Tozeur offre, à coup sûr, une très grande originalité par le décor des façades extérieures des maisons. L’élément constructif exclusif est la brique modelée à la main et cuite au four.
Les dispositions générales procèdent, comme ailleurs, à partir d’une cour centrale, lieu de séjour et de distribution des pièces qui l’entourent. Comme ailleurs également, l’entrée (sqifa el-barraniya) est en chicane ; mais, ici, le vestibule-passage est aussi lieu de réunion et il dispose pour cela, face à la porte, de largues banquettes de terre (dukkāna) pratiquées dans des niches verticales en arcades reposant sur des piliers (arṣa) de briques cuites dont l’abaque est en bois d’abricotier.
Cette première entrée communique avec une seconde, à angle droit (sqifa al-daẖlaniya) qui ouvre sur le patio où le visiteur est saisi d’emblée par le décor profus des façades, obtenu par effets de briquetage. Ces ornements se trouvent à hauteur d’un second niveau où ils se composent de panneaux et de registres qui ne sont pas sans évoquer des tissages décorés, des tentures d’apparat : alignements de chevrons ou résilles, alignements ou superpositions de carrés sur pointe, de polygones plus complexes, que trouent des ouvertures en archères.
Au rez-de-chaussée, on trouve, au centre de la cour, une fosse à ordures. Sur un côté, généralement à droite en entrant, sont les dépendances : écuries, latrines, cuisine. Sur les autres côtés s’étendent les chambres rectangulaires parfois très longues (de 12 à 25 m), prolongées d’une alcôve carrée ; l’entrée de cette alcôve est souvent d’une grande beauté avec sa porte en arc de plein cintre flanquée de panneaux de briques appareillées en carrés sur pointe superposés. Au-dessus s’ouvrent deux baies jumelées, en arcs de plein cintre, protégées par des balustrades de bois ouvré. C’est le maẖzen.
Dans la pièce principale, des poutres transversales, à diverses hauteurs, et des cordes tendues, servent à étendre le linge ou à suspendre des régimes de dattes tandis que le sol supporte d’énormes poteries modelées, réserves de dattes.
L’escalier de la cour conduit à l’étage qui, parfois, comporte une galerie sur l’un de ses côtés, ouverte sur la cour par des arcades sur piliers.
On ne distingue aucun accès aux terrasses composées de troncs de palmiers et de stippes de palmes supports d’un damage de pierraille et de terre.
Il arrive fréquemment qu’un corps de logis enjambe la ruelle sur laquelle il s’ouvre en fenêtre à jalousie, ornées d’un décor de briquetage au-dessus duquel se projette une gargouille faite d’une branche d’arbre évidée.
Étranges en vérité ces belles demeures de Tozeur qui ne sont pas sans rapport avec celles de la Tihama yéménite (Zabid en particulier). Simple coïncidence sans doute.
Tout le vocabulaire est arabe, la population étant bédouine mêlé d’un fond berbère, mais on retrouve, dans ces décors géométriques des façades, des compositions qui ne manquent pas d’évoquer les décors des poteries modelées, des tissages berbères, voire des coffres kabyles. Sans doute sont-ils les vestiges d’un art ancestral qui n’a pas oublié son lointain passé, celui-là même déjà évoqué à Sadrata.
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Posté Le : 18/07/2021
Posté par : patrimoinealgerie
Ecrit par : Photo : Maison de Tozeur, Tunisie (photo L. Golvin).
Source : L. Golvin, « Architecture berbère », Encyclopédie berbère [En ligne], 6 | 1989, document A264, mis en ligne le 01 décembre 2012