Algérie

Alloula sans frontières



Alloula sans frontières
Il était l'une des figures les plus respectées de la ville de Oujda et un nom en or de la scène théâtrale marocaine. Lui, c'est feu Araj Jelloul que nous avons rencontré à Rabat lors d'un atelier sur le thème « Médias et migrations », organisé à l'initiative de l'institut Panos Paris du 15 au 20 octobre. Il nous a quittés, le 7 novembre dernier, à l'âge de 54 ans. Araj Jelloul était un militant chevronné, engagé sur tous les fronts. Il était de tous les combats citoyens de son pays. Employé des Postes, il était syndicaliste, membre de l'Association marocaine des droits de l'homme et dirigeait l'association Homme et Environnement, basée à Berkane. Très sensible aux problèmes des migrants subsahariens, il avait intégré également le GADEM (Groupe antiraciste pour la défense des étrangers au Maroc). Militant de gauche, il était également membre de l'USFP. Son activisme acharné coûtera, à Araj Jelloul, six ans de prison dans les geôles de Hassan II, une épreuve dont il garda force séquelles.Nous le disions, Araj Jelloul était surtout un homme de théâtre, lui qui était monté sur les tréteaux dès 1967. Auteur et dramaturge, il avait fondé, avec un ami metteur en scène, la troupe du « Masrah atalaii » (le Théâtre de l'avant-garde), en 1976. Il nous racontera par le menu les échanges passionnés qu'il entretenait avec Abdelkader Alloula. « Notre troupe était jumelée avec la coopérative du 14 Mai de Alloula. On avait beaucoup travaillé ensemble. Quand on organisait des festivals à Oujda, Alloula apportait tout son matériel du théâtre d'Oran, l'éclairage, la régie sonore et tout. C'était quelque chose de merveilleux », nous confiait-il. Araj Jelloul vivait les frontières comme « une blessure », nous disait-il. « C'est un crime contre les deux peuples. » « Les frontières fermées, pour moi, c'est une très très grande bêtise », assénait-il entre deux toux sèches.« Quand les frontières étaient ouvertes, j'allais voir mes amis, des artistes algériens que j'aime beaucoup. On allait à Tlemcen, Sidi Bel Abbès, Oran... » La dernière fois où Jelloul s'était rendu à Oran, c'était peu avant la mort de Alloula, assassiné le 10 mars 1994. « Juste avant, on est passés le voir à Oran, c'était le Ramadhan, je crois. Il nous a invité à manger chez lui. J'ai décliné l'invitation en lui disant qu'il fallait qu'on rentre. Arrivés à Oujda, j'appris qu'on avait tiré sur lui. » Et Jelloul rejoignit Alloula au paradis des symboles. Paix à ton âme, l'Artiste !


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