Algérie

Algérie-France : place au pragmatisme '




Les milieux d'affaires français voient en l'Algérie un pays qui manque de lisibilité dans sa politique économique. Ils se disent, pour la plupart, déroutés par les dispositions de la loi de finances complémentaire et considèrent l'Algérie, selon les termes de l'ambassadeur français dans une récente intervention médiatique,  comme «un pays compliqué».  De leur côté, les Algériens ont eu trop longtemps les yeux rivés sur la France, lui ouvrant grand les portes de son marché intérieur et la désillusion a été aussi grande que les investissements français semblaient minces. La blessure est d'autant plus douloureuse que les hommes d'affaires français n'hésitaient pas à  s'installer au Maroc et en Tunisie. Se sentant, sans doute, trahi, le gouvernement algérien a tourné son attention vers les courtisans du marché algérien, nombreux dès que les premiers frémissements des prix du pétrole se sont fait sentir. La France a peut-être gardé sa place de premier fournisseur de l'Algérie, mais elle est vite rattrapée par  la Chine et certains pays du Moyen-Orient. Réalisant que le temps du «partenariat d'exception» tire à  sa fin, les hommes d'affaires français craignent que leurs parts de produits commercialisés dans notre pays se rétrécissent en faveur de la concurrence chinoise et turque.
En  dépit des plaintes geignardes des patrons français, l'année en cours a été plutôt fructueuse : une dizaine de projets de partenariat ont été finalisés. Le complexe pétrochimique de Total – dont les discussions traînent depuis 2007 – devrait bientôt voir le jour, de même qu'une usine de verre de Saint Gobain.
Les entreprises publiques Ferrovial et Métro d'Alger (EMA) viennent de signer avec le groupe industriel Alstom un accord de partenariat portant création d'une société mixte détenue à  49% par Alstom et à  51% par l'Etat algérien (41% via Ferrovial et 10% via EMA), spécialisée dans l'assemblage et la maintenance de tramways. L'usine d'assemblage sera basée à  Annaba et opérationnelle à  partir de 2013. La société Cristal Union a signé un accord de partenariat avec le groupe La Belle pour la construction d'une raffinerie de sucre en Algérie. Le groupe Sanofi Aventis  envisage de mettre sur pied un complexe de production de médicaments génériques dont le montant avoisine les 100 millions d'euros. L'objectif pour Sonafi Aventis est de produire localement plus de 80% des médicaments qu'il commercialise en Algérie (contre 30% aujourd'hui), avec sa plus grosse usine du continent africain. Parmi les dossiers irrésolus figurent notamment de probables négociations pour la construction d'une usine de montage Renault en Algérie ainsi que les discussions autour des projets des cimenteries Lafarge en Algérie. Le flop de l'année concerne la société Keolis, contrainte de se retirer du projet de gestion du tramway d'Alger en raison d'un quiproquo autour de la loi de finances complémentaire. La proposition émanant de Renault Trucks pour conclure pour un partenariat avec la SNVI est gelée depuis  plus de trois ans.  Au total, 430 entreprises françaises présentes en Algérie dont dépendent 35 000 emplois directs et 100 000 indirects, soit, glissent les responsables de  l'ambassade de France, «2,5 fois plus qu'il y a quatre ans». La France détient plus de 16% de parts de marché en Algérie et se maintient en tête des investissements hors hydrocarbures. Les services de l'ambassade de France à  Alger tiennent à  préciser que «l'Algérie est, pour la France, un partenaire commercial de premier plan : c'est son troisième marché hors OCDE derrière la Chine et la Russie, mais le premier en Afrique, largement devant l'Afrique du Sud, le Maroc ou le Nigeria». «L'Algérie a été, en 2009, le 12e client de la France, gagnant deux places sur 2008 (14e) et son 18e fournisseur, après une chute à  la 26e place en 2008. Mais le gaz algérien représente près de 15% des approvisionnements français à  l'étranger, à  la troisième place derrière la Russie et la Norvège», nous dit-on. Le fait est, cependant, que les malentendus et les vieilles rancunes sont tenaces. Les Algériens soupçonnent les Français de vouloir profiter du pays – à  cause de leur fâcheuse tendance à  considérer l'Algérie comme un vaste marché  pour écouler leur marchandise. Les Français, eux, ne se sentent pas les bienvenus et s'inquiètent du refroidissement des relations politiques entre les deux capitales.
La visite de Jean-Pierre Raffarin viserait ainsi à  remettre les relations algéro-françaises sur les rails. Le ton avait été donné lorsque la ministre française des Affaires étrangères, Michèle Alliot-Marie, en visite à  Alger les 17 et 18 octobre dernier, recommandait de mettre de côté les querelles autour de l'histoire au nom du pragmatisme économique. «Il ne faut pas nier les choses, mais simplement établir les priorités, à  savoir faire face aux enjeux économiques», soulignait-elle. Les relations entre l'Algérie et la France, qu'on a trop tendance à  comparer aux rapports tumultueux d'un amour passionnel, reprendraient, promet-on, le chemin de la raison et du pragmatisme.


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