Algérie, des voix dans la tourmente Paroles d'intellectuels La crise algérienne de cette décennie n'a laissé personne indifférent. Une multitude d'essais et de romans ont été écrits par des nationaux et des étrangers pour donner une lisibilité certaine à la situation. Ces points de vue, bien sûr, n'étaient pas dénués de passion et de parti pris, rendant beaucoup d'écrits décevants. Les effets pervers de l'actualité brûlante sont assimilés à un piège quand on ne prenait pas la précaution de la mesure et du recul, indispensables dans cette perspective où beaucoup se sont improvisés spécialistes es qualité du domaine « algérien », et c'est là que le livre de Mohamed Zaoui prend toute son importance.
Ainsi, à travers quarante intervenants, beaucoup de zones d'ombre sont levées. Réalisé sous forme d'interviews, où on voit défiler l'écrivain, le chanteur, en passant par l'artiste peintre sans oublier le directeur de musée, chacun apporte un éclairage inédit et une expérience personnelle qui permettent de comprendre ce processus de déliquescence du pays qui a produit les cavaliers de l'horreur.
L'auteur n'omet pas d'avertir les lecteurs que certains des intervenants ne sont plus de ce monde, comme par exemple, M'hamed Boukhobza, qui s'est distingué par son essai : Octobre 1988, rupture ou continuité ? Dans son entretien, il parle du renouvellement des élites qui s'est fait depuis l'indépendance selon des normes complètement erronées, produisant ainsi des déséquilibres aux conséquences fâcheuses où l'institution est confondue souvent avec celui qui la dirige.
Nourredine Saâdi revient sur le rôle des intellectuels qui sont sommés dans la conjoncture actuelle de choisir leur camp. L'exigence éthique qui fonde la pensée de ce dernier l'oblige à privilégier une certaine autonomie pour ne pas sombrer dans les travers des dogmes et garder une lucidité à toutes épreuves. Des hommes de religion ont eu droit au chapitre. D'abord, Soheib Ben Cheikh, l'imam de Marseille, qui plaide pour une relecture moderne de toute la littérature religieuse. Il rejoint Mohamed Arkoun, qui milite pour cela depuis des années. Plus loin, il s'étonne qu'au « XXIe siècle, on reste agrippé aux oripeaux de la pensée désuète et archaïque d'Ibn Taymiyah, dans le monde musulman et en Algérie ».
Le cardinal Duval revient sur le rôle de l'Eglise en Algérie, discret mais fait d'écoute et d'aide à tous sans distinction.
Les artistes aussi s'expriment sur leur travail et chacun évoque dans son domaine précis la longue descente aux enfers de l'indigence culturelle. Manquant de moyens, l'artiste peintre Baya ne trouvait même pas de quoi peindre. Mohamed Harbi, historien de son état, n'oublie pas de conclure que la mémoire a été toujours malmenée. Pour preuve, il parle des archives qui sont cédées à des particuliers avec une facilité déconcertante. Algérie, des voix dans la tourmente est un document indispensable pour appréhender la décennie sanglante
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Posté Le : 04/11/2007
Posté par : nassima-v
Source : dzlit.free.fr