- Maître Mustapha Bouchachi: «Une option dépassée par les événements»
L’article 102 est dépassé par les événements. A mon sens il aurait fallu appliquer cet article de la Constitution il y a une année ou deux, parce que le président Bouteflika était à cette époque-là dans l’incapacité de gouverner. Aujourd’hui, il n’y a aucune logique à cette démarche. A quoi sert d’appliquer l’article 102 à quelques jours de la fin de mandat du Président sortant. Le mouvement populaire exige le départ de Bouteflika et ceux qui sont impliqués dans la gestion catastrophique du pays. L’article 102 s’inscrit en porte-à-faux des aspirations et revendications des citoyens qui sont dans la rue depuis le 22 février. Il faut respecter la volonté du peuple qui veut une transition dirigée par des hommes intègres.
- Djamel Zenati ancien député du FFS: «L’article 102 est loin de constituer la solution»
Dans son discours, le chef d’état-major semble se soucier du respect de la Constitution. Dans ce cas, pourquoi ne s’est-il pas opposé à la candidature de Bouteflika? Elle était pourtant doublement non conforme à la Constitution. Pourquoi n’a-t-il pas réagi à l’annulation de l’élection présidentielle? Elle était pourtant non conforme à la Constitution. Pourquoi a-t-il accepté la prolongation du mandat en cours du Président? Elle était pourtant non conforme à la Constitution. Cet attachement tardif au respect de la Constitution est pour le moins suspect. S’agissant de l’application de l’article 102, cette option est loin de constituer la solution, ni même un début de solution. Elle vise à emprisonner l’idéal populaire dans une procédure dont l’unique objet est de permettre au système de se régénérer. Il s’agit bel et bien d’un piège. Il consiste à sacrifier Bouteflika pour sauver tout le reste. Le peuple n’est plus dans l’épisode Bouteflika.
L’article 102 de la Constitution est en deçà, voire plus, en opposition à l’ambition du mouvement populaire. Le regard du peuple est désormais tourné vers l’avenir, un avenir des lumières. Provoquer de la déception dans cet immense espoir aura des conséquences désastreuses et incalculables sur le pays. Sur la légitimité des revendications du peuple, le chef d’état-major préconise une solution qui garantisse, selon lui, la satisfaction de toutes les revendications légitimes du peuple. Il devrait savoir que le peuple exige le départ du système et pas seulement le départ du Président.
La transition est un double processus qui consiste à mettre en place les fondements du nouveau système et déconstruire l’ancien. Ce n’est pas placer un pion à la place d’un autre. «Lazem yrouhou gaa», comme disait le jeune Algérois. Le renouvellement du compromis historique, exprimé avec éclat par les millions d’Algériennes et d’Algériens en mouvement depuis des semaines, ne peut se résumer à la mise en œuvre d’une disposition constitutionnelle. Faut-il encore préciser que l’institution dont c’est la vocation de mettre en œuvre cette disposition constitutionnelle s’est totalement discréditée en avalisant toutes les fraudes électorales et s’est définitivement disqualifiée en acceptant une candidature par procuration à la magistrature suprême. Soyez sages, soyons sages. L’Algérie mérite mieux. Elle mérite le meilleur.
- Abdesselam Ali Rachedi ancien ministre: «Pourquoi l’armée a soutenu le 5e mandat?»
Gaïd Salah n’a pas le droit de saisir le Conseil constitutionnel. Le plus simple serait qu’il oblige Bouteflika à «démissionner». Comment? Un peu à la manière dont Chadli «a été démissionné». Si Gaïd Salah appelle à appliquer l’article 102 pour cause de maladie, alors il doit expliquer pourquoi il a soutenu le 5e mandat pour Bouteflika, sachant que l’état de santé du Président sortant était à peu près le même qu’aujourd’hui. Sans compter la violation de la Constitution, y compris dans la procédure de dépôt de la candidature devant le Conseil constitutionnel. Ce dernier, non seulement n’a pas cherché à appliquer l’article 102, mais il a accepté la candidature par procuration de Bouteflika pour un 5e mandat, en violation du règlement du Conseil constitutionnel.
