Algérie

Alger, Dessine-moi un visa !



Jeudi soir, au jardin du CCF, l’exposition était bien là, rassemblant des dessins de Ayyoub, Kaci, Maz, Mellouah, Noun, Islam, Le Hic, Aladin, Slim, Abi et de leurs confrères français Nono (Le Télégramme de Brest), Wolinski (Paris Match, Le Journal du dimanche), Vial (Le Monde), Pétillon (Le Canard enchaîné), dont seuls les dessins ont traversé la frontière.

Le CCF avance des « problèmes techniques », dont « l’obtention des visas n’en est pas la principale » qui auraient empêché les quatre dessinateurs de participer à la rencontre – reportée à mai 2007 – placée sous le thème « Dessine moi l’humour », une manifestation dans le cadre des festivités culturelles Lire en fête, rendez-vous annuel en France et à l’étranger. Des sources en France, notamment le quotidien Le Monde et Reporter sans frontières, indiquent que les quatre dessinateurs « se sont vu refuser leur visa d’entrée en Algérie ». Selon Le Monde, une erreur d’orientation dans la demande de visas des quatre dessinateurs aurait été commise par les services de l’ambassade de France, l’Algérie en aurait profité pour refuser leur visa à ces dessinateurs dont certains, comme René Pétillon, ont envoyé des croquis sur l’affaire du voile et sur celle des caricatures du prophète Mohammed. « En arriver à refuser des visas à des dessinateurs, s’insurge le dessinateur Noun (Al Akhbar, L’Epoque, etc.), ça résume la situation de la liberté d’expression en Algérie ». Même consternation du côté du Hic (Le Soir d’Algérie). Pour sa part, l’un des doyens de la profession, Haroun (Le Buteur) confesse que la caricature politique comporte de gros risques : « J’en suis resté aux gags ». Le jeune Islem, talent montant de la caricature, en terminale, ressent déjà ce « manque de liberté d’expression ». Ce qui ne le décourage pas d’envisager de plancher sur un album BD relatant les aventures d’un lycéen amoureux. Les dessinateurs présents se sont amusés à croquer quelques blagues sur une planche au centre de l’exposition. Tandis que des fans soumettaient l’album Dessine-moi l’humour (édition Chihab, disponible dans les librairies cette semaine, 800 DA) pour des dédicaces. « Au début, on voulait créer un catalogue, mais chemin faisant on a pensé à un album », explique Abdellah des éditions Chihab. L’album est préfacé par Chawki Amari, journaliste auteur caricaturiste chroniqueur, qui a goûté aux geôles humides de Serkadji pour un dessin. Caricaturiste, un métier à risque ? « Un juge n’est pas payé pour son sens de l’humour », souligne Amari dans la préface qui fait monter l’humour au maquis contre « la censure administrative, les crispations théologiques et l’entendement commun ». La semaine dernière, les autorités algériennes ont refusé, pour la deuxième fois, un visa pour Djamel Debbouze qui devait accompagner l’équipe du film de Rachid Bouchareb, Indigènes. « Pas un artiste, pas un comédien ne s’est insurgé contre cette interdiction », regrette un artiste qui a tenu à garder l’anonymat.




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