C’est peu fréquent pour ne pas dire une première dans notre pays. C’est une organisation non gouvernementale (ONG), une association qui a piloté tout le projet de création jusqu’à son aboutissement, le 15 février 2017, avec un atelier pour examiner et lancer la proposition de classement de cette nouvelle aire protégée.
C’est en effet une Commission nationale, démembrée en commission de wilaya selon la loi 11-02 relative aux aires protégées, qui examine le dossier et valide le classement pour permettre à l’autorité territorialement compétente d’établir le décret de création. Cette dernière, créée aussi en 2011, n’a pas siégé et délibéré depuis car, c’est de notoriété publique, la Direction générale de forêts (DGF) et l’ex-ministère de l’Environnement, les instances gouvernementales qui se partagent la gestion de la biodiversité, se sont longtemps disputés la présidence. La question est, dit-on, réglée depuis le retour du secteur de l’Hydraulique à celui de l’Environnement qui a été désigné pour la présidence de ce conclave qui a fort à faire avec les nombreuses propositions de nouvelles aires protégées terrestres et marines.
L’Area-ed a travaillé en partenariat avec l’Institut national de recherche agronomique d’Algérie (Inraa), la Direction générale des forêts (DGF), les Conservations des forêts des wilayas de Sétif et de Béjaïa et avec la collaboration des communes concernées (Babor, Oued Bared, Darguina et Tamridjet). Le projet est financé par le Fonds de partenariat pour les écosystèmes critiques (CEPF. www.cepf.net) qui accorde des aides pour la conservation de la biodiversité dans les «hotspots», les points chauds de la biodiversité, c’est-à-dire les zones de la planète riches en biodiversité mais aussi très menacées.
Stratégie
Il y en a 34 en tout, et on y compte «les montagnes, plateaux et zones humides du Tell algérien et de la Tunisie». Sa stratégie s’attache à engager la société civile à participer à la conservation de la biodiversité et par conséquent ses aides sont soumises à deux conditions majeures: elles vont systématiquement à des ONG pour des projets qui s’appuient sur une large participation des communautés locales. Le CEPF a encore deux autres projets dans le hotspot, la création du Parc national de l’Edough porté par le laboratoire Ecostaq de l’université de Annaba et celui de plans de développement local pour 4 communes du Parc national d’El Kala.
Elle doit probablement ce nom à ses sommets aigus, aux crêtes en dents de scie qui découpent le ciel comme les voiles blanches d’un galion lorsqu’ils se couvrent de neige à chaque hiver. C’est le splendide spectacle qu’ils donnent de Béjaïa à 40 km au nord-ouest, au-delà du large golfe du même nom. La chaîne, qui s’étire sur 100 km des flancs sud de la vallée de la Soummam, à Jijel, se dresse en somme une haute barrière devant l’arrière-pays sétifien. La chaîne culmine au djebel Babor qui lui a donné son nom. A 35 km au nord de Sétif, il domine la région avec son sommet à 2.004 m d’altitude.
On est en plein, ce que les naturalistes, géologues, botanistes, zoologues et biogéographiques appellent la Kabylie des Babors, l’une des régions les plus arrosées du pays avec une richesse biologique exceptionnelle et une diversité paysagère à couper le souffle. On y rencontre des espèces d’arbres peu communs dans le pays comme l’if, l’aulne, les peupliers ou le merisier, mais c’est incontestablement le sapin de Numidie qui fait sa notoriété scientifique, car c’est le seul endroit au monde où on le trouve. Il doit encore sa célébrité internationale à la découverte, en 1975, d’une espèce d’oiseau unique et endémique à la région: la sittelle kabyle (Sitta ledantii).
Sanctuaire
Ce ne sont pas les seules espèces rares. La chaîne des Babors compte en effet 23 espèces végétales protégées, dont 8 sont endémiques, 94 espèces d’oiseaux, dont 32 protégées, dont 20 rapaces, 9 espèces d’insectes protégées, dont 2 endémiques, 15 espèces de mammifères protégées, notamment le singe magot (Macaca Sylvanus), le lérot, la mangouste et la belette. 10 espèces de reptiles, 88 invertébrés et une grande variété de champignons.
C’est avec le Parc national d’El Kala, un autre sanctuaire de la biodiversité méditerranéenne, avec ses paysages captivants, l’autre atout des Babors est ses cours d’eau avec des cascades qui drainent les bassins versant de Ighil Emda, Erraguène et Beni Haroun et approvisionnent et alimentent en eau plusieurs barrages, dont ceux de Kherrata (Béjaïa) et d’Erraguène (Jijel). Cette particularité des Babors n’a pas échappé aux conquérants et colonisateurs. Depuis les phéniciens en passant par les Romains et les Ottomans, on a rasé et exploité leurs forêts, notamment celles de cèdre et de chêne zéen pour la construction de vaisseaux de guerre.
La sapinière sommitale, elle, sauvée par l’altitude certainement, sera classée dès 1931 en Parc national. Le nouveau projet de Parc national a démarré en avril 2014. Les travaux scientifiques et les discussions avec les autorités et les populations locales ont abouti au bout de deux ans à proposer une aire protégée de 25.000 hectares. Elle s’étendra entre 900 et 2004 m d’altitude sur les massifs forestiers du Djebel Babor (2.004 m) et celui du Djebel Tababort (1.968 m), le deuxième plus haut sommet de la chaîne qui fait face au premier.
Le Parc national, qui portera le nom de ces deux sommets Babor et Tababort (nom kabyle pour bateau), englobera également des terres privées agricoles et pastorales avec des jardins familiaux, de montagnes abritant une grande diversité de plantes cultivées, dont probablement plusieurs variétés locales, et les alpages où se pratiquait il y a moins d’une décennie la transhumance. Des valeurs patrimoniales agraire et rurale particulières à cette région intégrées par l’approche participative adoptée par le projet.
Photo: Le futur parc sera une zone où seront développées des activités d’écotourisme et d’écodéveloppement
Slim Sadki
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Posté Le : 15/04/2017
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Photographié par : Photo: El Watan ; texte: Slim Sadki
Source : elwatan.com du vendredi 14 avril 2017