Algérie

Ahmed Ben Bella, un homme, une histoire: D'anciens militants du MDA racontent



Les anciens militants d'Ahmed Ben Bella émettent le vœu que l'hommage rendu par Bouteflika au défunt soit complété par la réhabilitation de son parti, le Mouvement pour la démocratie en Algérie (MDA) dissous par

une loi jugée scélérate.

Rencontré au lendemain du faire-part du décès de leur père spirituel, des anciens militants du MDA avaient arrêté de pleurer dès notre arrivée parmi eux, probablement par pudeur «culturelle» qui voudrait qu'un homme ne doit pas pleurer devant une femme. Pourtant, leurs larmes ont été bien chaudes au regard de leurs yeux rougis et de leurs traits tirés par une profonde tristesse. Leur appel à la réhabilitation du MDA a été encouragé par la grandeur de l'hommage que Bouteflika a rendu au président défunt, Ahmed Ben Bella. « On ne s'y attendait pas, bien qu'on se dit que la république lui doit bien cet honneur ! », a lâché un de ses proches militants. Hafidh Ouadhah a fait partie en 1990 du Comité national pour le retour du président Ahmed Ben Bella (CNRABB). Il se rappelle pratiquement au détail près les péripéties de la préparation de ce retour encouragé par «l'ouverture démocratique» annoncée à l'époque par le président Chadli Bendjedid.

Mais avant, il serait intéressant de rappeler comment le pouvoir d'alors avait décidé d'interrompre l'histoire nationale de Ben Bella «pour des considérations d'ordre autocratique et des intérêts personnels étroits». Une histoire que les populations notamment celles de l'ouest du pays qui l'ont vu grandir retiennent sur fond de regrets indélébiles. Entre autres habitants, ceux d'Orléansville à l'époque (El Asnam avant le séisme de 1980, aujourd'hui Chlef) se rappellent l'arrivée parmi eux de la sœur de Ben Bella dont le mari venait d'y être assigné à résidence par les autorités coloniales françaises. Cheikh Mimoun a été renvoyé de Maghnia où il résidait vers Orléansville parce qu'il s'était investi totalement dans les rangs du PPA (Parti du peuple algérien). L'Oranie connaissait déjà bien Ben Bella ne serait-ce que pour avoir été celui qui a perpétré un attentat contre la poste d'Oran pour procurer de l'argent à la révolution algérienne.

AFFECTUEUSEMENT «HMIMED»

Les gens de l'ouest du pays l'appelaient affectueusement Hmimed. Accueillis les bras ouverts par les Orléansvillois, Hiba et son époux ont construit durant leur séjour forcé de sincères amitiés. «Il était fiancé à sa cousine, mais il y a renoncé en nous disant ne pensez plus à cela, je suis marié avec la révolution, je n'aurai une épouse qu'après que j'aurai réussi avec mes compagnons à faire sortir la France de notre pays», racontait Hiba aux femmes qui voulaient savoir que faisait Hmimed de sa vie.

Les moudjahidine et ses militants lui retiennent à ce jour qu'il s'était interposé « physiquement » entre ceux qui ont fait la révolution à l'intérieur et l'armée des frontières qui se sont entretués pour faire valoir selon les premiers «la primauté de l'intérieur sur l'extérieur» et «du politique sur le militaire» Ses militants nous ont rappelé jeudi dernier que «de Tlemcen où il résidait, Ben Bella avait pris l'hélicoptère et s'est dirigé du côté de Médéa pour discuter avec les chefs des wilayas historiques alors que les armes crépitaient de tous les côtés». Les affrontements entre militaires et civils font rage au lendemain de l'indépendance et font plus de 1000 morts. Boumediene était, selon nos interlocuteurs, prêt à faire avancer les chars en cas d'échec de la médiation. «C'est Ben Bella qui a réussi à sauver le pays de la fitna qui a poussé les Algériens à s'entretuer entre eux», nous affirment des moudjahidine.

Institué président de l'Algérie indépendante dès 1962 sur décision de l'armée des frontières avec à sa tête Houari Boumediene après que ce dernier eut évincé Benyoucef Benkhada et le GPRA (Gouvernement provisoire de la République algérienne) qu'il présidait en remplacement de Ferhat Abbas, Ben Bella ne savait pas qu'il allait subir le même sort peu de temps après sous le motif qu' «il avait dévié la révolution de son cours».

