L’amoncellement des ordures ménagères, des déchets industriels et des gravats un peu partout est d’ailleurs à l’origine de la dégradation du cadre de vie des algériens et de l’environnement. Il faut savoir d’ailleurs qu’un Algérien produit quotidiennement en moyenne 0,85 kg de déchets solides, avec 1,2 kg rien qu’au niveau de la capitale, selon un rapport de l’Agence nationale des déchets, alors que le niveau de récupération reste faible.
Mais si les pouvoirs publics ont toutes les peines du monde à débarrasser ces tonnes d’ordures ménagères qui jonchent tous les coins et recoins des villes et villages d’Algérie, sous d’autres cieux, notamment dans des pays développés comme l’Allemagne, l’heure n’est plus à l’élimination de manière fiable des déchets ou de purifier l’eau polluée, mais plutôt à la récupération des potentiels énergétiques qu’ils contiennent!
Et pourtant la possibilité de recycler ces déchets est à chaque fois relevé par les responsables du secteur et les experts. Ces déchets sont en effet considérés comme un gisement de créations de richesses. En d’autres termes, plus de recyclage équivaut à plus d’emplois à travers toute la chaîne de cette industrie encore naissante en Algérie. Du tri sélectif des déchets, passant par la récupération, la distribution avant d’arriver au recyclage de ces produits.
Il s’agit donc aujourd’hui de transformer cette image déplorable de villes sales rappelée à chaque fois dans le classement établi par les Organisations non gouvernementales (ONG) en une opportunité économique dans un pays où le défi de l’emploi reste encore à relever, au même titre que ceux de la protection de l’environnement et de la lutte contre les effets des changements climatiques.
Aujourd’hui, à l’ère du développement de l’utilisation de l’énergie renouvelable et de la naissance de nouvelles activités économiques liées notamment à l’installation et la maintenance des panneaux photovoltaïques (des formations en sont dispensées), le métier de la récupération et du recyclage des déchets tarde à se faire une place, faute de moyens efficaces.
Les initiatives dans ce cadre restent faibles et éparses, alors que de l’autre côté de la méditerranée le créneau se développe à grande vitesse.
Pourquoi cette réticence à un secteur générateur d’emplois?
La situation s’explique par de nombreux facteurs, à commencer par l’aspect social avec l’absence d’une culture du tri sélectif des déchets chez les ménages d’abord, puis chez les responsables locaux. Combien sont-ils à suivre cette méthode et combien sont-elles les mairies à mettre le paquet pour encourager les consommateurs à suivre cette voie. Des interrogations qui s’imposent quand on sait que même les simples bacs à ordures verts sont pratiquement absents dans de nombreux quartiers, notamment à Alger.
Quand c’est le cas, ils sont souvent détournés. Réserver des cuves pour les déchets recyclables et d’autres pour les non recyclables se fait rarement. Quid alors dans ce cas du rôle des bureaux d’hygiène communaux (BHC)?
Ce ne sont pourtant pas les appels au lancement de campagnes de sensibilisation et ni les opérations pilotes qui manquent depuis quelques mois. On assiste, en effet, ces derniers temps à une multiplication des sorties et des orientations contenues dans le plan national de gestion intégrée des déchets ménagers dont l’objectif est d’augmenter le volume des déchets recyclés à 25% en 2015 et 50% en 2016.
Une valeur ajoutée de 30,5 milliards de dinars par an
La semaine dernière, le sujet a été au centre des débats lors d’une journée parlementaire organisée sous le thème: «Les déchets, de catastrophe écologique à ressource industrielle». La ministre de l’aménagement du territoire et de l’Environnement, Dalila Boudjemaâ, a saisi justement l’occasion pour souligner l’importance du recyclage des déchets ménagers. Une opération qui contribuera, selon elle, à la valorisation et l’exploitation de près de 770.000 tonnes par an comme matière première dans le domaine de l’industrie. Et ce, pour une valeur ajoutée de 30,5 milliards de dinars par an. Pour cela, des efforts sont à déployer.
La ministre a relevé par la même occasion l’importance du développement progressif des industries de récupération et de recyclage. Des industries encore à l’état embryonnaire. Elles sont aujourd’hui 2.000 micro-entreprises à activer dans plusieurs domaines liés à l’environnement. Cependant, les capacités en termes de recyclage ne sont pas très importantes. Ainsi, selon les chiffres du ministère de l’Environnement, sur un volume global des déchets de 13,5 millions de tonnes par an, 60% sont recyclables. Or, sur le terrain, seulement 5% à 6% de ces déchets sont exploités par voie de recyclage, faute de moyens. Le reste n’est pas exploité au profit de l’emploi et de l’économie. La nécessité de s’organiser en réseau ou en association s’impose dans ce cadre, comme c’est le cas pour d’autres filières industrielles.
«Quand les opérateurs économiques d’un secteur donné s’organisent en association, ils ont du mal à défendre leurs intérêts. Que dire alors quand cette organisation fait défaut ?», s’interroge un opérateur économique du secteur, avant de poursuivre: «En tout cas, le chemin est encore long. Il faudrait d’abord changer les mentalités et installer la tradition du tri sélectif chez la population».
Surtout en cette période marquée par les changements des habitudes de consommation chez les algériens. Entre eaux minérales et eaux de source embouteillées, les boîtes de conserve, les plastiques d’emballage des biscuits et autres produits alimentaires, les emballages en carton, les vaporisateurs et bien d’autres contenants qui finissent dans les décharges, le gisement à recycler est plus qu’important.
Créer des filières de récupération spécialisées
De l’avis de la ministre, il y a lieu justement de bien cibler l’activité en créant des réseaux de récupération et des filières spécialisées pour le papier, le plastique, le verre et les minéraux avant de cibler d’autres types de déchets. Mais là aussi, des conditions sont à assurer, à l’image de la formation et de la recherche. Beaucoup reste à faire dans ce cadre, notamment pour s’adapter aux nouvelles techniques en vigueur dans les pays développés comme l’Allemagne, prise en exemple par l’Algérie dans ce domaine. Ainsi, l’enseignement supérieur et la formation professionnelle sont appelés à s’impliquer davantage en ouvrant de nouvelles filières et contribuer à la mise en place d’une véritable industrie de l’environnement. A cela s’ajoute le rôle des collectivités locales et du mouvement associatif pour lesquels un programme d’information spécifique a été retenu par le département de Dalila Boudjemaâ.
Samira Imadalou
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Posté Le : 20/01/2014
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Photographié par : Photo: © D. R. ; texte: Samira Imadalou
Source : El Watan.com du lundi 20 janvier 2014