Algérie

Algérie - Fodil Boumala retrouve la liberté: «La révolution blanche ne s’arrêtera pas»



Algérie - Fodil Boumala retrouve la liberté: «La révolution blanche ne s’arrêtera pas»


Il n’a rien perdu de sa fougue. L’épreuve carcérale n’a en rien entamé sa détermination. Il ressort de prison avec plus d’engagement et de ferveur.

Quand les lourdes portes du pénitencier d’El Harrach se sont refermées hier derrière lui, Fodil Boumala a vite dégainé. «Notre révolution populaire blanche ne s’arrêtera jamais. Elle se poursuivra jusqu’à la consécration des libertés, de la justice, de l’indépendance et surtout la dignité humaine. Jusqu’à la consécration de la souveraineté populaire et d’une démocratie véritable», lance-t-il devant les nombreuses personnes venues l’accueillir à sa sortie de prison. A leur tête, le vétéran de la Guerre de Libération nationale, Lakhdar Bouregaâ, et Samir Benlarbi, eux-mêmes anciens codétenus de Fodil Boumala.

L’émotion de retrouver la liberté et les siens n’a été que de courte durée. Le désormais ex-détenu d’opinion a eu des mots forts en affirmant que sa libération «n’a pas été octroyée, j’ai été privé de ma liberté. Je suis un homme libre et je n’ai pas besoin d’être innocenté par quiconque. Nous sommes libres et nous le resterons. Les plans du système ne m’intéressent pas, le plus important est la libération du peuple du despotisme».

En saluant les militants, les avocats, les journalistes et les citoyens d’ici et d’ailleurs qui, tout au long de son incarcération, l’ont soutenu, lui et les autres détenus, Boumala a promis de poursuivre son combat pour la liberté jusqu’à la fin de ses jours. Il s’engage à reprendre sa place dans la révolution démocratique en cours pour qu’à «l’avenir, on bâtisse une Algérie dans laquelle aucun citoyen ne sera jugé ou emprisonné pour ses opinions».

Boumala, qui vient de passer cinq mois et dix jours derrière les barreaux, considère que sa libération n’est pas totale, tant que d’autres prisonniers d’opinion demeurent encore en détention. «D’autres frères croupissent dans les geôles du régime, Abdelwahab Fersaoui, président du RAJ (Rassemblement Actions Jeunesse), que j’ai laissé seul dans sa cellule, mais aussi Karim Tabbou et bien d’autres jeunes du hirak», rappelle-t-il.

Accueilli en héros par les nombreux activistes du hirak, entonnant les slogans classiques des mobilisations du vendredi, qui se disent soulagés par cette libération. C’est une victoire après une longue bataille politique et juridique.

En détention provisoire depuis le 19 septembre 2019, le militant Fodil Boumala a donc quitté, hier, la prison d’El Harrach. Dans la matinée, le juge du tribunal de Dar El Beïda (Alger-Est) n’a pas trop hésité à prononcer la relaxe. Il sort totalement blanchi des accusations qui pesaient sur lui depuis cinq mois. Des chefs d’inculpation – «atteinte à l’unité nationale» et «diffusion de tracts portant atteinte à l’unité nationale» – taillés en pièces lors de son jugement, le 23 février dernier. Un procès qui restera dans les annales et dont Fodil Boumala a fait une tribune pour faire le procès du système politique. Ainsi, l’issue de ce procès vient confirmer que la vague d’emprisonnements qui a touché des figures de la révolution démocratique en cours avait comme arrière-pensée de mater l’insurrection citoyenne.

Les détenus savent qu’ils sont victimes de leurs opinions politiques et leur rôle dans la mobilisation populaire contre le système politique. Arrêtés sur ordre «du haut commandement» tel que consigné dans le procès-verbal de la police judiciaire, les Boumala, Tabbou, Benlarbi, les militants du RAJ et d’autres activistes ont été victimes d’un acharnement politique et policier.

Il faut remonter à l’époque du parti unique et sa redoutable sécurité militaire pour «rencontrer» ces méthodes d’emprisonnement arbitraires opérées en dehors de toute légalité. La séquence des emprisonnements intervenue au cours d’une insurrection citoyenne qui a subjugué le monde entier par son pacifisme et sa maturité politique entachera à jamais l’histoire de la justice algérienne. De cette épreuve, elle sort grande perdante.

Comme disait Fodil Boumala lors de son fameux procès: «Si la justice ne me protège pas, qui le fera alors?» C’est justement cette instrumentalisation de la justice, l’asservissement des institutions de l’Etat et la soumission des instruments de l’exercice démocratique qui ont conduit à l’explosion de la colère du 22 février. C’est contre ce système fondé sur l’arbitraire que le peuple du vendredi continue à se battre. Le réprimer c’est recréer les conditions d’exacerbation de la colère.



Photo: Fodil Boumala à sa sortie de prison (Photo : Sami K)

Hacen Ouali


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