Algérie

Amazigh kateb-Premier disque en solo : Requêtes terriennes



Amazigh kateb-Premier disque en solo : Requêtes terriennes
Il a choisi ce 17 octobre, en souvenir des martyrsde Paris, pour sortir Marchez noir. Nous l'avonsécouté en avant-première. Amazigh ouvre le bal des requêtes humanistes avec un texte de son regretté père Kateb Yacine, disparu il y a tout juste vingt ans. Il frappe d'emblée les imaginations, et l'album va continuer sur ce registre doux amer jusqu'au dernier des 12 titres : « Je vous reviens avec ma gueule de paladin solitaire et je sais que ce soir monteront des chants infernaux aux hurlements des vents par le cri de décembre. » Pour célébrer ce décembre, autre symbole de frimas et de douleur vive pour l'Algérie, Amazigh veut marquer les esprits en faisant paraître l'album intitulé Marchez noir ce samedi 17 octobre 2009, 48 ans après les sanglants événements parisiens qui ont causé tant de morts dans les rangs innocents de la population algérienne émigrée. A l'époque, nous a-t-il dit, en juin, dans un entretien, on jetait les gens dans la Seine, « aujourd'hui, c'est nous qui nous jetons sur scène », ce qu'il a redit dans nos colonnes samedi dernier. Le révolté à fleur de peau, l'exilé douloureux, celui qui ne cache pas ses mots sous un tamis est donc là, dans la lignée paternelle dont il s'affirme l'héritier en reprenant deux de ses textes : Bonjour et Africain : « Autant de fois que le soleil décline, et nous oblige à faire feu, ascètes relevés des dilemmes/ le secret de notre influence jamais ne s'est perdue ».Dans un autre titre, Ma tribu (chanté et mis en rythme avec le DJ Boulaone, une première pour Amazigh), il approche dans ses paroles la puissance poétique de son père : « Les vents s'acharnent à couvrir notre histoire de poussière, de voiles, de viols, de mort et d'arbitraire. Les ombres du passé ne veulent pas disparaître. Une Algérie se meurt dans une autre en train de naître. » Il y a dans ces derniers mots un résumé de l'espoir, lourd d'incertitudes mais aussi de volonté, qui surnage d'un album dans lequel la dénonciation remue parfois les tripes. D'ailleurs, dans ce même texte, le refrain appelle au cauchemar : « Dans ma nuit, je prie, j'appelle les esprits, mes cris résonnent autour de moi, tout est détruit. » En arabe algérien, c'est Mociba qui frappe les consciences, à la fois par son contenu où la critique sociale et politique est mieux maîtrisée encore qu'elle ne le serait en français. La voix du chanteur se fait plus douce, et surtout il réinvente un style dans lequel il a baigné dans sa petite enfance à Alger, lui redonnant un allant musical, à la fois classique et transcendé, dans une sorte de « post chaâbi ». On sent qu'il y prend un plaisir particulier, puisque c'est le morceau le plus long, avec huit minutes. La joie algéroise qu'on retrouve également dans le premier titre Bonjour.C'est la vie, c'est sa vie. Il le chante encore dans Dounia, en arabe dialectal. Pour le reste d'un album dont chaque auditeur trouvera un son ou un mot qui lui convient, on ne peut qu'être ravi de voir son auteur attaché aux rythmes gnaoui qui ont fait le bonheur de son début de carrière. Cette influence africaine est aussi prégnante dans Dimantou. Et quand il trempe le raï dans le gnaoui, il redonne puissance à ce qu'avait inventé avec succès Raïna Raï, dans la lignée réinventée des chouyoukh de l'Ouest algérien. Internationaliste il se veut et, dans Sans histoires, il fait le tour de la planète pour renvoyer dos à dos, arme à arme, tous les pays dans les abjectes responsabilités d'un monde inhumain. Misère, exilés de la faim, de la liberté ou de la dignité, vie sordide, dénonciations des injustices et des abus de pouvoir, les textes d'Amazigh tapent comme sur un bendir magique pour exorciser les douleurs humaines. Toujours sur des airs entraînants, avec un appel à le rejoindre : « Chante avec moi, chantons pour ceux qui ne veulent pas marcher au pas. » Le message est passé.


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)