- Yacine Aïssaoui du RCD: «Coup d’Etat contre le peuple»
Gaïd Salah tente un coup d’Etat contre la volonté populaire. Cet homme est partie prenante de nos malheurs, il ne peut aucunement être la solution. Il ne s’agit plus pour eux de sauver le soldat Bouteflika, mais d’organiser le sauvetage du «régiment». Ils veulent une passation de consignes à l’intérieur du même système, nous exigeons une transition démocratique qui pose les fondations de l’Algérie nouvelle.
- Soufiane Djilali président de Jil Jadid: «Un gain, mais il ne faut pas baisser la garde»
L’application de l’article 102, telle que suggérée par le chef d’état-major et vice-ministre de la Défense, est une reconnaissance formelle qu’il y a vacance au sommet de l’Etat et cela met en porte-à-faux l’ensemble des officiels qui ont défendu bec et ongles le 5e mandat, puis une transition avec le président Bouteflika à sa tête. Maintenant, il s’agit là d’un premier gain pour les Algériens, mais il ne faut pas baisser la garde, il n’est pas acceptable d’appliquer une telle disposition avec Bensalah à la tête du Sénat. Nous demandons une transition gérée par des hommes de confiance, consensuelle pour tout le monde, pour aller vers une véritable élection.
- Abderrazak Makri président du MSP:«L’armée doit juste accompagner le processus»
Se limiter seulement à l’article 102 ne permettra pas la réalisation des réformes et de la transition démocratique ainsi que l’organisation d’élections transparentes. De ce fait, nous estimons qu’il est nécessaire que l’institution militaire se contente d’accompagner le processus en vue d’arriver à une solution politique et un consensus national afin de préserver le caractère républicain de l’Etat. Nous insistons aussi sur la nécessité de prendre des mesures supplémentaires pour satisfaire les revendications du peuple dans le cas où l’article 102 est appliqué. Il faut aussi prendre en considération les propositions de l’opposition avant la déclaration de la vacance du poste du président de la République: désignation d’un chef de gouvernement et son staff après acceptation de l’opposition et du mouvement populaire; institution de l’instance indépendante d’organisation des élections et révision de la loi électorale; la promulgation rapide des décrets libérant l’activité politique et consacrant la liberté de la justice ainsi que la protection des richesses du pays.
Nous appelons aussi à la poursuite de la mobilisation populaire pacifique jusqu’à la satisfaction des revendications du peuple.
- Zoubida Assoul présidente du parti UPC: «Nous rejetons dans le fond et la forme cette option»
Ce n’est pas dans les prérogatives du chef d’état-major et vice-ministre de la Défense de faire de la politique, il ne doit pas intervenir dans les décisions politiques, d’autant plus qu’il n’a plus le portefeuille de la Défense, mais uniquement la casquette de l’institution militaire. Pour ce qui est de l’article 102, il est devenu aujourd’hui caduque. Gaïd Salah aurait dû, s’il se souciait réellement du devenir de l’Algérie, proposer l’application de cet article en 2008 et en 2013 et surtout lorsque nous avons adressé une lettre au Président lui demandant de renoncer à briguer un autre mandat. Quelle est la lecture politique à faire de l’article 102 qui est composé de deux alinéas, l’un portant sur la maladie et l’autre sur la démission. Le chef d’état-major parle, à mon avis, de la démission du président Bouteflika et, dans ce cas-là, le Conseil constitutionnel ainsi que le Parlement doivent se réunir pour constater la vacance, mais le Parlement dirigé par un président qui est le fruit d’un putsch n’est pas crédible, il n’a pas de légitimité populaire. La proposition de Gaïd Salah est faite pour sauver le système dès lors que c’est Bensalah qui prendra le relais. Nous rejetons dans le fond et la forme cette option.
- Ahmed Adimi de Talaie El Hourriyet: «Un leurre»
Si l’on va vers l’application de l’article 102 et avec comme deuxième personnage de l’Etat Abdelkader Bensalah, qui aura bien évidemment la mission de gérer la période de transition, c’est un leurre. C’est comme si nous n’avions rien fait. La solution la plus appropriée, dans ce cas de figure, est la démission de Bensalah de son poste et la désignation d’une personnalité politique indépendante au tiers présidentiel. Par respect des apparences, cette personnalité qui remplacera Bensalah va gérer la période de transition. Il faut par la suite mettre en place un gouvernement de compétences neutres pour aller vers des élections transparentes.
Nabila Amir
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Posté Le : 27/03/2019
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Ecrit par : Nabila Amir
Source : elwatan.com du mercredi 27 mars 2019