Elargir le consensus pour une accélération des réformes économiques et une reprise du processus de libéralisation de l'économie algérienne.
Tels sont les objectifs défendus par le FCE et de nouveaux acteurs du débat économique, les think-tanks «nabni» et «défendre l'entreprise». Chacun à sa manière et sans concertation apparente met en exergue le besoin d'une volonté politique forte, l'urgence des réformes et la complexité des chantiers à mettre en 'uvre.
TAUX D'INVESTISSEMENT CHINOIS MAIS TROIS FOIS MOINS DE CROISSANCE
Stimulé par le virage économique étatiste négocié par les pouvoirs publics depuis 2008, le FCE semble se positionner au cours des dernières années dans un rôle qui se situe nettement au-delà de la défense des intérêts catégoriels, au sens le plus strict, de ses adhérents. Echaudé, le FCE veille à éviter cependant d'apparaître comme un pôle d'opposition. Il se veut, sous l'impulsion de son président M. Reda Hamiani, un catalyseur de la réflexion et des propositions alternatives à la démarche économique adoptée par le gouvernement algérien. Après avoir formulé au printemps dernier «50 propositions pour un nouveau pacte de croissance» et «auditionné» les principaux partis politiques pendant la récente campagne électorale, le FCE a remis le couvert en invitant à un débat Abdellatif Benachenhou. L'ancien ministre des Finances a relevé qu'il était nécessaire pour l'Algérie de repenser sa politique de développement au moment, dit-il, où le pays «connaît sa plus grave crise de l'investissement productif depuis l'indépendance». «Nous avons un taux d'investissement à la chinoise, mais une croissance trois fois moindre que la Chine», a-t-il relevé. Et, dit-il, «il y a effectivement urgence, comme le propose le FCE, d''uvrer à instaurer un nouveau régime de croissance moins dépendant des hydrocarbures». Pour Benachenhou, la «libéralisation de l'économie est devenue aujourd'hui presque indispensable» et la règle des 51/49% imposée à tout partenaire étranger est une «mesure trop générale pour être efficace…». «Régler les problèmes d'investissement avec du nationalisme primaire n'est pas une bonne méthode», a-t-il soutenu. Comme d'autres experts algériens, il estime que la règle des 51/49% doit être modulée au cas par cas. Il s'associe également à une revendication classique du FCE en préconisant «d'aller vers une industrie bancaire à trois pieds, soit des banques privées algériennes, des banques étrangères et des banques publiques intégrant la commercialité».
«LA GRANDE SOUFFRANCE VIENT D'UN ETAT QUI… BLOQUE TOUT»
Après Nabni, au début du mois, c'est au tour du think-tank «défendre l'entreprise» de publier un «livre blanc sur les 50 ans de l'économie algérienne». Regroupés autour de Taïeb Hafsi, des spécialistes comme Abdelmadjid Bouzidi, Abdelhak Lamiri et une brochette d'universitaires tirent de nouveau la sonnette d'alarme. Ils soulignent en substance que «dans les toutes prochaines années, l'économie algérienne risque de se trouver face aux conséquences d'un effet de ciseaux dramatique. D'ici une dizaine d'années, les ressources d'hydrocarbures connaîtront une chute irrémédiable et ne pourront donc plus alimenter la croissance économique comme elles l'avaient fait jusque-là. D'un autre côté, la demande sociale explose, faisant que les ressources fiscales ordinaires n'arrivent plus à la financer et qu'on soit forcé aujourd'hui de consacrer plus de 60% de la fiscalité pétrolière pour couvrir les dépenses courantes de l'Etat. Dans ces conditions, si un nouveau moteur de croissance n'est pas mis en branle dans les meilleurs délais, l'Algérie connaîtra bientôt un véritable collapsus de son économie avec des conséquences dévastatrices sur la cohésion sociale». Taïeb Hafsi concentre sa critique sur «l'étatisme économique qui revient avec force en Algérie». Pour le professeur à HEC Montréal, «dans un pays comme l'Algérie, la grande souffrance est celle d'un Etat qui est en grande partie théorique et maladroit. Souvent peu connaissant de la réalité et englué dans ses propres procédures, l'Etat, au lieu de susciter le mouvement et la dynamique qui font le progrès économique, bloque tout. Dans le processus de création de richesse, il y a bien entendu des anomalies qui apparaissent. Il ne faut pas, sous prétexte de les corriger, établir des lois et des règlements qui paralysent tout le monde».
L'ALGERIE N'INVESTIT PAS ASSEZ DANS L'EDUCATION ET LA FORMATION
De son côté Abdelmadjid Bouzidi plaide en faveur de l'émergence accélérée de «champions nationaux». «L'économie algérienne a besoin d'entreprises performantes. Le retard pris dans ce domaine est considérable et les politiques économiques actuellement en 'uvre restent largement en deçà du défi qui nous impose de créer rapidement des champions. Des entreprises compétitives qui récupèrent leurs parts de marchés intérieurs et qui engagent la bataille de la conquête de débouchés extérieurs. Les ressources existent, les entrepreneurs ont de l'envie, il reste au gouvernement à élaborer une stratégie de sortie du tout-pétrole. Et cette stratégie ne peut reposer que sur la réhabilitation de l'entreprise, de la production et de la productivité.» Le développement des ressources humaines est un autre des chantiers vitaux identifiés par les experts de «défendre l'entreprise». Abdelhak Lamiri remet en cause le mythe d'un Etat algérien investissant massivement dans l'éducation et la formation. «Les ressources nationales allouées au développement humain de même que son management qualitatif sont loin d'être satisfaisants. Ceci explique la faiblesse et la stagnation de la productivité dans notre pays. La France, les USA et la Corée du Sud dépensent plus de 6% de leur PIB pour les divers secteurs d'éducation. Si l'on incluait les dépenses privées, on arriverait facilement à 8%. L'Algérie consacre 4,5% de son PIB à l'éducation. Autrement dit, ces pays dépensent au moins 15 fois plus que nous pour chaque élève ou étudiant. Les entreprises des pays développés investissent plus de 2,9% de la masse salariale en divers programmes de formation et de recyclages. La Corée du Sud atteint plus de 3,5% de la masse salariale. En Algérie, nous en sommes à 0,4%. Nous devons consentir des efforts énormes, quantitativement et qualitativement, pour espérer être un pays émergent».
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Posté Le : 26/06/2012
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Yazid Taleb
Source : www.lequotidien-oran.com