Algérie

Algérie - Kaddour Gherbi, Président de la Fédération Algérienne des Donneurs de Sang, à El Moudjahid: «Améliorer l’accueil des centres de transfusion pour fidéliser les donneurs»



Algérie - Kaddour Gherbi, Président de la Fédération Algérienne des Donneurs de Sang, à El Moudjahid: «Améliorer l’accueil des centres de transfusion pour fidéliser les donneurs»


Entretien réalisé par Samia D.

- El Moudjahid: Le don du sang fait partie des gestes qui paraissent, à première vue, anodins, pourtant il est établi qu'une goutte peut sauver une vie. Les Algériens sont-ils aujourd'hui, conscients de l'importance du geste?

M. Kaddour Gherbi: Le citoyen n'est pas assez sensibilisé malgré les efforts de la fédération et les appels incessants, à travers les médias nationaux. Certes, nos appels ont des échos, mais pas celui que nous attendions. Nous nous attendions plus des Algériens. Le don de sang doit être une culture et une tradition chez le citoyen, appelé à affronter des situations difficiles et complexes, donc, sauver des personnes en danger de mort. Aujourd'hui, on retrouve même des enfants en bas âge atteints de plusieurs pathologies alors que leurs frêles corps ne fabriquent pas assez de globules rouges. Nous sommes obligés de procéder à la perfusion périodique pour leur éviter la mort. Malheureusement, l'indisponibilité du sang complique les choses. Le même problème se pose au niveau des maternités où des femmes en couche font des hémorragies sévères qui met en péril leur vie ainsi que celle de leurs bébés. A ces populations, s'ajoutent les victimes de l'hécatombe routière et des accidents domestiques dont les bilans sont lourds chaque jour. Pour cela, nous lançons un appel à la population âgée de 18 à 65 ans pour se rapprocher des établissements hospitaliers ou les clinomobiles et offrir leur sang, voire cette lueur d'espoir au patient. C'est la meilleure aumône qu'on peut donner à un patient drapé dans son lit d'hôpital. Pour les hommes, ils peuvent faire jusqu'à 4 dons par an. Les femmes, quant à elles peuvent effectuer trois prélèvements. Le citoyen doit savoir que le geste est sécurisé, le matériel utilisé est stérilisé et est à usage unique. Donc, il n'existe aucun danger ou risque. Le donneur du sang à cette chance de sauver des vies sans distinction de races, de religions, ni de pays. En plus, il a droit à un bilan sérologique gratuit, une carte de groupage et bien sûr, une récompense divine. Nous comptons beaucoup sur la générosité des Algériens pour répondre massivement à notre appel.

- Avez-vous noté un changement de comportements du citoyen par rapport aux années passées?

La Fédération Algérienne des Donneurs de Sang que nous représentons, créée en 1976, enregistre un changement des mentalités concernant le don du sang. Chaque fois que nous lançons des appels, la population répond pour adhérer à notre cause. Il faut que le don du sang fasse partie des gestes systématiques, gravés dans les esprits. La raison est simple: personne n'est à l'abri d'une maladie. Le donneur d'aujourd'hui, peut devenir le receveur de demain. Nous avons constaté que la COVID-19, notamment cette année, a bel et bien changé les mœurs des Algériens, notamment avec l'appel de certains médias pour éviter au maximum les hôpitaux, d'autant plus que les centres de transfusion sanguine se trouvent à l'intérieur de ces derniers. Les gens, suite à ces mises en garde, ont peur d'être contaminés. Aussi, nous nous adressons à Monsieur le ministre de la Santé pour délocaliser les CTS, loin des hôpitaux. Il s'agit de faciliter l'accès des donneurs à ces centres, d'autant plus que les donneurs se déplacent par véhicule aux hôpitaux et avec ma pandémie, il est demandé à ces derniers de stationner, ailleurs et revenir, par la suite pour effectuer le don du sang. La plupart du temps, il ne trouvent pas où garer, ils repartent sans effectuer le don de leur sang. Nous demandons également que les CTS soient ouverts à toute heure. Actuellement, des donneurs se présentent aux centres de transfusion sanguine à 7h du matin ou après les horaires du travail, malheureusement, à ces heures-là, les centres sont hors service. Nous demandons par la même occasion l'amélioration de l'accueil du donneur de sang. Il doit être accueilli avec tous les honneurs d'autant plus qu'il fait don d'un produit qui ne peut ni être fabriqué, ni acheté, ni stocké longtemps. Bien entendu, nous demandons aussi, l’amélioration de la collation donnée aux donneurs après les prélèvements. Nous avons 33 associations de wilaya qui veillent à élargir la base des donneurs de sang, à leur niveau et ce, à travers la sensibilisation de la population et l'alimentation des centres de transfusion sanguine. Aujourd'hui, nos moyens n'arrivent même pas à couvrir nos dépenses, pourtant cela ne nous empêchent pas pour autant d'accomplir notre noble mission pour sauver des vies. Le don de sang ne devrait pas être du seul ressort des associations mais de tout le monde, appelé à se joindre aux efforts consentis par la Fédération Algérienne de Donneurs de Sang. Aussi, nous sollicitons les sponsors pour jouer un rôle dans la promotion des dons de sang.

- Les établissements de santé ne cessent de parler du manque de pochettes de sang avec la réticence de beaucoup à passer la cap de la peur quand il s'agit d'effectuer ce geste. Que préconisez-vous comme solutions pour aller vers des comportements qui prônent un don pas comme les autres sachant que donner son sang, c'est carrément offrir la vie?

La qualité de l'accueil des donneurs de sang est un pas décisif pour inciter les donneurs et même fidéliser les prélèvements. Nous interpellons Monsieur le ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière pour investir davantage dans les associations humanitaires afin de leur permettre de s'organiser au mieux pour aider les malades. Notre organisation est membre de la Fédération internationale des donneurs de sang qui a vu le jour en 1980 et le SG de celle-ci est un Algérien, à savoir le Dr. Abdelmalek Sayeh qui est également, vice-président de la Fédération algérienne des donneurs de sang. C'est un honneur pour notre pays et l'Afrique d'avoir un représentant de haut niveau, comme le Dr Sayeh, à la tête d'une organisation internationale. Cette percée et cette présence au niveau de la Fédération internationale, ne nous rend pas service puisque nous n'arrivons pas, faute de moyens, à assister aux réunions de la Fédération au moment où tous les pays ne ratent pas ce genre de rendez-vous. Résultat: notre emblème national est absent sur la scène internationale, contrairement à d'autres pays.

- Vous avez dit récemment que l'Algérie est leader en matière de don du sang en Afrique et dans le Maghreb arabe. Quelles sont les recommandations de la Fédération Algérienne des Donneurs de Sang pour se maintenir au même niveau?

Notre programme met en exergue la sensibilisation. Nous continuons à œuvrer pour l'amélioration des moyens matériels des associations de wilaya pour avoir un maximum de donneurs de sang. Les membres de la Fédération sont tous des volontaires qui vivent de leurs pensions de retraite, nous sommes peinés quand des familles de malades nous sollicitent pour ramener des donneurs, sans pouvoir répondre à leur cris de détresse avec les volontaires qui n'arrivent pas à faire des prélèvements pour la simple et unique raison que les CTS, après une certaine heure sont fermés. C'est pourquoi, nous revendiquons la création d'une cellule de prélèvements de sang, en dehors des horaires d'ouverture des centres de transfusion sanguine.



Photo: Kaddour Gherbi, Président de la Fédération Algérienne des Donneurs de Sang

S. D.


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