UNE NAÏVETE A FRISER L'INCONSCIENCE

L'euphorie d'une indépendance acquise au prix fort de la déchirure de toute une Nation aidant, le président de la République voulait faire très vite pour reconstruire ce qui a été détruit par l'une des plus puissantes forces coloniales de l'époque. Au risque d'être incompris, de faire des erreurs et de se laisser entraîner par des courants idéologiques et politiques qui le poussaient jusqu'à confondre le rêve et la réalité. Il avait surtout confiance en lui-même et s'était bardé d'une assurance telle que ses proches collaborateurs voyaient en lui «le responsable dont la naïveté frisait l'inconscience».

Le 28 juin 1965, l'Algérie se préparait à abriter la conférence afro-asiatique des non-alignés à laquelle un nombre important de chefs d'Etat étrangers devaient y assister. L'anecdote de ceux qui ont vécu cette période rappelle que la SNTA (Société nationale des tabacs et allumettes) avait « sorti » de nouvelles cigarettes appelées « Afras » en référence à l'événement.

 Au-delà de l'agitation qu'avait nécessitée la préparation de la conférence prévue, en parallèle, les signes de «quelque chose d'autre beaucoup plus grave qui allait se passer» se faisaient voyants. Il y a eu un changement à la tête de la DGSN (Direction nationale de la sûreté nationale). Le 5 juin 1965, Draria qui dirigeait le Corps national de sécurité (CNS) avait remplacé El Ouacine Yadi à la tête de la DGSN, sur proposition dit-on du ministre de la Défense, Houari Boumediene. Ce changement répondait aux appréhensions que nourrissait Boumediene et ses proches collaborateurs à l'égard de Ben Bella. Ils avaient eux aussi senti le vent tourner dès que le président Ben Bella avait entrepris des changements au niveau de son gouvernement où Abdelaziz Bouteflika avait le portefeuille de ministre des Affaires étrangères. Ben Bella avait commencé par limoger Ahmed Moulay Medeghri qui détenait le ministère de l'Intérieur dont Daho Ould Kablia en était le secrétaire général. Dans la même période, l'armée que dirigeait Houari Boumediene alors ministre de la Défense, avait désarmé la police en commençant par le plus gros de ses troupes (plus de 800 agents) qui étaient à l'école de Tlemcen.

PRELUDES D'UN COUP D'ETAT

Considérés par le pouvoir militaire de l'époque de « benbellistes » convaincus, les policiers devaient bénéficier d'une formation avec l'aide des Allemands et des Egyptiens pour devenir, disent nos interlocuteurs, «un grand corps d'élite». La formation devait leur être assurée par les soins de l'Algérien Bastandji, formateur des formateurs des grands officiers. Ces mêmes policiers ont été ramené de Tlemcen vers Alger, précisément à ce qui est appelé communément le CATI à Hydra, pour assister à l'installation par Ben Bella de Draria à la tête de la DGSN.

Connu pour avoir soigné les moudjahidine dans ses hôpitaux ambulants, le Dr Mohamed- Seghir Nekkache alors ministre de la Santé dans le gouvernement Ben Bella sentait véritablement le danger venir. «Nekkache n'a pas été seulement ce médecin qui soignait les blessés de la guerre mais il a été surtout l'homme du renseignement de l'ALN», précise nos interlocuteurs qui rappellent en même temps qu'il a été membre du MTLD (Mouvement des libertés démocratiques) et plus tard de l'OS (Organisation secrète). Rompu à la mission du renseignement, Nekkache préparait la brigade spéciale chargée de la sécurité du président Ben Bella, que dirigeait Hamadache. «La tête pensante qu'était Dr Nekkache réfléchissait à comment faire fléchir le régime des frontières», disent les militants. « Le clan benbelliste voulait instaurer un Etat civil en écartant les armées des frontières Est et Ouest, celle de l'Est connue sous le nom de l'armée du bec de canard au regard de la morphologie de la région tunisienne à partir de laquelle elle opérait et dont Chadli Bendjedid en était membre et celle de l'Ouest constituée par le clan d'Oujda dirigée par Boumediene.

Coincée entre les armées des frontières, les Algériens militaires évadés de l'armée française après le début des négociations avec la France en juin 1960, qu'on appelait les enfants de la DAF (Direction de l'action française), ceux qui avaient mûri après avoir été les étudiants qui avaient refusé de rejoindre le maquis en 1956 et qu'on appelait « la promotion Lacoste », les politiques-civils de l'intérieur et de l'extérieur, l'Algérie vivait des moments pénibles et douloureux dont elle en subit les conséquences à ce jour.

