Algérie

Appréciation du rapport de la Banque mondiale 2008 sur la situation de l?économie mondiale



Je propose d?analyser le rapport de la Banque mondiale 2008 en essayant de répondre à quatre questions fondamentales, situation qui a un impact réel sur toute la société algérienne.1- Première question : quelle est la situation de l?économie mondiale ? La croissance de l?économie mondiale antérieure à 2008 a été supérieure à 5% avec plus de 2% pour les pays développés et globalement tirée par des pays émergents comme la Chine, l?Inde, la Russie et le Brésil, les deux premiers pays représentant plus du 1/3 de la population mondiale. En effet, le taux de croissance de la Chine a été supérieur à 11%, celui de l?Inde à 9%, et celui du Brésil et de la Russie supérieur à 6%. Des experts de la CEE avancent que la Chine détrônera l?Allemagne fin 2008 pour arriver à la troisième place (Produit intérieur brut dépassant 3.000 milliards dollars fin 2007, soit plus de 30 fois le PIB algérien et 60 fois hors hydrocarbures). Et que si ce taux se maintient, elle peut aspirer à devenir horizon 2025/2030 la première puissance économique mondiale. Au niveau de la zone euro, le taux de croissance a été de 2,8% en 2006 et 2,5% en 2007. Mais ce taux global devrait être affiné dans la mesure où le taux de croissance de la vieille Europe a été dynamisé par les nouveaux pays entrés dans la zone euro comme la Hongrie, la Pologne dont le taux de croissance a été de 6,6% en 2006 et 6,3% en 2007, avec une bonne tenue de l?Allemagne qui est en excédent commercial malgré que l?euro s?est apprécié de plus de 47% ces 6 dernières années, ce qui n?a pas été le cas de la France. Pour les USA, locomotive de l?économie mondiale, dont le dollar représente plus de 75% des transactions mondiales, le taux de croissance a été légèrement supérieur à 2%. Le récent rapport de la Banque mondiale avance pour 2008 un taux de croissance global pour les USA de 1,9% et un autre rapport de la FED entre 1,5 et 1,8% et pour toute la zone euro il devrait être de 2,1% fin 2008.Globalement, le taux de croissance de l?économie mondiale devrait se situer à 4% en 2008, 3,8% en 2009 grâce aux pays émergents dont le taux de croissance devrait être supérieur à 7%, contre une moyenne globale des pays développés d?environ 2%. Mais il faut être réaliste, toute crise qui affecte les USA se répercutera automatiquement sur l?ensemble de l?économie mondiale dans la mesure où les économies, tant européennes que des pays émergents, notamment chinoise, sont fortement imbriquées dans l?économie américaine. Il existe des vases communicants : la Chine, la Russie, l?Inde et les pays du Golfe prennent des centaines de milliards de dollars en bons de Trésor américain contribuant d?ailleurs à équilibrer la balance de paiement de ce pays. La Chine (plus de 500 milliards de dollars) et l?Arabie Saoudite (plus de 900 milliards de dollars) sans compter la dynamique économie des Emirats Arabes Unis et du Qatar, créent des fonds d?investissement chargés de prendre des actions au niveau à la fois de grandes firmes et des places financières internationales. Les pays développés délocalisent et investissent massivement dans les pays émergents dont le niveau de vie, notamment des Chinois et Indiens, s?est considérablement amélioré grâce à leur adaptation à la mondialisation ayant misé sur le savoir (ère de l?accumulation du XXIème siècle) et l?entreprise seule créatrice de richesses. Cela expliquant en partie, combinée avec l?extension des biocarburants, la flambée des produits alimentaires au niveau mondial qui ne sera pas conjoncturelle mais structurelle, les conditions climatiques en Australie et en Ukraine étant des explications accessoires. Ce qui m?amène à la deuxième question. 2 - Le prix du pétrole actuel qui approche 100 dollars est-il une explication de la récession de l?économie mondiale et quels sont les fondements des turbulences boursières ? En réalité, le modèle énergétique actuel n?est qu?un des aspects qui explique la tourmente de l?économie mondiale. En effet, la rareté de l?