Algérie

Arrogance



L'exécution, mardi dernier aux Etats-Unis, d'un Mexicain porte un malheureux coup à la dynamique de la justice internationale, l'un des plus importants acquis de l'humanité depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Condamné à mort pour meurtre et viol, José Ernesto Medellin, 33 ans, de nationalité mexicaine, a été exécuté au Texas malgré l'ordre de suspension donné par la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye, organe judiciaire principal de l'Organisation des Nations unies.« Toutes les décisions et ordres de la Cour internationale de justice doivent être respectés par les Etats. Les Etats-Unis doivent prendre toutes les mesures pour garantir que l'on surseoira à l'exécution de ce citoyen mexicain », avait déclaré le secrétaire général des Nations unies, M. Ban Ki-moon.La CIJ, saisie par le Mexique, avait ordonné en juillet à Washington de suspendre cette exécution ainsi que celle de quatre autres ressortissants mexicains. Ces derniers n'avaient pu bénéficier d'une assistance consulaire pendant la procédure judiciaire, comme le prévoit la Convention de Vienne. Mais la Cour suprême des Etats-unis a refusé, mardi, de surseoir à l'exécution. Le constat est amer pour la communauté internationale. Le lendemain de l'exécution de José Ernesto Medellin, le secrétaire général du Conseil de l'Europe ne cachait pas sa colère : cette exécution « n'est pas seulement une violation des droits de l'homme et de la dignité humaine, mais une provocation arrogante qui porte atteinte aux mécanismes collectifs mis en place pour garantir la paix et la sécurité dans le monde ». Et si Washington a avancé l'argument de la prédominance des lois des Etats qui composent son système fédéral, il n'en demeure pas moins que les Etats-Unis n'en sont pas à leur première transgression du droit international. Washington a délibérément saboté le processus de création de la Cour pénale internationale (CPI) en allant jusqu'à retirer leur signature du Traité de Rome fondant cette juridiction, une première dans les annales des relations internationales. Washington a ensuite signé une série d'accords bilatéraux avec plusieurs pays pour garantir l'impunité pour ses contingents et continue à approcher des Etats non encore ratificateurs du Traité de Rome pour les en dissuader et propose en échange ces fameux accords bilatéraux.L'administration Bush a également signé en 2002 une loi, American Service Member's Protection Act, qui garantit l'immunité à tout citoyen américain et soustrait ainsi ce dernier à toute poursuite de la part de la CPI. Ironie de l'histoire, c'est cette même administration qui demande au Soudan de coopérer avec la CPI après que le procureur de la Cour eut accusé le président Omar al Béchir de génocide au Darfour. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si le précédent en matière de transgression des avis de la CIJ concerne Israël qui a refusé de suivre, en 2004, un « avis consultatif » déclarant illégales certaines portions de son mur de sécurité en territoire palestinien. Un droit international à la carte, comme l'imaginent les grandes puissances et les régimes autoritaires, ne pourrait ainsi garantir la paix et la sécurité dans le monde. La sanction et la justiciabilité sont les bases mêmes de la société humaine. L'injustice a déjà justifié assez de crimes.


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