Algérie

«Algérie Poste», ou la résistance au changement


Périodiquement, «Algérie Poste» est confrontée à des pannes informatiques dans son réseau de distribution monétaire. L'entreprise est également confrontée à des «pénuries» de liquidités. Colère et étonnement de millions de clients titulaires uniquement de comptes courants postaux qui ne comprennent pas qu'une institution de cette taille ne parvienne pas à régler ce type de problèmes.

Avec près de 12 millions de clients disposant de comptes courants postaux (ccp) et dont l'ensemble des dépôts tourne autour de 500 milliards de dinars, Algérie Poste est considérée comme «le plus grand établissement financier du pays». Sous la direction générale de Melle Houadria Ghania, l'entreprise s'était engagée dans une réforme dont un des volets principaux était l'introduction du paiement électronique. «L'objectif est d'arriver à ce que le client fasse des paiements en ligne», déclarait début 2007 la directrice générale. Elle annonçait également qu'Algérie Poste était engagée «avec des bureaux spécialisés…pour préparer le grand projet à savoir, devenir une banque postale». Selon elle, cet objectif devait être atteint en 2009. Elle n'a pas achevé l'année 2008 à la tête d'Algérie Poste où elle était depuis 2003.

Réformes

Cette dame, qui fut élue en 2004 manager de l'année par la convention France Maghreb, a eu une montagne de difficultés pour faire accepter à son propre staff (issu généralement de promotion interne) le processus des réformes dont l'introduction de la carte de paiement électronique. Elle s'était vue contrainte de recourir à quelques recrutements extérieurs pour l'assister dans ses tâches. Sans pouvoir vraiment faire progresser la réalisation du programme qui lui était assigné, ce qui, selon des sources concordantes l'a amené à présenter sa démission.

 Cet épisode significatif n'a pas empêché le processus du changement d'être mené, à des rythmes variables, à travers le réseau des 3 350 bureaux postaux et au sein des 28 000 salariés.

Aujourd'hui, Omari Bouteldja est aux commandes. Il a succédé à Mohamed Hammadi, décédé le 9 janvier dernier. M. Omari a occupé, notamment, le poste de directeur du projet de la division monétique et services financiers postaux. Durant sa carrière au sein de l'entreprise, il avait également eu en charge plusieurs projets structurants de l'entreprise, notamment la participation d'Algérie Poste à la mise en place du système national de télé-compensation, ainsi que le lancement du système monétique d'Algérie.

900.000 transactions par jour

A Algérie Poste, on estime qu'il y a 900.000 transactions par jour, ce qui représenterait une circulation de fonds de plusieurs milliers de milliards de dinars par année. Bien que, selon une estimation datant de mars dernier, les opérations de retrait électronique soient passées de 300.000 à 3 millions d'opérations effectuées par mois, les usagers demeurent réticents vis-à-vis de ce mode de paiement. On estimait alors que sur les 6 millions de cartes fabriquées, 200.000 n'ont jamais été retirées par leurs propriétaires alors que parmi les 5,8 millions détenteurs de cartes, seuls 3,5 millions les ont utilisées au moins une fois.

 Les pannes informatiques fréquentes et les pénuries à répétition de liquidités, tous ces faits concrets, donnent relativement raison à ces «résistants». Pour de nombreux clients et observateurs, ces deux explications fournies à chaque blocage des paiements sont inadmissibles. «Les systèmes de secours en informatique sont faciles à mettre en place. Sinon, comment feraient les établissements financiers dans le monde dont la majorité utilise le réseau Internet dans leurs transactions», s'interroge et souligne un ingénieur en informatique. Et s'il y a quelque incompatibilité entre systèmes, cela se règle aussi, précise-t-il. Quant au problème des liquidités qui se pose depuis environ cinq années (!!!), il paraît complètement aberrant. En 2007, Algérie Poste proposait de mettre à la disposition de la Banque centrale ses véhicules sécurisés spécialisés pour convoyer les fonds. Cette proposition était jugée insuffisante. De son côté, la Banque d'Algérie a régulièrement dégagé sa responsabilité. Mais, ces liquidités sont bien quelque part ? Pour des financiers, le stock de la monnaie fiduciaire dans le circuit dit informel dépasse 1 000 milliards de dinars.

La banque, une issue

Il faut dire que ce n'est pas la piètre qualité du fonctionnement actuel d'Algérie Poste qui attirera cette masse d'argent dans ses comptes courants. Au début de la réforme du secteur, il était donc question qu'Algérie Poste devienne une banque postale. Aujourd'hui, on n'en parle plus. Algérie Poste semble branchée sur d'autres priorités. Il y a plus d'une année, l'entreprise était liée par un «contrat de performance» pour «maintenir ouverts les 1.700 bureaux de poste déficitaires au niveau des zones rurales et pour stabiliser les populations en sachant que 50% des établissements postaux sont implantés dans ces milieux ruraux ainsi que pour aider à la réouverture de 107 autres fermés durant les années difficiles de la tragédie nationale». En même temps, il est prévu que 200 nouveaux bureaux de poste soient créés pour accompagner les programmes de logements en cours. Il y aura forcément davantage de comptes courants postaux (ccp). Seront-ils plus accessibles à leurs titulaires ? Il faut savoir que tous les salariés ne sont pas tenus d'avoir un compte courant postal. Ceux dont les fonds proviennent du Trésor public, tels que les étudiants, les pensionnés et des fonctionnaires y sont astreints. De ce fait, ils subissent les aléas du dysfonctionnement périodique d'Algérie Poste. Mais, de nombreux salariés – quelques millions - réussissent à les éviter. Leur employeur verse leurs salaires dans des comptes bancaires, généralement auprès de l'établissement financier ou l'employeur dispose d'un compte. Comme quoi, le «ccp» n'est pas incontournable. Et dans le paysage bancaire, il y a le choix.


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