Algérie - Kamel Kacher

Air Algérie et les autres : privatiser, non, déréguler



Par Kamel Kacher : Ex-Cadre supérieur à la direction de l’aviation civile et de la météorologie du ministère des transports, Manager coordinateur de projets du groupe français sofréavia et de la national aviation university en Ukraine, Conseiller international en organisation, Docteur ingénieur en Aéronautique.

 

«Pour qu’il y ait mauvaise gestion, il faut d’abord qu’il y ait gestion.»

DOK

 

Une compagnie aérienne, un aéroport aussi bien qu’un port ou toute autre infrastructure de transport est la première vitrine d’un pays, pas seulement par son aspect architectural et urbanistique, le plus moderne et le plus sophistiqué puisse-t-il être, mais surtout par son organisation et son système d’information, son accueil, sa qualité des services fournis, sa capacité d’être fluide.

L’aéronautique civile est un système vaste et complexe qui englobe le contrôle aérien, la politique aéroportuaire, la formation des personnels spécialisés, le suivi et le contrôle de l’exploitation des aéronefs. En Algérie, la période de reconstruction engendre des relations commerciales soutenues avec le monde et favorise le développement de liaisons régulières. Donc, le transport aérien devient une industrie avec des politiques commerciales et tarifaires, adaptables aux lois du marché. Les passagers deviennent des consommateurs exigeants d’un service, le transport aérien, qu’ils veulent, à juste titre, le plus sûr et le meilleur possible, d’une part. D’autre part, les aéroports sont devenus des villes où se concentrent toutes les activités de l’aviation civile. Elles s’y exercent dans le cadre d’une sûreté qui doit être inflexible pour les personnes et les biens et dans le respect de l’environnement. Sur l’ensemble de la zone aéroportuaire, et pas seulement dans l’aérogare, doit être organisé un contrôle nécessaire pour assurer la sécurité du passager. Cela suppose la coordination de toutes les administrations concernées.

Ce qui est vrai pour la sûreté des passagers l’est également pour celle du fret, même si le dispositif qui s’y rapporte est spécifique à cette activité. Pour cela, des mesures étudiées doivent être mises en place. Elles viseront à réduire les risques d’actes indélicats qui, entre le dépôt initial des marchandises et leur embarquement à bord des avions, pourraient mettre en cause la sécurité des vols.

La surveillance de l’entretien et de la maintenance du matériel volant (très coûteux), l’élaboration où l’adaptation de la réglementation technique, mais surtout sa stricte application ainsi que la formation des personnels spécialisés doivent impérativement figurer parmi les fonctions essentielles de l’Autorité de régulation de l’Aviation civile.

Le fondement numéro un de la sécurité est le contrôle. Le respect scrupuleux des consignes et des méthodes de travail font de l’avion le moyen de transport le plus sûr. Pour pouvoir exercer son activité, une compagnie aérienne doit posséder une licence de transporteur délivrée par le Ministère des Transports. Cette licence ne peut être obtenue que si le transporteur possède déjà un certificat de transport aérien émanant de l’Autorité de l’Aviation civile et qui atteste que sa structure et son organisation ont les moyens techniques et les compétences humaines qui correspondent bien aux critères de sécurité exigés par la réglementation, sa viabilité financière et son respect des normes techniques imposées. Mais aussi, tout transporteur doit faire approuver ses procédures d’entretien, déposer un manuel d’exploitation conforme à la réglementation et disposer d’un système qualité lui permettant de contrôler la conformité des procédures requises pour assurer une exploitation sûre de ses appareils.

Voilà des tâches qui peuvent être déléguées à une nouvelle entité, l’Autorité «de régulation et de contrôle de qualité des entreprises de transport aérien», sous l’égide du Ministère des Transports.

L’Etat doit prendre l’initiative pour remettre de l’ordre dans des secteurs névralgiques qui seront ouverts, tôt ou tard, aux capitaux privés.

La maintenance en ligne, les visites annuelles et la «grande visite», au cours de laquelle chaque avion est entièrement démonté, vérifié et réparé si nécessaire, est la procédure usuelle pour l’entretien des avions. Le suivi technique des aéronefs en service est une tâche essentielle pour garantir la sécurité. La sécurité est directement liée à la qualité professionnelle des personnels impliqués dans les opérations aériennes. Cette qualité professionnelle résulte elle-même d’une formation rigoureuse et appropriée. C’est pourquoi, il est impératif de penser à élaborer, adapter ou même adopter un système de formation et de contrôle des aptitudes à avoir un dispositif d’acquisition et de maintien des compétences. Il serait judicieux d’instituer une Académie des métiers aéronautiques, en partenariat, puisqu’il est louable de constater que les autorités publiques commencent à propager et utiliser les mécanismes du PPP et du BOT (Partenariat public privé et Build Operate Transfert, nda) dans différents secteurs économiques (SEAAL avec Suez, Unité de dessalement d’eau d’El-Hamma avec les Américains, la gestion déléguée de l’Aéroport international d’Alger avec ADPM, l’assistance en escale avec Swissport, etc.).

Sur le plan technique, les efforts de sécurité en matière de conception et d’entretien des avions ont abouti à une fiabilité remarquable des matériels aériens. Cependant, l’erreur humaine de l’équipage de conduite a été identifiée comme étant la cause déterminante de 70% des accidents survenus. L’amélioration de la sécurité passe donc nécessairement par une meilleure connaissance des capacités et des limites humaines (1). Les facteurs humains sont pris en compte lors de la conception des aéronefs (interface homme/machine, ou aspect ergonomique), dans leur utilisation (procédures et méthodes de travail) ainsi que dans la formation des personnels spécialisés. Ces facteurs permettent de comprendre les mécanismes qui altèrent les performances des personnels spécialisés, et particulièrement les pilotes.

