Jamais, depuis 1962, la compagnie nationale aérienne Air Algérie n'a
été aussi près d'une inscription sur une liste noire. La Communauté européenne
fait peser sur elle cette menace au même titre que d'autres compagnies non
occidentales. C'est le branle-bas dans la compagnie pour éviter un retard qui
risque d'être fatal. L'échéance est pour novembre
La Commission européenne surveille constamment les transporteurs
aériens qui exercent sur son sol et son espace aérien. Elle fait en sorte
qu'ils respectent une réglementation, des normes et des protocoles de transport
et de sécurité. Ses services, notamment les directions de l'aviation civile des
pays de l'Union européenne (l'UE), ont régulièrement inspecté les avions
exploités par Air Algérie dans l'UE, et cela depuis janvier 2009. En fait, les
contrôles sont quotidiens sur tous les aéroports européens par lesquels
transitent les avions civils algériens. C'est l'usage pour tous les avions,
sans exception. Mais depuis janvier 2009, on s'est spécialement intéressé aux
aéronefs de la compagnie nationale. Les contrôleurs européens – tatillons - ont
trouvé à redire sur l'état des avions d'Air Algérie. La compagnie nationale a
désormais un retard à ne pas faire, celui de se conformer, à la date du 5
novembre prochain, aux règlementations en vigueur en Europe en matière de sécurité.
Les autorités européennes ont constaté des «manquements à la sécurité du
transport de marchandises, de la navigabilité et de l'exploitation des
appareils, et des licences du personnel navigant». Sur ce dernier point, des
pilotes déplorent que du personnel navigant ne se recycle pas régulièrement. La
compagnie nationale qui aurait beaucoup à perdre en cas d'inscription sur une
liste noire, a-t-elle le moyen d'éviter de rater le rendez-vous ? Alors que
certains au sein de la compagnie s'en inquiètent, les services concernés au
ministère des Transports et Air Algérie s'attellent à éradiquer ces
«manquements». Il s'agit bien d'éviter une entrée désastreuse dans la blacklist
européenne aux côtés des petites compagnies transport aérien du Bénin, du Congo
ou du Gabon.
Des problèmes «classiques» et le Credoc
Sous le sceau de l'anonymat, des cadres d'Air Algérie soulignent
que le potentiel humain existe mais que les problèmes demeureront si le
management ne suit pas et ne s'inscrit pas dans les normes universelles. En
clair, si un effort extraordinaire peut permettre de ne pas rater le
rendez-vous-ultimatum fixé par les Européens, une absence de changement dans le
mode de gestion continuera de fragiliser la compagnie nationale. Outre ces
aspects «classiques», les ennuis d'Air Algérie sont effectivement liés aux
difficultés générées par l'imposition du crédit documentaire comme uniquement
moyen de paiement des importations. Une option que vient d'ailleurs de
réaffirmer avec vigueur le ministre des Finances, Karim Djoudi, dans une
intervention à la chaîne III. La latitude laissée aux opérateurs de recourir au
transfert libre pour l'équivalent de 20.000 euros par an a été considérée comme
sans grand impact par de nombreux opérateurs. Pour Air Algérie, cela relève tout
simplement de l'anecdotique. Les services de la maintenance, ceux qui sont en
première ligne pour ne pas rater le rendez-vous du cinq novembre, en subissent
les effets. La lourdeur de la procédure est handicapante pour une entreprise
tenue par des exigences élevées de sécurité et qui cherche à se libérer de
l'image de la compagnie où arriver à l'heure est le scoop. Le PDG de la
compagnie, Wahid Bouabdellah a «osé» critiquer cette disposition à laquelle le
gouvernement manifeste son attachement. Les cadres de la compagnie partagent
totalement le point de vue du PDG sur cette question.
Réciprocité
«Le précédent Pdg avait institué un système de crédit annuel auprès
de Boeing qui permettait d'avoir la pièce détachée à tout moment. Son
successeur l'a supprimé, puis est arrivé le Crédit documentaire. Maintenant, on
attend de réceptionner un nouveau Boeing et on sait qu'il va servir en partie à
dépanner des avions actuellement à l'arrêt faute de pièces détachées», indique
un navigant sur les appareils de Seattle. Les mises en garde de la Commission
européenne sont prises très au sérieux par les pilotes que nous avons
rencontrés. Les autorités algériennes concernées n'en pensent pas moins. Tout
devrait rentrer dans l'ordre dans les toutes prochaines semaines, a-t-on appris
contrairement à ce que nous ont dit certains navigants qui émettent des doutes.
Certains considèrent que la démarche européenne est une sorte de «déclaration
de guerre» à la compagnie aérienne nationale. Ils estiment que la parade est un
contrôle strict de tous les aéronefs de transport étrangers qui se posent sur
le sol algérien. Cela reviendrait simplement à appliquer la réciprocité. Les
Européens n'y verraient pas d'objection, pour peu que cela se fasse dans le
respect des normes et protocoles de l'IATA, l'organisation internationale de
l'aviation civile.
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Posté Le : 21/09/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Driss Oulis
Source : www.lequotidien-oran.com