Algérie - Energie

Algérie: Guerbès-Sanhadja, le nouveau crime... écologique de Sonatrach?



Algérie: Guerbès-Sanhadja, le nouveau crime... écologique de Sonatrach?




Décidément Sonatrach continue à faire parler d'elle. Après la divulgation de multiples scandales qui touchent à ses cadres, voilà que la compagnie pétrolière nationale décide de s'offrir une nouvelle zone pétrochimique à Skikda. Une extension aux 1.200 ha déjà existants et qui seraient saturée depuis quelques années. Une annonce faite par le P-dg de la compagnie lui-même aux cadres locaux de la deuxième zone pétrochimique du pays au cours de sa visite.

Cette annonce, publiée par un certain nombre de correspondants de quotidiens nationaux au lendemain de cette visite, aurait été une bonne nouvelle si Sonatrach n'avait pas fait le mauvais choix du site. Et pour cause! Sonatrach veut construire son nouveau pôle pétrochimique sur un site naturel protégé. Les 600 ha que veut s'offrir la 10e plus grande compagnie pétrolière du monde sont situés à Guerbès. Une commune qui abrite le fameux complexe de 14 zones humides. Guerbès-Sanhadja, un site protégé depuis février 2002 par la convention internationale de protection des zones humides Ramsar, que l'Algérie a déjà ratifiée.

La zone humide de Guerbès-Sanhadja s'étend sur la partie est du littoral de la wilaya de Skikda, le massif côtier de Chétaïbi et la partie interne de la plaine alluviale au sud. Une zone de 42.000 ha comportant trois bassins. Constituée d'écosystèmes rares et riches en espèces biologiques, le site revêt une valeur particulière, notamment pour sa flore remarquable. Il est le site le plus exceptionnel après le Lac Tonga d'El Kala. Cette zone bénéficie d'un projet d'urgence de protection et de développement financé par le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud) et le Fonds mondial de la nature, World Wild Fondation (WWF), avec une contribution de l'Etat algérien. Ce même Etat qui s'apprête, aujourd'hui, à commettre un carnage écologique au nom du développement socio-économique.

Les responsables algériens, qui souffrent visiblement d'une schizophrénie aiguë, ne cessent de faire une déclaration et son contraire. On n'arrête pas d'affirmer que l'Etat veut diversifier l'économie nationale et sortir de la dépendance pétrolière et pourtant leurs actes prouvent totalement le contraire. Après avoir sacrifié un des plus beaux parcs naturels au monde, le parc national naturel d'El Kala, en faisant passer le tracé de l'autoroute Est-Ouest au beau milieu de cette réserve naturelle exceptionnelle mondiale, voilà que la firme numéro un du pays décide, de son côté, de sacrifier un petit paradis naturel pour l'extension d'un pôle pétrochimique.

Le pays n'est-il pas assez vaste pour trouver un site sur cette même côte skikdie aguichante qui ne souffrirait pas écologiquement de l'implantation de l'«indispensable» extension? N'y a-t-il pas meilleur choix que Guerbès-Sanhadja? Cette décision est-elle réfléchie? Ceux qui décident pour Sonatrach ne semblent nullement se soucier de l'avenir des nouvelles générations. Sinon comment expliquer ce mépris pour la préservation des grands équilibres naturels du pays?

Après avoir perdu la bataille du parc national naturel d'El Kala, les écologistes algériens s'apprêtent à avaler une autre amère défaite. Celle du réalisme conjoncturel contre le développement durable. Le profit du moment hypothèquera une nouvelle fois l'avenir des générations. Au moment où l'on cherche à diversifier l'économie nationale, on se prive des alternatives sérieuses que peut constituer le développement de ce genre de site. Sonatrach, qui affirme que le pôle pétrochimie n'altérera aucunement ce fragile écosystème, sait pertinemment que l'industrie pétrolière est l'une des plus polluantes si ce n'est la plus polluante. L'altération de l'eau, l'air mais aussi du sol est quasi certaine. Faut-il pour autant baisser les bras? Certainement pas. Il n'existe pas de causes perdues mais tout simplement des causes pour lesquelles il faut se battre.

Par Ghada Hamrouche



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