Grèves, sit-in de protestation se
multiplient en Algérie.
Les étudiants, les gardes communaux, les
médecins, les cheminots, les enseignants contractuels et… les comptables sont
montés au créneau et ont obtenu, pour la plupart, gain de cause. Pour éviter la
jonction avec les revendications politiques, les autorités lâchent du lest. Les
corporations ont saisi l'opportunité.
Les mouvements sociaux s'intensifient.
L'Etat algérien a, face aux émeutes de la jeunesse de début janvier dernier et
à la montée de la révolution démocratique chez les voisins arabes, fait le
choix de multiplier les signaux d'ouverture… sociale. Les vannes ont été
ouvertes aux chômeurs désireux de monter leurs propres entreprises. Les banques
publiques, jusqu'ici exagérément réticentes et intraitables, ont été sommées de
financer les projets des jeunes promoteurs dans le cadre des dispositifs Ansej
et Cnac. Dans la même logique, le gouvernement a été contraint de faire des
concessions stratégiques au profit des barons de l'informel. L'obligation de
l'usage du chèque est tout simplement abandonnée et le commerce de trottoir est
plus que jamais autorisé. Quitte à faire râler les commerçants légaux qui
dénoncent, à travers l'UGCAA, un recul de l'Etat. Il est vrai que ce
renoncement au nom du souci d'éviter de «déstabiliser le pays» agit comme un
incitateur. A Oran, depuis l'annonce officielle de la trêve après les émeutes
de janvier, le nombre des commerçants informels aurait augmenté de 20%, selon
l'union des commerçants. La tendance est partout la même. La «trêve» encourage
les vocations. Dans un récent entretien accordé à Maghreb Emergent, le patron
de Cevital, Issad Rebrab, estimait que le recul de l'Etat sur l'informel ne se
justifiait.. «Nous sommes très proches des distributeurs et je peux vous
assurer qu'ils étaient prêts à revenir dans le formel pour peu qu'on leur
garantissent une certaine marge bénéficiaire et que l'Etat ferme les yeux sur
leurs passifs avec l'administration fiscale. Aujourd'hui, les grossistes et les
détaillants sont toujours prêts à revenir au formel à condition qu'ils aient
des garanties».
Les urgences ont changé
Visiblement, les urgences ne sont plus
les mêmes pour le gouvernement qui fait d'ailleurs la sourde oreille aux
critiques des entrepreneurs au sujet de sa «nouvelle» politique. Le
gouvernement gère les «nuisances». Le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, invité
d'un talk show à la télévision nationale mercredi dernier, estime que les
barons de l'informel ont été derrière les émeutes de janvier. Du moins à «60%».
Conséquence pratique, le gouvernement décide de reculer et de ne pas mener de
«guerre frontale». Depuis cette «trêve» décrétée par l'Etat, 400.000 nouveaux
commerçants informels de plus sont venus s'ajouter aux 600.000 existants, selon
l'UGCAA. A telle enseigne que l'on assiste à une «migration» des commerçants
qui ferment boutique, suspendent registre et se mettent au… trottoir.
L'attitude du gouvernement sur l'informel a sonné comme un aveu de faiblesse
face à une sphère qui contrôle de 20 % à 30 % des circuits économiques du pays.
Le message a été bien perçu. Il a donné le top départ pour une montée des
revendications catégorielles pour de nombreuses corporations, y compris ceux
réputés dociles. Si ces concessions ont un prix, socialement utile, en dinars
pour le Trésor public, elles permettent d'éviter la jonction entre le social et
le politique. Le gouvernement est engagé dans une course, dépensière, en raison
de ses hésitations dans le domaine politique. En face, les corporations et
aussi les demandeurs de logements jouent avec lui une partie qui peut s'appeler
: «donne ou je fais de la politique». La partie peut durer… longtemps tant les
demandes sociales sont fortes et les craintes politiques du gouvernement
démesurée.
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Posté Le : 05/04/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Oussama Nadjib
Source : www.lequotidien-oran.com