Algérie

Algérie - DÉCLASSEMENT DES TERRES AGRICOLES: Pour un recours «plus difficile» et «très coûteux»



Algérie - DÉCLASSEMENT DES TERRES AGRICOLES: Pour un recours «plus difficile» et «très coûteux»


L’agroéconomiste Ali Daoudi alerte sur les dangers du déclassement des terres agricoles qui se poursuit malgré un arsenal juridique qui l’interdit. Pour lui, le détournement de ces terres de leur vocation reste la «solution de facilité» et les lois ne sont «pas assez fermes». Il plaide ainsi pour la mise en place de mécanismes juridiques qui rendent le déclassement du foncier agricole «plus difficile» et «très coûteux» de manière à ce que cette option devienne le dernier recours.

Rym Nasri - Alger (Le Soir) -

L’État s’est engagé depuis plusieurs années à protéger et à préserver les terres agricoles. Pourtant, le déclassement de ce patrimoine si rare pour des projets d’utilité publique se poursuit toujours.

«Il faut protéger les terres agricoles de l’ensemble des agressions qu’elles subissent et le détournement d’usage fait partie, justement, des facteurs qui menacent ce patrimoine», a prévenu le Pr Ali Daoudi, agroéconomiste et enseignant chercheur à l’École nationale supérieure d’agronomie d’El Harrach, jeudi dernier, sur les ondes de la Chaîne 3.

Il rappelle, à cet effet, la loi d’orientation foncière de 1990 qui prévoit la protection des terres agricoles par l’État, particulièrement les meilleures, celles à haut potentiel agricole.

La loi d’orientation foncière de 2008, poursuit-il, a rajouté une «couche» pour protéger les terres agricoles de qualité inférieure en termes de fertilité notamment de types B et C. Tout un arsenal juridique qui, selon lui, reste «insuffisant».

«Les lois qui protègent les terres agricoles existent mais dans la réalité, celles-ci sont détournées pour les équipements publics, les constructions et autres projets d’extension des villes», déplore-t-il.

Pour l’expert, «nous avons besoin d’assiettes foncières alors nous détournons du foncier agricole. C’est plus facile !», regrette-t-il. Conscient qu’il faut bien construire, il insiste sur la mise en place d’autres mécanismes pour la protection de ces terres afin de rendre leur détournement très difficile pour les pouvoirs publics.

«Nous ne pouvons pas viser zéro détournement d’usage mais il faut le réduire au maximum. Les terres à un haut potentiel agricole sont limitées. C’est un véritable trésor qu’il faut préserver. Il faut donc que leur déclassement soit une option plus difficile et tellement coûteuse de façon à ce qu’elle devienne le dernier recours», dit-il.

L’agroéconomiste plaide également pour des processus d’arbitrage autour de déclassements plus transparents.

«Les arguments avancés pour déclasser une terre agricole en faveur d’un autre usage doivent être très robustes pour justifier qu’il s’agit de la seule solution possible et qu’il n’y a pas d’autres options», explique-t-il.

S’impose ainsi l’exploration de toutes les pistes avant d’opter pour les terres agricoles. Qualifiant ce patrimoine de «rare» qu’il faudrait préserver coûte que coûte, le Pr Ali Daoudi souligne également l’implication de la société civile.

«Les détenteurs des droits sur les terres agricoles publiques, les concessionnaires, n’ont que très peu de recours lorsqu’ils sont expropriés de leurs terres. Aujourd’hui, ils se trouvent complètement désarmés pour préserver leurs terres. Il faut donc créer les mécanismes de recours pour que ces personnes puissent défendre leurs intérêts et jouer à leur tour un rôle dans la protection de ces terres agricoles», conclut-il.

Ry. N.


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