ALGERIE : La loi sur l’information adoptée. '' Une Liberté enchainée ''

VOTE DE LA LOI ORGANIQUE RELATIVE À L’INFORMATION

La presse n’a pas eu sa liberté



La boucle est bouclée. Le pouvoir, grâce à la majorité parlementaire constituée, désormais, par le seul binôme FLN-RND, est parvenu, sans coup férir, à valider la série de textes de loi intégrant les réformes politiques promises en avril dernier. Hasard du calendrier ou programmation délibérée, c’est le projet de loi organique relative à l’information, voté hier sans surprise, qui a clos la série.

Sofiane Aït Iflis - Alger (Le Soir) - Les journalistes ont eu beau tenter, dans un ultime rassemblement devant l’hémicycle, d’alerter sur les contraintes que cette loi imposera à l’exercice de la profession. En vain. Les députés du FLN et du RND, qui, depuis l’amorce de ce cycle de validation de ces textes de loi, ont fait cause commune, ont choisi de ne pas les entendre. Disposant à eux deux d’une majorité parlementaire confortable, le FLN et le RND ont veillé à ce que les copies élaborées par l’exécutif ne subissent pas des retouches qui altéreraient leurs substances. Et ce n’est pas un MSP devenu subitement frondeur, encore moins Ennahda s’efforçant à une certaine orthodoxie dans l’exercice parlementaire, qui allait obturer cette marche inexorable vers l’étouffement des libertés. Il en est de même de l’effort d’abstention tendant à devenir coutumier dans lequel se plaît le PT. Le projet de loi organique relative à l’information a été voté à la grande satisfaction du ministre de la Communication, Nacer Mehal, qui a eu raison de prédire, il y a une semaine, que la substance du texte ne sera pas altérée par les amendements proposés et retenus par la commission culture, communication et tourisme de l’APN. Cette dernière n’en a pas, en effet, retenu quelques sensibles et déterminants amendements. Elle s’est limitée, lorsqu’il lui est arrivé d’être de bonne volonté, à accepter des triturations de forme. Une désillusion de plus pour la presse qui, par moments, s’est laissée aller à croire qu’avec les réformes promises au printemps dernier par le chef de l’Etat, elle allait jouir de plus de libertés. Le projet de loi, voté hier, plutôt que de consacrer les ouvertures attendues en matière de liberté de la presse, ne véhicule, en vérité, que quelques actualisations de concepts, tout en appliquant un vernissage nouveau au billot gardé, lui, dressé. La supercherie première a été dans la dépénalisation-qui n’en est pas vraiment une promue à outrance, laquelle a eu pour, entre autres, conséquences, d’éroder la mobilisation qui aurait prétendu à faire barrage à ce qui a suivi comme loi liberticide. Le projet de loi organique relative à l’information, qui chemine droit vers le statut de loi, étant donné sa validation hier par l’APN, prévoit, il est vrai, de transférer des prérogatives jusque-là l’apanage de l’administration et des pouvoirs publics vers des instances paritaires, comme pour la délivrance des agréments et la carte de presse. Mais en même temps, ces instances, entre autres l’autorité de régulation, disposent de la compétence d’exercer un contrôle sur les activités et la vie interne des journaux. Le législateur a beau préciser que les informations récoltées ne peuvent faire l’objet d’un autre usage. Mais qui sait ? Par ailleurs, le texte reconduit quasiment tous les concepts flous et imprécis qui sont soustraits à l’investigation journalistique. Il y adjoint même l’atteinte à l’histoire nationale. Il propose aussi de codifier les règles éthiques et déontologiques qui, universellement, relèvent de l’autorégulation. S’agissant de l’ouverture de l’audiovisuel, le texte de loi établit juste l’énoncé du principe. Le ministre de la Communication, abordé par la presse au sortir de la plénière d’hier, a fait savoir que les lois relatives à l’audiovisuel, au sondage et à la publicité seront élaborées ultérieurement. Il a annoncé, en revanche, que le statut spécifique du journaliste promulgué par décret en 2008 va être repris dès la semaine prochaine pour son enrichissement.

S.A.I