Algérie

Art majeur



Il mettait, et pour la première fois, une chemise neuve pour aller au concert, tout en fredonnant à la limite du braillement une symphonie de Mozart. On lui donnait l?occasion d?adoucir ses moeurs par la musique, lui qui ne connaissait que la brigade des moeurs, les «mi-notes» et sa symphonie en matrag majeur.Il avait même proposé à sa moitié de venir au spectacle puisque la musique universelle était gratuite et que ce n?était pas les places assises qui manqueraient. Mais elle prétexta un mal de tête, le repassage et... Il finissait de se peigner en entamant, toujours dans des hurlements, le Lac des Cygnes, qu?il traduisit en «seknet Marseille la mérioula».Et ne voilà-t-il pas que sa femme lui sort un «ikhosni el-kabouya pour le couscous de demain !». «Ghaya! Complètement siphonnée ! Je te parle de symphonie, tu me parles de courgettes !». Et il sortit en ajustant sur le palier de son quatrième étage sa chemise dans son pantalon.Il se trouva dans une salle archivide, au deuxième rang. Le maestro, en vrai professionnel, n?avait pas attendu que la salle soit comble pour commencer. Il avait fait ses études à l?étranger, et là-bas, l?heure c?est l?heure. Quelques coups de baguette et l?orchestre attaqua «Une petite musique de nuit». Il écoutait attentivement la symphonie et se voyait en plastron à Vienne dans une loge d?un grand opéra.Mais voilà qu?il retomba sur terre en remarquant que la baguette du chef d?orchestre ressemblait à une grosse kabouya... Il n?en croyait pas ses yeux ! Il se ressaisit dans les «Quatre Saisons» et se remit à apprécier. Si ce n?est le soliste qui tenait à la place de son archer une moitié de courgette taillée dans le sens de la longueur, comme celle qui garnissait le couscous du vendredi...N?en pouvant plus, il sortit. Tant pis pour le concert. Et puis, une symphonie sans violon c?est comme un couscous sans kabouya.


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