Alhan sans Chabab

La campagne électorale commence aujourd'hui. Elle est finiedepuis des jours. Elle dure depuis le début, et elle ne sert à rien avant lafin. Dans un pays normalement constitué, avec des bras, des jambes et pas seulementune tête et un pipe-line, elle est constituée généralement d'un Peuple que l'onvise et à qui des candidats demandent de viser juste avec l'argument de lameilleure offre pour la meilleure solution. Dans ce schéma, il y a des gens quidoivent aller aux urnes, des gens qui veulent en sortir et des opérations decharme pour attirer le plus grand nombre d'abeilles. L'Etat, étant l'ensemblede tous ces gens, n'intervient nulle part, l'administration n'y vote pas et lePouvoir est un simple devoir. C'est ce que demande le peuple, la raison, leState Department US et les ONG ainsi que les démocrates transnationaux.Pourquoi cela ne fonctionne pas en Algérie? Parce qu'il y a l'Indépendance. Lescandidats sont indépendants de leurs électeurs. L'urne est indépendante de lavolonté de la majorité. L'Etat est indépendant vis-à-vis du peuple. Le résultatd'une campagne électorale est indépendant vis-à-vis des dépouillements. Pourfaire simple, il s'agit d'une opération de charme dont le but est le charme pasl'électeur.Dans une commune X, l'argent est donné par l'Etat quidécide des projets qu'il veut y mettre pour venir les inaugurer plus tard, lesélus sont sélectionnés par l'Etat pour dépenser cet argent, l'argent n'est pasproduit par le peuple, le peuple se trouve-là parce qu'il ne peut pas allerailleurs. La vraie campagne est celle que l'on mène pour se faire élire par leSystème dont le vote est plus décisif que celui de la masse morte. La campagned'aujourd'hui est-elle donc inutile? Non, elle va viser les abstentionnistes,les gens qui ne votent pas, qui ne votent plus ou qui ont compris à quoi sertle vote. Ils sont nombreux et donc l'enjeu est important: comment transformerles gens en Peuple, le Peuple en chiffres et les chiffres en victoire? C'est lebut le plus profond et le plus important dans tout système isolé et dontl'isolement peut mener à la solitude puis à la maison de retraite pour parentsencombrants. On comprendra, alors, pourquoi une campagne électorale en Algériene joue pas sur les programmes (il n'en reste que celui du président de laRépublique que l'on ne peut s'accaparer) mais sur la psychologie, laculpabilisation vis-à-vis du Père (l'Etat en l'occurrence), la Révolution denovembre, le devoir envers les morts, la peur de l'instabilité, le sentimentgrégaire, la Tribu ou la région. Reste, cependant, une question qui mérite desétudes plus approfondies: un candidat dépense-t-il plus d'argent avant lacampagne ou pendant? C'est-à-dire, dépense-t-il plus pour être dans une liste oupour accrocher cette liste sur les murs de sa ville? Peut-il, en fin deparcours, rentrer dans ses frais? Et aux frais de qui?