Bien que le malaise ait pris une ampleur inquiétante, le président Ben Bella continuait de se déplacer à travers le pays. Beaucoup de ses proches lui avaient pourtant susurré que la situation va se retourner contre lui. Son dernier déplacement fut à Oran où il a assisté le 17 juin 1965 à un match de football entre l'équipe nationale et l'équipe brésilienne.

LE RAPPROCHEMENT DES HISTORIQUES

Il est cependant affirmé que ce qui a fait précipiter le coup d'Etat était, disent les militants, « cet acte politique fort qui a été cet accord scellé entre le FLN et le FFS le 16 juin 1965 reconnaissant ainsi ce parti comme parti d'opposition et par conséquent acceptation de la présidence de la République du principe du multipartisme ». En plus d'être président de la République, Ben Bella était aussi secrétaire général du FLN et Aït Ahmed l'était pour le FFS. « Ce rapprochement entre deux historiques a été transmis comme un message aux autres compagnons comme Krim Belkacem, Khider, Boudiaf pour qu'ils rentrent au pays et participer au changement », notent-ils. Pour eux, c'est le plus bel acte entrepris par Ben Bella pour consacrer la réconciliation nationale entre les historiques de la révolution. Réconciliation qui devait être annoncée officiellement en juillet 1965 au cours de la tenue à Alger de la conférence islamique. Le chef d'état-major, ministre de la Défense d'alors ne le voyait pas de cet œil. Le 19 juin, il envoya des policiers déguisés en civil pour mettre aux arrêts Ben Bella qui se trouvait dans son petit logis de deux pièces de la villa Jolie, la bâtisse qui abrite la Banque d'Algérie et qui fait face au Palais du peuple par lequel le défunt a été sorti vendredi dernier pour rejoindre sa dernière demeure au cimetière d'El Alia.

Des manifestations ont été organisées à travers le pays pour dénoncer le coup d'Etat dont les plus importantes ont été à Annaba. Les contestataires annabis ont été dirigés vers la caserne de la ville pour leur avait-on dit être protégés. Une fois entrés, ils furent accueillis par des balles de mitrailleuses qui les ont tués sur le coup. La caserne a été rasée pour ne pas être comptée parmi les lieux lugubres du pouvoir. L'UNEA avait réagi fortement contre le coup d'Etat mais son président - Mouafak - l'avait payé cher en ayant été torturé à mort par les agents de la sécurité militaire.

«IL EST SOUS MES PIEDS»

Ben Bella fut mis aux arrêts et jeté menotté dans une cave sur les hauteurs des Tagarins, siège du ministère de la Défense. De Gaulle, alors président de la France, avait envoyé un émissaire pour s'enquérir, dit-on, de la sécurité du président déchu. «Il est sous mes pieds», avait répondu Boumediene en frappant du talon de sa chaussure sur le sol de son bureau. Il sera transféré dans un lieu secret, la caserne de Holden du côté de Douera, disent certains.

C'est alors que commencera le règne de l'armée sur le politique. «C'est le coup d'Etat qui a placé l'armée au pouvoir pour une affaire personnelle», pensent les Benbellistes.

Ben Bella restera emprisonné dans cette caserne de 1965 à 1979. Il s'y mariera même en 1973 avec une journaliste de Révolution Africaine, Zohra, décédée il y un peu plus de deux ans. Après sa libération, Ben Bella disait à ses compagnons qu'il a été profondément affecté par «une chose ignoble, la caméra qui a été placée dans sa cellule de prison pour filmer son intimité avec son épouse». Avant d'être marié, Ben Bella a, selon ses compagnons, passé 4 à 5 ans à taper dans un ballon contre le mur de sa cellule. Il avait devant sa porte un capitaine qui ne quittait pas les lieux et un grand nombre d'agents de la sécurité militaire qui montaient la garde devant et dans les alentours de la caserne où il était emprisonné. Il sera libéré de cet enfer à l'arrivée de Chadli à la tête de la présidence. L'on dit qu'une fois libéré, le capitaine qui le surveillait a perdu la raison. Boumediene avait promis de faire paraître un livre blanc dans lequel il sera expliqué pourquoi a-t-il déchu Ben Bella. Livre qui n'a jamais vu le jour. Par contre, les intellectuels déçus se délecteront plus tard dans les années 70 de la lecture «Des nuits folles d'Alger» dont le contenu sur la folie des hommes du pouvoir se passe de commentaire.

