Il suffit de quelques averses pour que les villes du pays plongent dans une paralysie générale. Effondrement d’immeubles faisant des victimes. Les automobilistes “vieillissent” sur des kilomètres d’interminables bouchons.
Il suffit de quelques averses pour que les villes du pays plongent dans une paralysie générale. Effondrement d’immeubles faisant des victimes. Les automobilistes “vieillissent” sur des kilomètres d’interminables bouchons. Ce scénario qui hante les Algériens se répète chaque hiver sans que l’on en tire les leçons.
Force est de constater, les villes algériennes n’ont pas de plans et de capacité de drainage des eaux de pluie. Les crues s’accumulent et provoquent des situations cataclysmiques. Depuis plusieurs années, les villes sont sujettes à un phénomène d’urbanisation accru et les autorités oublient, dans la plupart des cas, la création d’un réseau d’évacuation suffisant pour parer aux inondations, aux affaissements et aux glissements de terrain. Des ouvrages de génie civil cèdent devant les crues intenses.
Les dernières pluies ont mis à nu l’absence quasi totale de plans d’évacuation, de circulation routière en temps de crise, de communication et de gestion des risques majeurs en milieu urbain. Des défauts de conception jusqu’aux malfaçons et au manque d’entretien des routes et des bâtisses, en passant par le déboisement massif et les constructions anarchiques sur des lits d’oueds, les volumes d’eau ont submergé nos villes et ont montré l’absence d’ouvrages de protection de la cité. Cette situation aux conséquences fâcheuses se traduit, à chaque averse, par des catastrophes à cause du flux d’eau soudain et puissant.
En l’absence d’un plan Orsec pour situer les failles et y remédier pour éviter l’irréparable, nos villes sont très exposées au risque de déluges mortels. Les extensions réalisées dans la précipitation, notamment durant les années 1990 et 2000 pour calmer la rue, ont complètement défiguré nos villes. Le relogement, l’ouverture de bretelles pour faciliter la circulation routière, le déboisement abusif des espaces censés amortir les crues et la réalisation de bâtisses dans des zones inconstructibles ont démultiplié les facteurs accidentogènes et destructeurs des villes. Les hautes autorités du pays devront revoir leur copie pour juguler ce phénomène, dont la responsabilité est souvent pointée du doigt. Alger est l’exemple le plus édifiant.
Pour cause, la capitale a sérieusement frôlé, dans la nuit de samedi à dimanche, le scénario du pire faisant remonter à la surface le triste souvenir du 10 novembre 2001 quand Bab El-Oued avait été engloutie sous des tonnes de boue. Les fortes averses qui sont tombées dans la nuit de samedi à dimanche ont provoqué des inondations dans toutes les wilayas concernées par le dernier BMS. Les images partagées sur les réseaux sociaux renseignent de l’ampleur des dégâts causés par ces pluies diluviennes, notamment dans le Grand-Alger où des grosses averses ont complètement obstrué les routes et provoqué des dégâts matériels inestimables. Dès l’aube, les unités de la Protection civile ont investi le terrain pour pomper les eaux dans plusieurs localités où les avaloirs n’arrivaient plus à contenir les quantités de pluie qui s’abattaient sur la capitale.
On avait l’impression de revivre le scénario du 10 novembre 2001 de Bab El-Oued. Des crues intenses provenaient notamment de Bouzaréah, de Triolet, de Chevalley, d’Oued Romane, d’El-Biar, d’Oued Ouchayeh, d’Aïn Naâdja, d’Ouled Fayet, de Chéraga et d’autres localités de l’Algérois, telles que Zéralda et Aïn Benian. Les unités du service de la sécurité publique (SSP) avaient de la peine à réguler la circulation routière à cause des pluies qui ont provoqué des flaques d’eau dans les trémies et les culs-de-sac. L’axe que craignaient les autorités, à savoir celui reliant Chevalley à Bab El-Oued, a été fermé à la circulation routière pendant plusieurs heures à cause d’un glissement de terrain. Idem sur l’axe reliant Baïnem à Bouzaréah la route s’est transformée en véritable fleuve de boue et de roche.
Dans le même axe, l’oued Beni Messous s’est brutalement réveillé et la nature a repris ses droits. Le débordement de ce cours d’eau a provoqué des crues qui ont atteint la rue Ibrahim-Hadjeres. Dans cette localité, il aura fallu l’intervention des engins de travaux publics pour évacuer les élèves menacés par les fortes crues. Recouverts de gadoue, les axes routiers d’Aïn Naâdja, de Birkhadem, de Garidi, d’Appreval, d’Hussein-Dey, d’El-Harrach et de Mohammadia ont également été touchés par de violentes crues. Dans l’Algérois, des milliers d’élèves n’ont pas pu rejoindre leurs écoles. Certains établissements ont, par mesure de précaution, préféré renvoyer les élèves chez eux.
Les ambulances médicales et des sapeurs-pompiers, bloquées dans les embouteillages, ont trouvé d’énormes difficultés à se frayer un chemin vers les hôpitaux et sur les lieux des sinistres.
Selon un bilan provisoire communiqué par la Protection civile, Alger a enregistré des dégâts matériels énormes.
À Baba Hassen, l’affaissement d’un terrain a totalement obstrué la voie publique. Les automobilistes qui tentaient de rentrer sur la capitale ont été bloqués à Douéra et à Ouled Fayet.
Dans la nouvelle ville de Sidi Abdellah, un autre glissement de terrain devant un bidonville a failli coûter la vie à une famille, alors qu’un scénario similaire a provoqué, devant une habitation de fortune, la chute d’un arbre. Survenu à proximité du parking situé au lieu-dit Amar-Laâlam, cet affaissement n’a, fort heureusement, pas fait de victime.
À l’extrême-ouest de la capitale, plus exactement à Zéralda, un gigantesque affaissement de terrain survenu sur la voie publique a englouti un véhicule. Là aussi, aucune victime n’est à signaler. Le malheureux automobiliste n’a dû sa survie que grâce à la solidarité citoyenne.
Dans les localités de Draria et d’Oued Koriche, les pluies ont causé l’effondrement du mur extérieur d’une habitation et du faux plafond d’une maison.
Par ailleurs, à Tipasa, plusieurs habitations ont subi des infiltrations d’eau de pluie, notamment à Bou Ismaïl et à Chaïba.
Dans la même wilaya, un glissement de terrain a provoqué le dérapage d’un camion-citerne qui transportait du carburant.
Du côté de l’Est, des centaines d’automobilistes qui se dirigeaient vers la capitale ont rebroussé chemin. Et pour cause, des tronçons d’autoroutes ont été complètement inondés, ce qui a provoqué des embouteillages dépassant, par endroits, dix kilomètres. C’est le cas de l’autoroute reliant Tizi Ouzou à Alger où les automobilistes ont passé plus de 5 heures sans pouvoir rallier la capitale.
C’est le cas également sur plusieurs axes de l’autoroute Est-Ouest où les pluies ont fortement perturbé la circulation routière.
Outre ces impacts enregistrés, les sapeurs-pompiers ont signalé des dizaines d’accidents de la route survenus dans plusieurs wilayas.
Avec 2.372 interventions enregistrées en 24 heures, soit 99 interventions/heure, les éléments de la Protection civile ont été débordés par les appels au secours des citoyens.
Photo: La plupart des villes algériennes n’ont pas de plans et de capacité de drainage des eaux de pluie. © D.R
FARID BELGACEM
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Posté Le : 16/11/2021
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Ecrit par : FARID BELGACEM
Source : liberte-algerie.com du lundi 15 novembre 2021