Il serait aussi raisonnable et judicieux d’ajouter aux notions d’ergonomie et d’économie (souci de rentabilité), les notions d’environomie (interaction homme/environnement) et d’alteregonomie (2) (homme/homme, ou compatibilité psychologique), constatant les conséquences, parfois catastrophiques et préjudiciables, que peuvent causer la non-intégration de celles-ci dans la gestion courante.

Vu la nécessité de développer l’usage de l’avion en Algérie, l’Etat, en collaboration avec l’Autorité civile aéronautique, doit impérativement entamer un processus de libéralisation progressif du ciel algérien pour ne pas être un simple spectateur, mais un acteur principal de ce processus en supervisant l’activité qui, outre la réglementation, obéit désormais aussi aux lois du marché. Le souci d’ouverture de l’Algérie dans le secteur du transport aérien, de la gestion des infrastructures aéroportuaires et portuaires est un gage de progrès. Par contre, le risque pour notre transporteur national en sous-estimant les difficultés d’adaptation à cette nouvelle donne est de céder sa place et ses parts de marché aux compagnies aériennes accréditées en Algérie. Il faut le comprendre, ce processus est désormais irréversible.

Pour des raisons économiques mais aussi stratégiques, la compagnie Air Algérie doit chercher à intensifier les accords commerciaux. Ces partenariats nécessaires permettent au transporteur d’alimenter sa plate-forme de correspondances, d’étendre l’offre des destinations proposées. Dans ce cas-là, le nouvel Aéroport international d’Alger pourrait devenir sa plate-forme de correspondances régionales (HUB régional).

En parallèle, l’Autorité de l’aviation civile doit accompagner le développement d’Air Algérie et des entreprises aéroportuaires ainsi que des futures compagnies aériennes algériennes.

Veillant également au respect des règles de sécurité, c’est donc à l’Autorité que revient, en cas de manquements, le rôle de fixer le cadre juridique des sanctions applicables notamment aux infractions en matière de licences, d’obligation de service public, de programmation de vols et de tarifs. Pour exemple, une politique tarifaire efficace aurait pu permettre à Air Algérie, en concertation avec l’Autorité de l’aviation civile, une couverture et une compensation de la hausse des prix du carburant, permettant de baisser ses tarifs à l’instar de ses concurrents directs sans pénaliser les passagers. Il ne faut pas oublier aussi que Air Algérie est une compagnie autonome, appartenant à l’Etat avec obligation de service public. D’ailleurs, pour ses destinations non rentables, elle est compensée par le biais de subventions étatiques.

L’autre exemple concerne le respect de la programmation: alors que la majorité des compagnies aériennes étrangères accréditées en Algérie déclarent un taux de ponctualité bien supérieur à celui de leur réseau européen au départ d’Alger, Air Algérie, elle, accumule les retards et les annulations de vols à partir d’aéroports algériens !

Donc, au-delà des missions d’arbitrage, de réglementation, d’aide et de conseil que devrait faire l’Autorité de l’aviation civile, une autre tâche importante devrait consister à mener des études prospectives pour anticiper le paysage du transport aérien de demain et promouvoir son évolution.

Les défis d’avenir de l’aviation civile en Algérie sont de taille: prendre ou défendre ses parts de marché, motiver les équipes, tirer parti de la mondialisation, mettre à profit les nouvelles technologies, coopérer efficacement entre acteurs du transport aérien.

Air Algérie et les aéroports algériens doivent changer pour pouvoir répondre aux nouvelles attentes des clients et des passagers, transformer les comportements et la culture d’entreprise, adapter leur organisation. Ce changement ne peut être préparé que par la formulation des problématiques fondamentales, l’identification des facteurs clés de succès, la définition des objectifs à atteindre, l’analyse des écarts entre position actuelle et position souhaitée et de le mettre en oeuvre en agissant sur les leviers de celui-ci par la mobilisation des hommes, la refonte des structures, par l’amélioration des outils de gestion, des procédures, de la programmation des vols, de la gestion des approvisionnements et des stocks, par la mise en place d’outils de marketing et de communication, par le lancement de nouveaux services et produits, par l’adaptation des systèmes de contrôle et d’information, par la formation des cadres et dirigeants.

 

Notes :

 

1. CASH’AIR: Civil Aviation Security Human & Airwithness

Modèle mathématique, atténuant le risque humain en aviation

civile, formulé par l’auteur et déposé auprès de l’Organisation de l’Aviation civile internationale (OACI).

2. Environomia, Alteregonomia

Notions scientifiques formulées pour la première fois au monde par l’auteur.





Ce Monsieur KACHER doit être le Ministre des transports algériens.Au sus de ce qu'il écrit et aussi en faisant une recherche approfondie sur sa personnalité, son parcours professionnel et éducatif et vu son expérience internationale , il doit être ou au minimum P-DG d'Air ALGÉRIE ou plus. L'Algérie doit utiliser ce potentiel de compétence et de professionnalisme. Bravo pour l'article et l'analyse qui est faite, mais aussi pour les solutions préconisées.
benméziane - cadre supérieur au ministére des transports en retraite - allger, Algérie

28/04/2012 - 31287

Commentaires

bonjour kamel je vous dis félicitation, pour le comportement et la transformation de la cie c'est la dérive dans les autres dpt (hotelerie.fret.secueité interne(bsp) mnt dse, maintenance technic ) tous c'est dpt il faut la mobilisation des grosse téte qui vien en dehors de la cie qui on meme pas les capacité de gerer l'etablissements ou un organisme (voleurs)nb. commission =enquéte=audit( net). bonne féte .
julien cabrel - gestion comptabilité - annaba, Algérie

01/09/2010 - 6312

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