énergie avec un cours qui dépassé récemment 100 dollars. Toujours pour cet aspect stratégique la dépendance énergétique qui devrait passer de 50% à plus de 70% horizon 2020 avec l?entrée de la Chine qui a importé en moyenne annuelle 2006/2007 pour plus de 45 milliards de dollars US d?hydrocarbures. Cela explique parallèlement le volet défense et sécurité, où c?est dans ce contexte qu?est lancé, dès 1995, le dialogue méditerranéen de l?Otan (DM) et en juillet 1997 le Sommet de Madrid des chefs d?Etat et de gouvernement des pays de l?Otan créant le Groupe de coopération méditerranéenne (MCG) qui est placé sous l?autorité du Conseil de l?Atlantique Nord. Pour l?Europe, aussi dépendante de l?énergie que les USA, la fin de la guerre froide, les velléités d?émancipation de la tutelle américaine et la volonté de construire avec les pays de la région des relations économiques privilégiées accroissent de manière significative cet intérêt (projet de Barcelone). Lié aux aspects économiques, va revenir à la surface le vieux rêve d?Europe de la défense que caressaient un certain nombre de pays du vieux continent dont le fer de lance est actuellement la France à travers sa vente du nucléaire à des fins pacifiques. Autre élément fondamental des turbulences de l?économie mondiale, la financiarisation accrue en déconnexion avec la sphère réelle expliquant le faible taux de croissance avec un niveau jamais atteint de valeurs refuges comme l?or (870 dollars l?once et un euro 1,47 dollar) et la non symbiose de la dynamique économique et de la dynamique sociale. Et ce, malgré une maîtrise relative du taux d?inflation du fait de la mise en place de mécanismes de régulation comme l?attestent les actions des différentes banques centrales et du nouveau rôle du FMI et de la Banque mondiale comme éléments de régulation pour éviter la grande crise de 1929 et certaines crises conjoncturelles de 1974, 1980 et 1998 après le relèvement du prix du pétrole (les hausses du cours du pétrole de plus de 400% entre 1999/2008 ont été absorbées, le taux d?inflation aux USA et en Europe étant inférieur à 3%). La dernière réunion du G8 insiste fortement sur la mise en place de mécanismes supranationaux de régulation de l?économie mondiale. Ces dysfonctionnements ont été concrétisés à travers la crise des prêts hypothécaires (subprimes) en août 2007, crise qui s?est propagée à l?ensemble des bourses mondiales avec des pertes estimées à plusieurs centaines de milliards de dollars qui ont forcé la banques centrales à injecter des sommes colossales pour éviter une crise généralisée.Ainsi, la mondialisation en marche de l?économie s?accompagne de sa financiarisation croissante avec le rôle central des actionnaires où nous avons deux types de détention d?actions. La détention directe (ceux qui les détiennent en propres) et la détention indirecte (ceux qui les détiennent par le biais d?un intermédiaire : organismes de gestion, sociétés d?assurances-vie, caisses de retraite, SICAV). Le fait nouveau réside dans la modification rapide et importante du type d?actions détenues par les ménages. La détention directe d?actions devient minoritaire, pendant que la détention indirecte s?est fort développée. Ce sont aujourd?hui les fonds de pension qui contrôle Wall Street gérant aujourd?hui 10.000 milliards de dollars US dont la moitié en actions, soit 30% de la capitalisation boursière des USA et contrôlent une bonne partie des bourses européennes, alors qu?en 1950, les fonds de pension et les fonds mutuels possédaient moins de 3% du stock des actions cotées. L?Europe des 15 avant le récent élargissement regroupe 25% de la capitalisation mondiale, les USA plus de 40% et le Japon 15%. En l?espace de vingt ans, les vingt premières capitalisations au monde ont été multipliées par dix, et quatorze de leurs membres ont été remplacés. Récemment, des pays émergents bousculent la hiérarchie, pesant de plus en plus lourd sur les marchés, entièrement dominée il y a vingt ans par les Américains et les Japonais : Industrial and Commercial Bank of China (ICBC); le géant de l?énergie russe Gazprom, coté depuis 1996; l?opérateur de télécommunications China Mobile, coté à Hongkong depuis 1997, compte parmi les trente premiers du classement et Tata Steel, un des plus grands sidérurgistes indien coté à Bombay qui vient en janvier 2008 de lancer la voiture la moins chère du monde. 