Anéantis par cette situation de léthargie qui les subordonne à une existence sans lendemain, les jeunes pensent à quitter leur village.
De Fellaoucene, le chef-lieu de la daïra, nous empruntons le chemin de wilaya 105 desservant au nord la RN 98 et au sud la ville de Maghnia. Un chemin trop étroit, parsemé de nids-de-poule et caractérisé par une succession de virages dangereux. Nous roulons une dizaine de kilomètres environ et nous arrivons au niveau d'une bifurcation. Un panneau indique la direction de Aïn Fettah. On s'engage dans la rue principale de la localité en direction du centre du chef- lieu. Une rue tapissée de goudron antédiluvien indique le fait que cette agglomération ressemble à s'y confondre à une contrée enclavée dans les fins fonds du bout du monde.
Les jeunes rassemblés dans des cafés ou enchaînés aux trottoirs de désœuvrement est un indice qui ne trompe pas. Le chômage et le mal vivre font des ravages dans cette localité. «Nous manquons de tout», soupire un jeune, «nous n'avons pas de travail; notre commune manque cruellement de structures adaptées nous permettant de voir l'avenir autrement… enfin à part la rue qui nous offre un espace propice pour nous rencontrer, nous amuser et rêver nous n'avons rien d'autre». Nos jeunes interlocuteurs, anéantis par cette situation de léthargie qui les subordonne à une existence sans lendemain n'ont qu'une idée en tête : quitter leur village.
En effet, cette population juvénile pétillante de santé et qui a énormément de potentialités continue d'entretenir son espoir et de combiner mille et un plans pour partir ailleurs. En attendant, et pour s'extirper ne serait-ce que momentanément de l'uniformité d'un quotidien ennuyeux, les jeunes se rabattent sur la consommation de l'alcool et de la drogue. Aïn Fettah, connue aussi sous le nom de Boutrak, qui a payé un lourd tribut à la guerre de libération et qui n'a pas été épargnée par les affres du terrorisme vit dans le dénuement le plus total. Cette agglomération de 8000 âmes qui s'est hissée au rang de commune en 1984, une réhabilitation qui demeure peu valorisante au regard des citoyens, n'a pas apporté les changements escomptés.
Si en matière d'accès à l'eau potable et au gaz de ville, la commune a connu une nette amélioration il n'en demeure pas moins que ce n'est pas le cas pour d'autres secteurs aussi importants les uns que les autres. À commencer par le transport scolaire qui accuse un déficit indéniable dans cette commune.
70% de la population écolière nécessite le transport scolaire alors que la commune ne dispose que de 4 minibus de 25 places chacun. Pour permettre aux écoliers, collégiens et lycéens de rejoindre leurs établissements scolaires à l'heure, le ramassage scolaire débute très tôt le matin vers six heures. Le ramassage scolaire commence à Sidi Ali Benzemra un hameau situé à 10km du chef-lieu de la commune. Les écoliers dudit hameau rejoignent leur école à Lahmara, et ce n'est pas exagéré, à 6h30 du matin. Ensuite, le minibus prendra en charge les collégiens de Lahmara pour les déposer vers 7 heures au CEM situé au chef-lieu de la commune où il embarque les lycéens, pour les ramener à leur établissement à Fellaoucen chef-lieu de la daïra. La même rotation mais en sens inverse se fait à la fin des cours.
Une réhabilitation peu valorisante
Du coup les enfants de Sid Ali Benzemra regagnent leur foyer au crépuscule. Ceux d'Ouled Belahcene vivent le même calvaire. En matière de santé, les infrastructures existantes, 4 salles de soins dépourvues d'un équipement adéquat, ne sont plus en mesure de prendre en charge les besoins médicaux de la population.
Le secteur de la santé dans cette commune ne dispose même pas d'une ambulance pour l'évacuation des malades vers l'hôpital le plus proche notamment pour les accouchements surtout quand celles ci surviennent la nuit. Boutrak est aussi confrontée à un sérieux problème de transport public. Le transport public est assuré par des transporteurs collectifs qui font seulement la navette entre Aïn fettah et Maghnia.
Pour se rendre au chef-lieu de la wilaya les citoyens doivent transiter par Maghnia sinon parcourir une distance de 6 km à pied pour regagner la RN35. Le local abritant les services d'Algérie poste, un cagibi de 12 m3, présente une exigüité accrue, au point d'être constamment submergé par l'afflux des usagers. Les citoyens, qui s'y rendent quotidiennement pours diverses prestations, sont le plus souvent astreints à de longues heures d'attente, avant de pouvoir accéder aux guichets. L'agriculture, un secteur vital qui s'érige contre le fléau du chômage dans cette commune à vocation agricole, n'est pas mieux lotie. En dépit du retour en force des agriculteurs vers leurs terres, abandonnées durant la décennie noire, nombreux parmi eux, sont ceux qui nous ont exprimé leur mécontentement quant au retard accusé dans l'électrification de leurs douars.
L'absence des retenues collinaires pour l'irrigation et un autre problème auquel sont confrontés les agriculteurs locaux. En somme, malgré la volonté des autorités locales qui déploient tous leurs moyens pour améliorer un tan soi peu le cadre de vie des citoyens, la commune de Aïn Fettah reste à la traïne en matière de développement.
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Posté Le : 26/03/2017
Posté par : tlemcen2011
Ecrit par : O E B -
Source : Publié dans El Watan