Bâtie entre le XVIe et XVIIIe siècles, Aïn Q’ciba, la casbah de Cherchell, dans la wilaya de Tipasa, une des plus anciennes médinas d’Algérie, affiche un visage serein, propre et bien entretenu sauf que l’aspect originel de cette vieille cité a été visiblement altéré. En effet, de vieilles maisons abandonnées se distinguent du reste des constructions.
Une virée à Aïn Q’ciba, diminutif de casbah en arabe, et ses ruelles étroites inondées par un soleil printanier qui accentue les couleurs vives et chaudes de ses maisons, donne l’illusion qu’il s’agit d’un site séculaire bien conservé, soustrait à l’usure du temps.
Mais le regard du visiteur est vite accroché par des maisons à l’évidence plus anciennes, aux portes et aux fenêtres cadenassées pour certaines, carrément murées pour d’autres, avant de se déporter sur une vieille maison au style mauresque marqué, coincée entre deux bâtisses neuves, dans un état de délabrement tel que son effondrement semble imminent.
Ce contraste urbain suscite beaucoup d’interrogations. Des Cherchellois expliquent que l’état dans lequel se trouvent certaines vieilles maisons est dû aux conflits entre héritiers qui préfèrent les laisser fermées, au risque de les voir s’écrouler...
A contrario, les bâtisses en bon état ont été agrandies soit encore restaurées par leurs propriétaires, chacun suivant ses goûts, disent ces mêmes personnes qui déplorent la perte d’originalité de la Q’ciba de Cherchell, à mesure que s’étendent les constructions nouvelles et les restaurations anarchiques de ses maisons.
L’absence de Aïn Q’ciba de la nomenclature du patrimoine national est pour beaucoup dans le comportement des propriétaires de maisons qui «font ce que bon leur semble : ils démolissent et reconstruisent à leur guise et dans le style qu’ils désirent», car aucune norme urbanistique n’est édictée, s’indignent d’anciens Cherchellois.
Il reste que la présence même de ces quelques vieilles demeures, malgré leur abandon et l’insulte du temps, atteste de l’authenticité de cette petite casbah qui dégage encore les senteurs des roses et du jasmin lorsqu’on la traverse.
A travers les formes des fenêtres et portes, la couleur, aujourd’hui défraîchie de leurs ornements, elles donnent un aperçu sur l’image originelle de l’ancienne médina, une des facettes de cette vieille cité côtière, par ailleurs riche de son passé romain.
Entre maisons fermées qui menacent ruine et les nouvelles constructions qui la défigurent, il est à craindre que Aïn Q’ciba ne disparaisse à jamais si des mesures résolues ne sont pas engagées, à commencer par son inscription au patrimoine national, affirment les spécialistes.
En attendant, quelques familles qui résident, toujours, dans la petite casbah de Cherchell tentent, bon an mal an, de protéger leurs maisons du risque d’effondrement, tout en mettant un point d’honneur à respecter le cachet historique et architectural du site.
Par leurs propres moyens, elles ont entrepris des travaux de restauration et de confortement, tout en conservant l’aspect originel des demeures dans le moindre détail, de l’extérieur comme de l’intérieur : colonnes de marbre, patio avec fontaine au milieu, céramiques, boiseries d’époque, etc.
Ces initiatives privées, louables qu’elles soient, restent en deçà des attentes des amoureux du patrimoine parmi les Cherchellois qui désespèrent de voir leur Q’ciba retrouver sa véritable image, telle que conçue par ses bâtisseurs.
R. E.
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Posté Le : 24/10/2014
Posté par : patrimoinealgerie
Source : algeriepatriotique.com