Algérie - Abderrahmane Morceli. Entraîneur d’athlétisme «Le niveau a considérablement régressé»

Rencontré au siège du Comité olympique algérien (COA), Abderrahmane Morceli, frère aîné de Noureddine, notre champion mondial et olympique du 1500 m, et aussi celui qui était son entraîneur et qui a connu avec lui de véritables moments de gloire, a bien voulu nous parler de sa carrière et nous donner son avis sur l’athlétisme actuel algérien. Agé aujourd’hui de 56 ans, Abderrahmane a une belle expérience dans le monde du sport de haut niveau.

- Dites-nous d’abord quelle est votre activité actuellement?

Depuis 2004, je suis entraîneur de demi-fond au Riverside City Collège (RCC) aux USA, qui est à 60 km de Los Angeles. C’est l’établissement même où mon frère Noureddine a étudié et où il s’est également entraîné. Deux champions olympiques, dont Noureddine, ont fait leurs études sur place. Nous sommes considérés comme les meilleurs aux USA, du moment que nous avons remporté à cinq reprises le championnat national américain. Notre niveau de formation nous a permis aussi d’envoyer 175 athlètes dans les universités, desquelles quelques éléments ont décroché leur place en sélection nationale.

- Mais comment avez-vous élu domicile dans ce collège?

A vrai dire, je suis parti me reposer aux USA après une longue carrière en tant qu’athlète et aussi suite à l’éprouvant labeur comme entraîneur de Noureddine et j’avais l’idée de développer le demi-fond au centre californien. C’est ainsi qu’on faisait venir des lycéens pour les intégrer au collège qui est en somme un niveau pré-universitaire d’une durée de deux ans. Notre but c’est d’avoir nos éléments dans les équipes nationales. Par exemple Brandon Johnson, qui est mon athlète, y figure. Il est 5e performance mondiale au 800 m avec un temps de 1’43’’85. Nous avons aussi, le meilleur athlète junior, Ruiz Guiterrez, qui prépare les JO de 2016 et 2020.

- En dehors de Noureddine, y a-t-il eu des Algériens qui ont fréquenté ce collège?

Oui, il y avait Kaida Lotfi et aussi Abdenouz Réda, qui a malheureusement abandonné.

- Avec tout ce travail que vous effectuez à l’étranger, est-ce qu’on n’a pas fait appel à vous ici en Algérie?

Je n’ai jamais cessé de penser à hisser de nouveau les couleurs algériennes aux JO ou lors des championnats du monde. C’est pour cela qu’en 2007, j’ai pris attache avec le COA et un protocole d’accord a été signé avec Berraf pour l’envoi d’athlètes algériens pour les préparer au centre olympique du Colorado Springs et à San Diego Chula Vista. Malheureusement après le départ de Berraf, tout est tombé à l’eau.

- Puisque celui-ci est revenu, le projet peut-être repris?

Bien sûr, si vous m’avez trouvé ici au COA, c’est bien dans cet objectif. Incha Allah cette fois nous réussirons. Nous avons décidé d’un stage mixte pour 8 à 10 athlètes. Le lieu, en Algérie, n’est pas encore déterminé, mais aux USA, cela se passera au Colorado ou à San Diego. Avouons que nous avons tout à apprendre, si on considère qu’au dernier Championnat du monde à Moscou, les Américains ont obtenu des médailles dans les catégories féminine et masculine, c’est dire que le demi-fond se développe parfaitement bien aux USA, alors que pour les Algériens c’était le fiasco.

- Justement, vous voulez bien nous donner votre appréciation sur la situation actuelle de l’athlétisme algérien?

Pour réussir, il ne faut pas se mentir. Je ne peux cacher mon désarroi quand je vois que le niveau de notre athlétisme a considérablement régressé par rapport à l’époque de Noureddine, Belaout ou Abdenouz. En athlétisme, rien n’est magique, il y a le chronomètre ou le métrage. Aussi, je suis formellement contre le fait de donner des bourses individuelles à des athlètes. Il faut reprendre la formule du temps de Noureddine où le travail se faisait collectivement avec un entraînement en commun. Je ne comprends pas. Il y a quelque temps, on avait des champions juniors comme Touil et Aïnou. Pourquoi n’ont-ils pas progressé. Noureddine a été vice-champion du monde junior en 1988 au Canada et en 1991, il a fini sacré champion. Je pense qu’à l’heure actuelle, on peut récupérer ces jeunes avec l’apport du COA et du MJS pour les objectifs de 2016 et 2020.

- Noureddine vous aide-t-il dans votre travail?

Effectivement. Quand je fais appel à lui, il m’épaule en Californie pour les stages. Il intervient avec des explications aussi bien théoriques que pratiques. Egalement, parfois il donne des conférences dans les universités où on enseigne le français.

S. R. O.