Amara Saïd La passion jusqu?au bout

Si Amara Saïd devait compter sur l?aide de son père pour être footballeur, il n?aurait jamais dépassé le niveau du football de quartier dans la première moitié de la décennie 40.C?est que, à l?instar de nombreux parents à l?époque, Amara Bachir voyait d?un mauvais oeil ce sport qui risquait de détourner son fils des études, l?éternel dada des parents soucieux de l?avenir de leurs enfants. Le jeune Saïd s?arrangeait donc toujours pour rentrer à la maison après un match, avant l?arrivée de son géniteur. Après l?OSSU, c?est le GCS (Gaîté Club Saïda) et là, l?intervention des dirigeants était indispensable pour obtenir le feu vert. C?est simple, Cheikh Bachir Amara n?a «baissé la garde» qu?en 1954 lorsque Saïd (21 ans) a signé au SCBA, le club le plus titré d?Afrique du Nord. Mais comment donc un club possédant un effectif aussi riche que le Sporting avec sa pléiade de grands joueurs tels Marion, Calatayud, Cano, Lepage, Benyamina, Aber, Benghamra, Gros et Olmiccia s?est-il intéressé à ce jeune élément ? L?explication est simple : lors d?un match amical GCS - SCBA, Amara, encore junior, avait étalé un talent très prometteur et a mis K.-O. le grand arrière central Cano à la suite d?un coup franc, ce qui a fini par convaincre les dirigeants et le fameux entraîneur René Rebibo. Pour la petite histoire, le SCBA a terminé à 10.La carrière de Saïd Amara est jalonnée d?étonnantes retrouvailles. Ainsi, son premier match officiel il l?a disputé contre l?USMO, c?est-à-dire face à ses propres idoles ! Le lendemain, le compte rendu signale «la classe» de Amara au sang-froid surprenant. Qu?est-ce que ce match a représenté pour Saïd Amara ? Réponse sans ambages de notre interlocuteur : «Mon rêve, c?était de voir et de serrer la main à Moussa, Fenoun. Alors, imaginez, j?ai joué contre eux. Mon rêve venait d?être exaucé ! Et, tout naturellement, Amara sera titulaire en sélection d?Oranie où les places étaient pourtant chères. Le retrait des équipes algériennes ordonné par la direction du FLN et dont le non-déroulement de la finale de coupe d?AFN USMBA - SCBA reste l?un des hauts faits de cette période, est une aubaine pour Saïd Amara qui est contacté par deux clubs, Marseille et Monaco. Mais les hommes proposent et le destin dispose. Ayant débarqué à Marseille il trouve un télégramme à la réception qui évoquait un essai au RC Strasbourg.Séduit par cette offre, Amara rallie Strasbourg par train de nuit et, après quelques heures de repos seulement, il est aligné pour affronter le onze du bataillon de Joinville où figuraient de futurs titulaires de l?équipe de France, comme Muller, Wendling, Oliver et Fulgenzy. L?essai est concluant après une tournée en Allemagne de l?Est (RDA). Amara s?impose en dépit des difficultés dues au très rude climat alsacien en hiver. A la fin de cette saison, le RCP ayant chuté en division deux, Amara passe à Béziers en 1957-1958. Puis ce fut la période bordelaise où Amara s?est adapté très vite. Les nombreux articles de presse soigneusement compilés attestent qu?il s?est constamment mis en évidence contre les stars de l?époque. Puis, ce fut l?équipe du FLN, le retour en Algérie et le second départ d?une très riche carrière, qui l?a mené au sommet de la hiérarchie, ayant été, tour à tour, joueur-entraîneur au MCS, à la JSMT, à l?ESM, entraîneur national, entraîneur instructeur CAF, DTN, DEN, vice-président puis président de la FAF, membre de la commission de développement technique et, enfin, président de la ligue régionale de football de Saïda depuis 2002 ! A 75 ans, Amara ne compte pas s?arrêter là et a fait sienne la formule chère à Voltaire : «Il vaut mieux mourir que de traîner dans l?oisiveté, travailler, c?est vivre». Pourquoi en serait-il autrement puisque, physiquement et intellectuellement il est toujours au top et que la passion l?habite toujours ?  Principes et franc-parler