Algérie

Alimentation gle et nationale


En 2007, le pays se retrouve loin de son épopée politiquede 1988-1992. Le pays ne fait plus de politique, c'est l'Etat qui s'en occupe.Il n'en parle plus, c'est l'ENTV qui le fait. Il ne s'y oppose plus, c'est leGSPC qui s'en charge. Le plus curieux, c'est qu'on a fini par ne plus remarquerque l'Algérie ne parle plus «politique» et ne développe plus aucun discoursidéologique d'habillage: tout a été ramené à un débat national surl'alimentation générale, ses crises, ses ministres, ses offices et ses prix. Onavait attendu une sorte de rentrée sociale capable de rendre visible desimpasses politiques, des tensions sociales, des clivages politiques durs ou desprogrammes alternatifs, il n'en fut rien.Tout le pays, de sa présidence à son peuple, en passant parses médias et ses ministres, se retrouva impliqué dans un vaste débat decuisine, une course au panier et une guerre entre disponibilité et pénurie.Toute la nation se retrouva à parler lait, semoule, pomme de terre, sucre etdattes. Avec un peuple réduit à un intestin comme le fut l'économie réduite àun pipeline. Le comble dans ce coup d'Etat de l'estomac contre le Concept estque personne ne remarqua la lente dislocation des catégories fondamentales nécessairesà la mondanité comme au cerveau comme l'Intellect, le Parti, l'Opposant, laDémocratie, la Dictature, l'Idéologie ou l'Institution.Partie sur une révolution qui a «ébahi le reste du monde»,selon les manuels scolaires, l'Algérie a abouti au statut d'une alimentationgénérale sans enseigne, réduisant l'enjeu du cosmos à une question de stock etle pari ouvert du sens de la création à une distributivité de l'espace entrecelui qui est derrière le comptoir, celui qui est devant et celui qui peut lecontourner ou le casser ou le manipuler. Du coup, vidé, anémique, inquiété,réduit et menacé par son intestin, le pays se retrouva à ne plus vouloir quel'essentiel et à ne parler que de ce qu'il peut manger, des moyens de l'acheteret des prix d'achat et de vente.Aujourd'hui, ce n'est pas un hasard si l'enjeu de ladémocratie se résume au combat des syndicats autonomes: la vie du pays serésume déjà à ce qu'il peut manger. Bien loin des fastes débats et descolériques polémiques des années 90, par exemple, où l'on pouvait s'offrir leluxe de discuter de programmes et de lapider des personnalités.Le peuple a grandi. Son estomac aussi.
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