Algérie

Analyse du jeudi



Ces paroles qui trahissent... Rabah Kebir est rentré de son «exil» allemand et a fait sa rencontre avec la presse. Le pouvoir, aux dépens des règles que fixe la «Charte pour la paix et la réconciliation nationale» qu’il a fait approuver par référendum populaire et ses textes d’application décidés et signés par le Président de la République, a laissé faire. Les choses étant ce qu’elles sont, personne n’a la puissance de l’Etat pour amener l’Etat à respecter ses propres lois. Mais, en attendant, puisque Rabah Kebir a parlé avec la bénédiction des autorités du pays, autant s’arrêter à ce qu’il dit, histoire de voir ce qui a changé en lui par rapport aux années où il s’est mis en hors-la-loi et qu’il y avait un mandat de recherche contre lui. Il tient toujours à son «Etat islamique» qui, selon lui, est celui qui a été prévu par la Proclamation de Novembre 1954. C’est ce que disait son parti avant sa dissolution par la justice et durant toute sa période clandestine qui a suivi. Aucune voix, suffisamment forte, n’est venue encore, ni à cette époque, ni aujourd’hui, pour mettre un terme à cette usurpation de la glorieuse Proclamation par le parti intégriste dissous et ses dirigeants. Pour aller vite, cette Proclamation a été rédigée par une avant-garde qui a déclenché la guerre de libération nationale. Elle a résumé toute son idéologie en quelques points très concis qui sont connus sous le nom de Proclamation de Novembre. Pour se faire une idée sur le type d’»Etat islamique» qu’elle voulait, le plus court chemin est de relire les résolutions du dernier congrès du PPA/MTLD qui a décidé la création de l’»Organisation secrète» (O.S) dont sont issus les rédacteurs de la Proclamation. Ces résolutions affichent clairement et explicitement, noir sur blanc, qu’il ne s’agit pas de confondre «conscience nationale» et «conscience religieuse», que la lutte pour l’indépendance nationale n’est pas une «contre- croisade», que la «qualité d’Algérien» ne repose pas sur des considérations religieuses, ethniques, régionales, etc. Voilà, très brièvement, l’idéologie des rédacteurs de la Proclamation. Ils voulaient l’Etat dont ils rêvaient «démocratique» et «social» avec l’Islam comme référant culturel et non idéologique, étant déjà entendu, depuis la création de l’OS, qu’il n’y avait pas d’amalgame à faire entre la «conscience nationale» et la «conscience religieuse «. Et s’il faut apporter une preuve supplémentaire aux usurpateurs de la Proclamation, que l’Etat rêvé par les artisans de Novembre n’avait rien à voir avec un Etat intégriste, ils n’ont qu’à relire leur maître à penser, Abdellatif Soltani, qui leur disait, noir sur blanc, que la guerre de libération n’a jamais été un «djihad» au sens religieux du terme du fait qu’elle n’a pas été déclenchée «dans la voie de Dieu», mais pour libérer «un arbre et une pierre» (entendre la Patrie).Si, sur ce point de l’usurpation de Novembre, le FIS que représente Rabah Kebir n’a changé en rien, il y a au moins un autre point sur lequel il n’arrive pas à se corriger. Celui de s’obstiner dans sa volonté de créer un parti politique sur les ruines qui restent de l’ex-FIS. Ce qui est choquant dans cet entêtement n’est pas tant le désir de revenir sur la scène politique avec une autre formation que l’argument avancé pour le justifier. Pour lui, dans sa dernière rencontre avec la presse, l’historique PPA a bien été remplacé par un autre parti lorsqu’il fut interdit. En citant nommément l’exemple du PPA, il a mis carrément le pied dans le plat, dévoilant une pensée autrement plus grave que son courant n’a cessé de ressasser, notamment par la voix de Madani Mezrag et la littérature de l’AIS, assimilant le régime algérien depuis l’indépendance à un régime «colonisateur» de l’Algérie, inféodé à la France, dirigé par les «enfants de la France, «Hizb França», etc. Certes le PPA, en son temps, a été interdit et s’est redéployé sous un autre nom. Mais, il a été interdit par qui? Prendre le PPA comme exemple n’a d’autre but que d’affirmer que le FIS a été dissous par les nouveaux «colonisateurs» de l’Algérie. Si le mot lui-même n’a pas été affiché durant la conférence de presse, l’exemple avancé est plus que flagrant. Il y a de ces paroles qui trahissent... Visiblement le chantier de la «révision» et de la «correction», entamé par cette version de l’ex-FIS, est loin d’être considéré comme une avancée. Mohamed Issami


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