Algérie

Alger et Paris partenaires désormais raisonnables



Alger et Paris partenaires désormais raisonnables
Alger et Paris, entendez l'ex-colonisateur et l'ancien colonisé, force africaine et arabe en voie d'émergence, peuvent-ils avoir désormais des rapports normaux alors qu'ils ont des liens si particuliers ' Cinquante-deux ans après l'Indépendance, la question est toujours d'actualité. Posée avec acuité. Les deux pays ont souvent entretenu des rapports cyclothymiques. Avec des troubles de l'humeur des uns et des autres. Et des crises mémorielles parfois mémorables, de part et d'autre, favorisant une alternance de périodes d'euphorie et des temps de dépression. Dans les phases d'optimisme raisonnable et de satisfaction modérée, la raison des affaires reprend le dessus. Et dans les étapes de pessimisme excessif et d'irritabilité partagée, les gros contentieux et le poids mémoriel lestent la relation bilatérale. Freinent pour un temps les élans de la coopération. Mais depuis une dizaine d'années, on fait, ici et là-bas, assaut d'un pragmatisme de bon aloi. On parle donc de normalisation en mettant en avant la logique froide des intérêts. Surtout quand la position dominante et privilégiée de la France en Algérie, est sérieusement menacée par le dragon chinois. On s'évertue alors à régler les problèmes et les contentieux, au cas par cas et avec méthode, dans des cadres de travail adéquats. Comme c'est le cas avec la Haute commission mixte bilatérale, présidée par les deux Premiers ministres. Ou bien avec le Comefa, le comité mixte économique France-Algérie. Outil permettant l'avancement de projets de partenariat, moyen de dégager des perspectives d'investissement. Ou encore avec la nomination, de part et d'autre, d'un facilitateur d'affaires, comme du côté français, Jean-Pierre Raffarin ou plus récemment Jean-Louis Bianco, deux personnalités politiques de premier plan et deux hommes de réseaux transversaux. Et on a même vu le chef de l'Etat algérien, lui-même un acteur de la Guerre de libération, inviter François Hollande, né l'année même où il a rejoint l'ALN, à «exorciser le passé en en faisant ensemble, dans des cadres appropriés, un examen lucide et courageux qui contribuera à renforcer nos liens d'estime et d'amitié». On le voit bien, entre les deux pays, il y a une atmosphère et un langage nouveaux. A ce même vocabulaire d'affaires et de diplomatie apaisée, on ajoute la lucidité, le respect, l'estime et l'amitié. Le climat et les mots nouveaux sont en soi une bonne nouvelle. Mais il y a aussi le poids des réalités et le rythme des avancées réelles enregistrées. Car les relations bilatérales ne dépendent pas seulement des bonnes dispositions d'esprit des politiques et des deux seuls chefs d'Etat. Il y a toujours les sempiternels dossiers en suspens encore nombreux. Et on n'oublie surtout pas la réalité de relations économiques d'une certaine densité mais, paradoxalement, insuffisantes et structurellement figées, malgré la bonne volonté de mettre plus d'huile dans les rouages. Elles restent limitées essentiellement aux hydrocarbures, côté algérien, aux services notamment bancaires, l'agro-alimentaire, la pharmacie et les produits de l'industrie automobile, pour la partie française. Comme on note le niveau d'investissement nettement inférieur par rapport à la tradition en Tunisie et au Maroc, même si la France est toujours le premier investisseur étranger horshydrocarbures. Et, défaut majeur, les échanges ne sont pas assez basés sur les réseaux et les organisations décentralisés à travers l'implication des entreprises, surtout les PME-PMI et la société civile. En fin de compte, entre Algériens et Français, même quand c'est bien, c'est peu et ce n'est jamais assez pour que la France et l'Algérie deviennent ce que Berlin et Paris sontaujourd'hui. Allemagne et France liées par une relation stratégique exceptionnelle, moteur de l'Europe. Relation hier profondément passionnelle. En 2014, la France est un partenaire commercial essentiel de l'Algérie, devancée de peu par la Chine depuis 2013, et qui veut retrouver sa première place. Et le sacro-saint principe souverainiste du 51/49, en voie de révision, n'a en rien remis en cause le leadership français. Tout comme les officiels, les entreprises françaises, les ténors du CAC 40 comme les PME-PMI, au-delà du discours généreux sur le partenariat équilibré, viennent en Algérie, encore plus qu'hier, pour y effectuer quand même un «voyage en terre de contrats». Et, pour reprendre une formule sémantique du président Hollande, à chaque fois, «le voyage fut utile pour la France et l'Algérie». Il est certes utile le voyage, mais dans la balance des échanges, il n'est pas toujours de l'ordre du «gagnant-gagnant». Et la coopération économique et commerciale ne connaît pas un essor continu à hauteur des déclarations d'intention les plus solennelles. Et ce n'est pas une «Symbol» Renault qui sera le symbole du «partenariat d'exception» et de «grande dimension», même si sa modeste chaîne de fabrication sera inaugurée en présence de la crème du gouvernement Valls.N. K.




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