Algérie

Alger déploie la diplomatie de la patience pour Bamako



Alger déploie la diplomatie de la patience pour Bamako
«Nous nous réjouissons de l'accompagnement et de l'appui multiforme de l'Algérie, pays frère et ami, au Mali sur les plans sécuritaire, politique et économique.» Cette déclaration du chef de la diplomatie malienne à Alger résume bien la position diplomatique algérienne sur la crise chez le voisin subsaharien. L'Algérie est «un pays ami et frère» qui «accompagne et appuie». Comme en témoigne le nouvel accord de dialogue signé samedi à Alger par trois autres groupes armés du Nord-Mali. Grâce aux bons offices d'Alger, c'est le second arrangement en une semaine qui porte à six le nombre d'organisations rebelles prêtes à dialoguer avec Bamako sur la base d'une plateforme. On le voit donc, dans la crise malienne, les choses se mettent progressivement en place et sont de plus en plus prometteuses. Et cela se fait dans un cadre régional africain. Après les divergences de fond et les différences de forme, on est enfin parvenus à un modus vivendi diplomatique. Les acteurs directs au Nord-Mali, à l'exception des inflexibles Aqmi et Mujao, en sont ainsi venus à cette attitude de conciliation. Il est acquis désormais que le Mnla et Ansar Eddine sont désormais favorables à la concertation et souhaitent participer au dialogue avec les autorités centrales. Mieux même, Ansar Eddine, mouvement islamiste par goût temporaire de la dissidence, mais organisation autochtone touarègue, rejette désormais «toute forme de terrorisme». Bonne nouvelle confirmée à Alger, processeur diplomatique et disque dur sécuritaire de toute solution négociée dans la région. Pour en arriver là, la diplomatie algérienne a déployé des trésors de subtilité, de patience et d'action discrète. Alger misait sur le temps indispensable à la diplomatie de la patience pour faire évoluer favorablement les esprits. Depuis, son opiniâtreté et sa cohérence ont fini par payer. Désormais, le curseur diplomatique est placé sur une ligne de compromis dynamique. L'Algérie aura donc réussi à se faire entendre. Tout compte diplomatique fait, la célèbre devise mitterrandienne du temps à donner au temps, défendue ab initio par l'Algérie, aura prévalu. Il fallait donc s'offrir du temps diplomatique pour retarder le temps militaire, le réduire ou l'abolir. Ceci expliquant cela, on comprend mieux pourquoi l'Algérie s'est opposée depuis le début à une action militaire intempestive, sensible qu'elle est au principe chrétien de l'abyssus abyssum invocat, l'abime appelle l'abime. Ce qui était perçu alors comme de l'inertie, de l'entêtement ou de l'intransigeance, procédait finalement de la perception d'une géopolitique patiente. Quand ils appréciaient la situation au Mali, les Algériens voyaient toujours, en toile de fond, le précédent libyen. Ils soulignaient à chaque fois ses deux conséquences évidentes : la dissémination d'armes de tout genre et le vivier de recrutement djihadiste que la Libye est devenue pour les narcoterroristes du Nord-Mali. Un vrai «pôle emploi» pour les terrosalafistes de tout poil. Ajoutons le souci obsessionnel de l'Algérie de sécuriser ses frontières avec son voisin subsaharien et de sanctuariser son propre territoire. Il fallait donc disposer de plus de temps pour créer une situation plus favorable à ses frontières. Attente d'autant plus nécessaire que le Mnla, mouvement séculier et familier des Algériens, a été beaucoup affaibli face à la mutuelle terroriste constituée par Aqmi, le Mujao et un temps par Ansar Eddine. Aux yeux des Algériens, ce deal artificiel n'allait pas résister à l'épreuve du terrain, au choc des ambitions personnelles et aux guerres de leadership. Ils étaient convaincus aussi qu'Ansar Eddine, mouvement endogène, serait mieux disposé à participer, à terme, à une solution politique. Dans leur esprit, bon sang touareg ne pouvait mentir. Il était question également de découpler Ansar Eddine, principale faction touarègue de «ses alliés terroristes de circonstance». Dans le conflit malien, les craintes stratégiques algériennes étaient donc fondées. Il y a eu alors afflux de djihadistes de tout acabit au Nord-Mali. Les amants de l'apocalypse y sont venus pour «la mère des batailles» sacrificielle, sans oublier, au passage, une fervente prière pour le Dieu-dollar du florissant narcotrafic et de l'industrie du kidnapping. La perspective d'un enlisement à l'afghane taraudait les esprits. C'est toujours le cas.N. K.




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