Comme sa libération rencontrera beaucoup d'opposition dans les rangs des services et de l'armée, Chadli l'assignera à résidence à M'sila de 1980 à 1989. «Sa femme, une fois sortie et de retour, ainsi que ses amis qui lui rendaient visite comme Nekkache et Benouda Ouadhah étaient fouillés au corps d'une manière brusque et immorale», témoignent ses proches. Les citoyens qui voulaient le rencontrer étaient arrêtés au rond-point de la ville, leurs papiers d'identité retirés, et interrogés dans les commissariats à leur retour dans leur ville d'origine.

L'AFFECTION ET LE RESPECT DU PRESIDENT CHADLI

Il regagna Alger en 89 où il sera logé dans l'ancienne villa du maire français de Saint-Eugène. Il continuera tout autant que sa famille et ses amis à subir les affres de l'espionnage et les intimidations par les services de sécurité. Ben Bella demande alors à Chadli un passeport pour aller à la Mecque accompagné de sa femme, de Nekkache et d'autres amis. Il se rendra compte que le président Chadli avait beaucoup de respect et d'affection pour lui. Ses militants en parlent à ce jour. Avant le grand départ, il rendra visite à Benyoucef Benkhedda et à Hadj Lakhdar à Batna. Il décide de ne pas revenir au pays en raison des problèmes que lui créent les services de sécurité. Il voguera à travers plusieurs pays arabes pour enfin s'installer en France. L'émigration commençait à prendre goût à ses idées. Il n'est donc pas au bout de ses peines quand de retour dans son appartement français, il constate que les lieux ont été visités et que des documents ont été pris. Il en a déduit que les services français sous Mitterrand étaient de connivence avec les services algériens pour l'empêcher de vivre tranquillement. Il rejoint Genève où il s'exilera jusqu'en 1990, année où il décide de retourner au pays après «l'ouverture démocratique» annoncée par Chadli. Le CNRABB se chargera de préparer son retour. Il prendra, en compagnie de 260 personnes «ses amis de la révolution», un avion de Genève pour Barcelone. L'Algérie avait fait rénover le bateau «Le Hoggar» à Marseille pour lui permettre de rejoindre Alger. Il embarquera en septembre à partir de Barcelone à son bord avec près de 1.000 personnes, ses amis de plusieurs pays. Le bateau a été, avant, inspecté par des hommes grenouilles espagnols. «La traversée a été splendide, joyeuse, magnifique», nous dit Hadidh Ouadhah qui l'a accompagné. Il avait avec lui les membres du MDA qui activaient dans plusieurs capitales européennes dont Paris. Mohamed Benelhadj nous rappelle que le MDA a été créé en 1981 à Paris. Il s'impose un flash-back. «Mais avant, il y a eu des comités de soutien pour le président Ben Bella qui activaient comme un parti politique», précise-t-il. En 1981, Ben Bella a rencontré Aït Ahmed en marge de la conférence islamique sur les droits de l'Homme qui s'est tenue à l'Unesco. «C'était la 1ère fois que Ben Bella revoyait Aït Ahmed après l'arrestation de ce dernier suite aux maquis du FFS en 1963», explique Benelhadj.

