Al-Qaïda espère reprendre de la vigueur au Yémen où la puissante branche locale du groupe jihadiste, affaiblie par des années de revers, cherche à profiter de la mobilisation du gouvernement et des rebelles Houthis dans la bataille sanglante de Marib pour regagner du terrain. Le combat féroce que livrent depuis un mois les rebelles, pour s'emparer de ce dernier bastion gouvernemental dans le nord, a créé un vide sécuritaire dont Al-Qaïda dans la péninsule arabique (Aqpa) tire profit, ont assuré des responsables de sécurité et des chefs de tribus. Auteur en 2015 de l'attentat meurtrier contre Charlie Hebdo à Paris, Aqpa a subi de multiples défaites ces trois dernières années, perdant territoires et combattants. «Marib a été le principal bastion d'Aqpa ces dernières années», explique un responsable des services de renseignement yéménites. Mais alors que les principaux belligérants d'un conflit qui dure depuis six ans se concentrent sur cette région pétrolière stratégique, Aqpa «profite de la guerre et du chaos pour avancer librement sur d'autres terrains». Aqpa «entraîne à nouveau des combattants et reconstruit des relations» avec les tribus locales tout en cherchant un «soutien financier» auprès de la population, a ajouté le responsable. Au pouvoir dans une grande majorité du nord du pays, les Houthis, soutenus par l'Iran, ont lancé une offensive début février pour arracher Marib aux forces gouvernementales, appuyées elles par l'Arabie saoudite. «La bataille de Marib pourrait mettre fin à la grande pression qui a presque anéanti (Aqpa)», selon un autre responsable des ser-vices de renseignement yéménites. «Il est logique que le groupe tire un grand avantage à la bataille de Marib (...) pour restructurer ses rangs», a confirmé le chercheur Saïd Bakran, spécialisé dans les organisations extrémistes.Lors d'une réunion de jihadistes, un soir de janvier 2009, dans les montagnes rudes d'Abyane (sud), Aqpa naît d'un mariage de convenance entre les ramifications du réseau au Yémen et en Arabie saoudite, ciblées par des campagnes militaires américaines et régionales. En un an, le groupe a recruté des centaines de combattants avec l'aide des tribus locales, attiré des jihadistes d'Asie et d'Afrique, revendiqué des attentats meurtriers, ou encore tenté de tuer un haut responsable saoudien et de faire exploser un avion civil américain. L'ombre d'Al-Qaïda planait déjà sur le Yémen, le groupe ayant revendiqué l'attaque du destroyer américain USS Cole qui a tué 17 militaires américains en 2000. A partir de 2009, ses combattants «avaient une base solide pour se déplacer et de nombreux refuges sûrs», a indiqué Hossam Radman du centre de réflexion Sanaa Center for Strategic Studies. Aqpa a atteint son apogée en 2014 quand il envahit plusieurs villes du Yémen. Ses forces prennent même le contrôle de Moukalla, dans le sud du pays, en 2015, au moment où son rival, le groupe Etat islamique (EI), gagne du terrain en Irak et en Syrie.
En 2015, l'Arabie saoudite intervient au Yémen à la tête d'une coalition militaire pour soutenir le gouvernement face aux Houthis, tout en gardant un oeil sur Aqpa. Les Emirats arabes unis, membre de cette coalition, ont chassé Aqpa des villages les uns après les autres, avec l'aide des forces, des armes et des renseignements américains. Le chef de d'Aqpa, Nasser al-Wahishi, meurt dans une frappe de drone américaine en 2015. Al-Qaïda est également mis en difficulté par la montée de l'EI qui cherche à lui ravir des territoires et des soutiens locaux. «Tous ces éléments ont affaibli Aqpa, aujourd'hui confronté à des problèmes financiers. De nombreux membres sont accusés de trahison, et d'autres ont rejoint l'EI», souligne un chef tribal de Marib. Mais le groupe continue d'exploiter «le vide sécuritaire» et d'»opérer dans des zones du sud et du centre du Yémen avec une relative impunité», selon un rapport américain qui estimait en 2019 le nombre des combattants à quelques milliers. Selon le chef tribal, la bataille de Marib «aide le groupe à se restructurer». Le mois dernier, Aqpa a appelé à prendre les armes contre les Houthis. «Ils ont même poussé certains de leurs combattants à rejoindre les rangs de la résistance qui combat les Houthis, afin de bénéficier du soutien financier qu'elle reçoit», a-t-il ajouté, en référence aux salaires qui seraient versés par la coalition.
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Posté Le : 17/03/2021
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : L'Expression
Source : www.lexpressiondz.com