Algérie

Alger dénonce la trahison de Madrid



Subit coup de froid entre Alger et Madrid. L'Algérie a décidé le rappel de son ambassadeur pour consultations, avec effet immédiat. Les déclarations des plus hautes autorités espagnoles concernant le dossier du Sahara occidental en sont la cause. Le communiqué du ministère des Affaires étrangères évoque un «brusque revirement» de position. «Très étonnées par les déclarations des plus hautes autorités espagnoles relatives au dossier du Sahara occidental, les autorités algériennes, surprises par ce brusque revirement de position de l'ex-puissance administrante du Sahara occidental, ont décidé le rappel de leur ambassadeur à Madrid pour consultations avec effet immédiat», souligne le communiqué. L'Algérie reproche au gouvernement espagnol une lettre de son Premier ministre, Pedro Sanchez, adressée au roi du Maroc où il «considère l'initiative marocaine d'autonomie, présentée en 2007, comme la base la plus sérieuse, réaliste et crédible pour la résolution du différend», du Sahara occidental, selon les autorités marocaines qui ont rendu public le courrier du responsable espagnol.Il y a dans ce passage, s'il s'avère exact, un renoncement de la part du gouvernement ibérique à un principe immuable des droits des peuples à disposer d'eux-mêmes. Sanchez, qui s'aligne honteusement sur la position de Rabat, au mépris du droit international, contredit sa propre société civile, de nombreux partis politiques et l'Etat espagnol qui n'ont eu de cesse, depuis 45 ans, de soutenir les résolutions de l'ONU sur le dossier sahraoui. Cette nouvelle posture est, disons-le, indigne d'un Etat souverain.
L'opinion publique espagnole sait parfaitement qu'en tant qu'ancienne colonie, le Sahara occidental n'a jamais été considéré comme une terre marocaine. Les Sahraouis ont mené une guerre de Libération nationale pour se défaire de la colonisation espagnole. Au même titre d'ailleurs que beaucoup de peuples africains. De fait, selon la charte de l'ONU, il revient aux habitants de ce pays de s'autodéterminer.
Mais les ambitions expansionnistes marocaines et l'accord tripartite entre l'Espagne, le Maroc et la Mauritanie se sont mis au travers du peuple sahraoui. Il revenait initialement à l'Espagne d'organiser un référendum d'autodétermination du peuple sahraoui avant de quitter le territoire. D'autant qu'à l'époque déjà, la lutte pour l'indépendance était engagée sous la bannière du Front Polisario. Les Sahraouis avaient leur représentant légitime. Mais en l'ignorant, l'Espagne a ouvert une brèche qui ne s'est toujours pas fermée, 45 ans plus tard. L'inscription de la question sahraouie par les instances onusiennes en tant que question de décolonisation a mis la dernière colonie d'Afrique au centre de la table.
L'Espagne à l'instar de la grande majorité des pays de la planète a adhéré au plan de décolonisation de l'ONU. La lutte armée a duré jusqu'en 1991, avant que n'intervienne un accord avec le Maroc sur le principe de l'autodétermination. Jusqu'à la lettre de son Premier ministre, l'Espagne était alignée sur la position de l'ONU, au même titre que l'Union africaine, l'Union européenne, la Cour internationale de justice et la Cour européenne de justice et toutes les organisations régionales ne reconnaissent aucune souveraineté du Maroc sur les territoires qu'il occupe illégalement.
Le revirement de Madrid est d'autant plus incompréhensible qu'au même moment presque, le Parlement des Etats- Unis a refusé de céder sur le droit d'autodétermination du peuple sahraoui.
Le congrès US a remis le Maroc à sa place, lui rappelant l'indécence d'annexer un territoire qui ne lui appartient pas, sans en référer à ses habitants. Le Front Polisario et le gouvernement de la RASD ont réagi en qualifiant la nouvelle position de Madrid de «trahison dans un contexte marqué par la reprise de la guerre, depuis 2020, dans les territoires occupés». L'Espagne a été également accusée d'avoir «sacrifié le peuple sahraoui et d'avoir dépassé les lignes rouges suites aux pressions et provocations exercées par Rabat».
La secrétaire générale de Podemos et ministre des Affaires sociales, Ione Belarra, a critiqué la décision du Premier ministre de soutenir le Maroc contre le Sahara occidental.
«L'Espagne ne doit pas déroger au droit international», a-t-elle souligné, tout en précisant que la seule solution pour mettre fin à des décennies de non-respect du Sahara occidental est d'appliquer le droit international et les résolutions des Nations unies sur le référendum d'autodétermination du peuple sahraoui.
Le PPP (parti de droite) qui a exigé une comparution de Sanchez devant le Parlement a qualifié d'«intolérable», ce changement d'«une position politique de consensus traditionnel et vieille de 47 ans». D'autre part, le porte-parole de Euscal Herria Bildu (coalition basque) a dénoncé des déclarations graves qui «nie une fois de plus le droit légitime du peuple sahraoui à l'autodétermination. Un droit fondé sur le respect des résolutions de l'ONU et sur le droit international lui-même».


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