3- Certes, il y a la percée de pays émergents mais subsiste toujours le problème de la dualité du Nord et du Sud qui, même avec la stabilité du monde avec l?important problème écologique, m?amène à la troisième question. En effet, considérant l?incidence qu?aura la mondialisation sur les perspectives des 25 prochaines années, le rapport de la Banque trace un scénario de base qui verra l?économie mondiale progresser de 35.000 milliards de dollars en 2005 à 72.000 milliards en 2030. Mais cela ne va pas sans poser de véritables problèmes soulevés récemment au G8. Selon le rapport, le réchauffement planétaire constitue un risque grave, la hausse de la production signifiant que les émissions annuelles de gaz à effet de serre augmenteront de l?ordre de 50% d?ici à 2030, et qu?elles doubleront probablement d?ici à 2050, en l?absence de réformes de grande portée (accord de Kyoto) surtout avec les émissions de pays émergents qui risquent la destruction de notre planète. Pour éviter cela, les politiques à mettre en oeuvre devront promouvoir une croissance propre, de manière à restreindre les émissions à des niveaux qui finiront par se traduire par une stabilisation des concentrations dans l?atmosphère. En outre, les pays pauvres auront besoin d?appuis au titre de l?aide au développement pour pouvoir s?adapter aux changements à venir sur le plan environnemental, et un soutien devra notamment leur être fourni pour qu?ils puissent participer au marché du carbone. Par ailleurs, cette richesse ne doit pas voiler les disparités tant mondiales à travers la concentration des richesses au Nord, qu?au sein même des nations des pays développés. Sur plus de six milliards d?habitants que compte la planète, un cinquième - dont 44% en Asie du Sud - ont moins d?un (01) dollar par jour de revenu et le taux est plus important pour l?Afrique. Le revenu moyen des 20 pays les plus riches est 37 fois plus élevé que celui des 20 pays les plus pauvres qui appartiennent à l?Afrique subsaharienne, à l?Asie du Sud et à l?Amérique Latine. Quand on sait que, dans les 25 prochaines années, la population mondiale augmentera de deux milliards d?individus ? dont 1,94 milliard pour les seuls pays en voie de développement ? on peut imaginer aisément le désastre qui menace cette partie de l?humanité si rien de décisif n?est entrepris dès aujourd?hui. Pour faire reculer la pauvreté, la croissance est une condition nécessaire mais non suffisante, devant s?intéresser à la distribution du revenu, à l?amélioration des soins de santé et de l?éducation, et au cadre d?activité économique. Certes, l?injustice au niveau mondial est due à une répartition inéquitable des richesses mais aussi à la gouvernance, des plus discutable, qu?exercent les élites politiques des pays du tiers-monde. 4- D?où l?importance de se poser la quatrième question, à savoir quels sont les nouveaux mécanismes de régulation de l?économie mondiale afin de pouvoir s?y adapter renvoyant au pourquoi du blocage systémique de l?économie algérienne ? Car en cette ère de mondialisation, il est utopique de raisonner en termes d?Etats-nations et toute politique locale doit prendre en compte le processus de mondialisation, rapport social complexe, processus non encore achevé, tant à travers les flux commerciaux, de capitaux, les régimes de change... Aussi y a-t-il lieu de tenir compte de la stratégie tripolaire mondiale à travers l?Alena en Amérique, l?Apec avec l?Asie et le grand espace européen surtout avec son élargissement. Cette configuration géostratégique, même lente, s?accompagne de l?adaptation des grosses firmes mondiales qui éclatent en vastes réseaux à travers le monde tissant des relations complexes entre les circuits réels et financiers, transgressent les frontières géographiques nationales grâces à la révolution dans les nouvelles technologies, avec prédominance des services qui deviennent des activités marchandes à forte valeur ajoutée.Le véritable nationalisme se mesurera à l?avenir par la contribution des éléments composant l?unité géographique à la valeur ajoutée mondiale. C?est cela qui explique que certains pays du tiers-monde tirent la locomotive de l?