Allada, la culture et le développement

Invité à l'inauguration du théâtre de mon amie la grande figure du théâtre béninois Eliane Chagas, je me suis rendu la semaine dernière à Allada, une commune rurale du sud du Bénin, située à environ 60 km de la capitale. Les deux heures de «piste et de poussière» qui sépare Allada de Cotonou et la situation des gens qui vivent aux abords de la route m'ont confirmé que l'Afrique a encore beaucoup de chemin à faire pour relever le défi de son développement. Après avoir emprunté, sous un soleil de plomb, des chemins escarpés à travers la brousse d'Allada, nous sommes arrivés devant un espace mi-ferme, mi- théâtre.A l'entrée, un grand panneau marron affichait «Chaslie Théâtre». A l'intérieur, une centaine de chaises en plastique ont été placées en rangers sous une grande bâche verte, face à une planche en ferraille. Je savais qu'Eliane Chagas s'était installée là, depuis quelques mois déjà, pour des raisons mystiques et qu'elle voulait y créer son propre théâtre. Quand elle me parlait de son projet une année auparavant, je lui disais tous mes doutes. Je lui disais aussi, par plaisanterie, que seules les poules seront les fidèles spectateurs de son théâtre. Arrivé au Chaslie Théâtre donc une heure avant l'inauguration, mes doutes semblaient se confirmer. Gêné, je ne voulais rien dire, jusqu'à ce que soudainement, une foule nombreuse accède au théâtre. A sa tête, les représentants du roi d'Allada ainsi que le maire de la commune.Par la suite, des enfants, des femmes, des hommes de tout âge venus de toutes les directions, ont rempli le théâtre en à peine 5 minutes. Ils étaient plus de 200 ! Dans son mot d'ouverture, le représentant du roi d'Allada a expliqué, en détails, comment cet espace culturel allait promouvoir le développement des villages alentours, notamment en permettant aux commerçants ambulants de vendre leurs produits issus des petites fermes, en attirant des touristes nationaux et étrangers, et en instruisant leurs enfants. Il a, par la suite, demandé aux ancêtres de protéger l'espace. Je devais, après lui, dire un mot sur le rôle de la culture dans le développement, mais j'ai préféré garder ma réflexion qui du coup me paraissait bien-pensante. La population d'Allada, comme beaucoup d'autres populations rurales d'Afrique, ont compris depuis longtemps que la culture est un moteur du développement. C'est à nous maintenant de concrétiser des projets allant dans sans sens.