Algérie

Algérie - Octobre 1988, 28 ans après: Une régression, une démobilisation et des acquis confisqués



Algérie - Octobre 1988, 28 ans après: Une régression, une démobilisation et des acquis confisqués




Le 5 Octobre 1988, une date qui restera gravée dans la mémoire des Algériens. Les événements tragiques qui ont secoué le pays durant ce mois ont permis de libérer la parole et ouvert la voie au pluralisme, au multipartisme pour la construction d’un Etat de droit, de liberté et de justice sociale.

28 ans après, que reste-t-il de cette date historique et surtout des acquis arrachés dans la douleur par le sacrifice de milliers d’Algériens ?

Presque rien !

C’est du moins le triste constat fait, hier, par les participants à la rencontre organisée par l’association RAJ et intitulée «Les libertés démocratiques 28 ans après octobre 88».

Maître Nourredine Benissad, président de la Ligue algérienne des droits de l’homme (LADDH) et Messaoud Boudiba, syndicaliste et porte-parole du Conseil national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (Cnapest), ont mis en exergue, lors de leurs interventions, le recul des libertés et la régression constatée à tous les niveaux, à commencer par le verrouillage du champ d’expression et, par conséquent, l’absence de dialogue et de débat.

«En verrouillant les espaces d’expression, en empêchant les marches et les manifestations pacifiques, le pouvoir pousse les citoyens à recourir à la violence», tranche Me Benissad qui notera que les réformes en trompe-l’œil engagées par l’Etat ne sont pas faites pour améliorer le climat politique et social, mais beaucoup plus pour réprimer toutes les voix porteuses de changement.

Il citera au passage la loi sur les associations et celle relative au régime électoral…

«La loi sur les associations est un cas édifiant, tous les abus constatés dans la loi 90.04 régissant le mouvement associatif et dénoncés par les concernés ont été légalisés dans la nouvelle loi. Une loi vidée de l’ensemble des principes constitutionnels et conventionnels signés par l’Algérie», note Me Benissad qui rappelle que l’Etat élabore, la plupart du temps, des lois standard qui sont en adéquation avec les normes internationales mais, dans la réalité, elles demeurent inappliquées.

Ce défenseur des droits de l’homme ne manquera pas de commenter la dernière création du pouvoir, notamment le Conseil national des droits de l’homme. Pour le conférencier, le pouvoir s’est approprié les revendications des défenseurs des droits de l’homme avant de les vider de leur substance et de les exploiter par la suite pour mettre sur pied le Conseil national des droits de l’homme.

Des réformes en trompe-l’œil

Aujourd’hui, selon Me Benissad, le pouvoir est en position de force parce que la société civile est dans une position de faiblesse, il invite dans ce sens les politologues et sociologues à se pencher sur cette question. Ce constat amer est souligné par les participants.

En évoquant la lutte et le combat menés dans les années 2000 par les syndicats autonomes, M. Boudiba regrette le relâchement et la démobilisation qui caractérisent notre société aujourd’hui.

«Nous avons cassé un tabou et créé une nouvelle dynamique dans notre pays. Les enseignants ont défié le pouvoir. Nous avons observé des grèves et arraché des acquis. Mais aujourd’hui le pouvoir a tenté de casser cet élan et il a réussi à un degré près», déplore M. Boudiba qui ne comprend pas le silence de la classe politique avec toute sa composante face aux dérives du pouvoir.

«Nous avons plus de 80.000 associations, une soixantaine de partis politiques et plus de 80 syndicats, qu’est-ce que ces entités ont fait pour riposter aux lois liberticides, aux restrictions des activités syndicales et au droit de manifester pacifiquement?

Comment en sommes-nous arrivés là ?» s’est interrogé M. Boudiba.

Tout le monde parle, explique-t-il, d’un délitement des institutions qui a atteint des niveaux alarmants et un risque d’une explosion sociale, mais personne ne fait rien!

Pour les participants, l’incursion de l’argent dans le culturel, notamment l’argent de la corruption, le vol, la rapine... a eu des conséquences sur la société.

El Kadi Ihsane, journaliste, a affiché un optimisme quant à une ouverture qui permettra de mettre fin au statu quo. Un statu quo qui, pour l’heure, arrange beaucoup de monde.


De son côté, Cherifa Kheddar a, présenté dans le domaine de la lutte contre les inégalités et contre les violences faites aux femmes, les mécanismes et outils permettant aux citoyens de faire appel lorsque le jugement rendu n’est pas conforme aux conventions internationales.


Photo: Scènes de violence lors des événements du 5 Octobre 1988

Nabila Amir







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