économie mondiale en se spécialisant de plus en plus dans ces segments nouveaux. La chute des syndicats corporatistes, souvent appendice de pouvoirs bureaucratiques, s?accompagne d?un nombre croissant d?accords collectifs. Les emplois dans la production courante tendent à disparaître comme les agents de maîtrise et d?encadrement impliquant une mobilité des travailleurs, la généralisation de l?emploi temporaire, et donc une flexibilité permanente du marché du travail supposant une formation permanente de haut niveau pour s?adapter à ce monde turbulent, devant forcément changer de travail plusieurs fois dans notre vie. Avec la naissance de ce nouveau marché mondial toujours en mutation, la valeur conceptuelle est plus élevée par rapport à la valeur ajoutée tirée des économies d?échelle remettant en cause les anciennes théories et politiques économiques héritées de l?époque de l?ère mécanique où semble se confiner l?actuelle stratégie industrielle algérienne proposée en 2007. Cela a des incidences sur le système de formation où le XXIème siècle est celui de la dominance du savoir et de la maîtrise de l?information qui devient non plus le quatrième pouvoir mais le pouvoir lui-même.En conclusion, quelles leçons tirer pour l?Algérie de ce rapport ? En ce début du XXIème siècle, les menaces ont pour nom terrorisme qui est une menace planétaire, prolifération des armes de destruction massive, crises régionales, récession de l?économie mondiale et l?espoir est le dialogue des cultures et une prospérité économique mondiale partagée. Aussi, entre la lointaine et très présente Amérique et la proche et bien lointaine Europe, entre une stratégie globale et hégémonique, qui possède tous les moyens de sa mise en oeuvre et de sa projection, quelle attitude adopter et quels choix socioéconomiques pour l?Algérie après la stabilisation politique 1999/2004 ? L?adaptation étant la clef de la survie et le pragmatisme un outil éminemment moderne de gestion des relations avec autrui, notre pays ne doit faire que celui que commandent la raison et ses intérêts. Aussi, loin des discours en déphasage avec la réalité en ce monde où le principal défi pour notre pays sera la maîtrise du temps, son adaptation à la mondialisation suppose une gouvernance interne rénovée par la lutte concrète contre la corruption qui s?est socialisée, l?Etat de droit, l?accélération de la construction de l?économie de marché concurrentielle dans le cadre de l?interdépendance mondiale et la cohésion sociale. Et selon une vision cohérente et datée évitant des replâtrages conjoncturels sous la pression des événements à travers une véritable efficacité gouvernementale et l?urgence de l?adaptation à la mondialisation au moment de ces turbulences financières. Aspects que j?ai développés en direct le 11 janvier 2007 à la radio internationale algérienne, son adhésion à l?OMC lorsqu?on sait que les deux derniers pays ayant accédé à l?OMC sont l?Arabie Saoudite (2005), les principaux pays OPEP étant présents, le Vietnam du Nord (2006) restant pour des pays potentiels du Sud, la Libye, la Corée du Nord et l?Algérie. La panne de la réforme globale avec la dominance de comportements rentiers explique selon le dernier rapport de la Banque mondiale de 2008 le faible taux de croissance en Algérie revu à la baisse pour 2006 qui était prévu à 2,8% par le FMI, qui n?aurait été selon la Banque mondiale que de 1,8% et qui serait de 3,4% en 2007, soit un des plus faibles en Afrique et au Moyen-Orient (moyenne de plus de 5% 2006/2007). Et ce, malgré des dépenses monétaires sans précédent entre 2004/2009 avec l?enveloppe du plan de soutien à la relance économique de plus de 180 milliards de dollars. Cela explique également le paradoxe de l?aisance financière (plus de 100 milliards de dollars de réserve de change fin 2007, en réalité 53 milliards d?euros) et une relative régression économique et sociale avec un retour à l?inflation, du chômage que l?on voile par des emplois rentes (le taux d?emploi étant fonction du taux de croissance et c?est une loi économique) et donc une nette détérioration du pouvoir d?achat. Ces résultats décevants impliquent de diagnostiquer les raisons et de proposer en urgence des solutions réalistes, évitant toute fuite en avant suicidaire de se poser la question : est-ce que le programme présidentiel 2004/2009 qui a une cohérence est-il appliqué correctement ? *Expert International


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