de monter, je m'assurerai de la programmation du film.» Quant à nos accros de la violence, ils ne quittent pas des yeux leurs artistes. Dounia, influencée par tout ce monde figé devant tant d'horreur, tente d'amadouer son papa en lui demandant la permission de regarder juste quelques minutes. Le père n'en démord pas. «Il n'en est pas question. Tu ne vois pas qu'ils ne parlent presque pas, il n'y a que de la violence.» Il regarde le paysage à travers la vitre et invite Dounia à observer un couple de cigognes nourrissant un cigogneau dans un énorme nid. «Ouf ! plus qu'un quart d'heure et nous serons enfin à la gare routière.» Le film tire à sa fin. L'actrice principale a été bien sûr sauvée in extremis par son héros. Plus de détonations, plus de fusillade. Tout est bien qui finit bien ! Les voyageurs se frottent les yeux, s'étirent, enfilent leurs vestes, contents d'avoir passé un agréable voyage. Le chauffeur, lui, est heureux de s'être bien conduit sur la route. Le receveur, satisfait que le film ait plu aux passagers (n'en déplaise au papa de Dounia), descend le premier pour ouvrir la soute à bagages. Et en file indienne, tout le monde le suit pour récupérer son attirail. Dounia et ses parents seront les derniers à quitter le bus. Le papa ne décolère pas et jure par tous les Dieux que plus jamais il ne se fera prendre. - Papa, c'est encore loin la montagne ' - Non ma fille, le minibus que tu vois là-bas nous conduira tout droit vers la montagne. On en a juste pour une petite demi-heure de route. Je te garantis cette fois qu'il n'y aura plus de pollution sonore ni de pollution tout court !


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