L'ALLIANCE QUI A FAIT PEUR AU POUVOIR

Ce militant du MDA affirme que «c'est à cette même année que des contacts sérieux ont été entrepris entre Ben Bella, Bouteflika, Yahiaoui, Bencherif et d'autres responsables». Plus de 40 militants ont dissuadé Ben Bella «de ne pas aller vers ces personnes qui ont précipité sa chute». Il n'en fera pas cas même quand Benelhadj dit: «On lui dit que le MDA est truffé de taupes des services et qu'ils veulent sa fin». En novembre 88, notre interlocuteur raconte que ces 40 militants ont été rapatriés de Paris vers Alger pour dénoncer les agissements de Ben Bella. Dans un discours d'orientation à ses militants, Ben Bella leur avait suggéré de ne pas trop croire aux histoires de taupes des services et d'œuvrer à structurer le MDA». Parce que moi, leur a-t-il dit, «mon rôle dépasse l'Algérie, je me mets à la disposition des causes justes à travers le monde, en premier la cause palestinienne». Il a rencontré Mohamed Harbi, Hocine Zehouane qui était à la tête de l'Organisation de la résistance populaire (ORP), Mohamed Boudia qui a été assassiné par les Israéliens. Avant, il s'entretenait longuement avec Djilali Liabès, Mohamed Bahloul, Houari Addi, des intellectuels qu'il appréciait beaucoup. Dans sa réunion avec ses militants dans la mosquée qu'il avait faite construire à Mantes La Jolie en banlieue parisienne et que présidait le fils Benbarka, Ben Bella s'interrogeait sur le sort à donner au MDA. Les 30 et 31 mai 1984, le parti tient son congrès constitutif dans l'Oise, dans le château de Montvillagene (Chantilly), où a séjourné l'Emir Abdelkader et près de Gouvieux où avait vécu Messali Hadj. «Le choix du lieu n'est pas fortuit, Ben Bella cherchait le symbole de filiation», estime Benelhadj. En décembre 1985, Ben Bella et Aït Ahmed se revoient à Londres pour conclure un accord entre le MDA et le FLN. Il fallait éditer un journal –El Badil-digne de cette alliance pour laquelle Aït Ahmed a beaucoup fait et accepté que son parti ait un journal qui la consolide. Ce fut Libre Algérie dont le rédacteur en chef était l'avocat Ali Mecili aux côtés de Tarik Mira, Ramdhan Saadi (frère de Saïd Saadi) en plus d'autres militants du MDA et du FFS. Mecili fut assassiné à Paris en 1987. Benelhadj fait savoir qu'El Badil fut arrêté de parution par les services de Charles Pasqua alors ministre français de l'Intérieur. «C'est l'hommage du vice à la vertu pour lequel sans doute le marché algérien, ouvert tel un bazar aux appétits étrangers, valait bien que l'on écrase quelques prétendus principes démocratiques», pense-t-il. Plusieurs autres titres ont remplacé El Badil dont la Tribune d'Octobre mais tous ont fini par disparaître. Le Hoggar arrive au port d'Alger sous les acclamations des milliers d'Algériens venus accueillir Ben Bella. Ce retour avait été jugé «prématuré» par la direction parisienne du MDA avec à sa tête Benelhadj. «Nous ne connaissions pas la réalité algérienne mais comme il était notre président, nous nous sommes inclinés et définitivement écartés du parti», avoue-t-il. Dix jours après son retour, Ben Bella est allé discrètement se recueillir sur la tombe de ses compagnons de lutte à El Alia. Il a prononcé la Fatiha aussi sur la tombe de Boumediene. «Je lui ai pardonné pour ce tout ce qu'il m'a fait endurer», avait-il dit à Ouadhah qui l'avait accompagné avec seulement le chauffeur et un garde du corps.

«SI VOUS AVEZ PLUS DE 80 SIEGES, LES CHARS VONT SORTIR DANS LES RUES»

En 1991, Ben Bella s'est mis autour d'une table avec les dirigeants des partis de l'époque comme le FFS, le FIS, le RCD, le PRA et bien d'autres pour discuter des élections. «Si vous aurez plus de 80 sièges, les chars vont sortir dans les rues», avait-il prévenu les responsables du FIS. «Ben Bella voulait discuter de quotas pour donner les premiers ancrages à la démocratie tout en assurant ses équilibres», nous dit Ouadhah. Le FIS voulait une majorité absolue. «Ben Bella qui pensait que la démocratie avait besoin de patience lui a dit qu'il ne faut jamais faire peur au pouvoir, il réagira violemment», continue Ouadhah. La suite des événements est connue.

A l'arrivée de Boudiaf à la tête du HCE, Ben Bella est allé le voir pour, entre autres, lui conseiller de ne pas se rendre au Maroc pour le mariage de son fils. «Tu es président aujourd'hui, tu ne peux aller au Maroc comme ça… », lui avait-il dit. «Il est têtu, il veut absolument partir», a dit Ben Bella à ses amis à propos du refus qu'il a essuyé de Boudiaf après 4 heures d'entretien. Là aussi, la suite est connue.

 Ben Bella retournera vivre à Genève. Il recevra Bouteflika en 99. «Il est venu me voir pour me dire qu'il a été choisi pour être président. Je lui ai dit, mon fils (ouldi), si tu as toutes les prérogatives, accepte l'offre mais si on ne te les donnes pas, refuse parce qu'on te fera comme on m'a fait», racontait Ben Bella en 2005 à Tlemcen lorsque Bouteflika l'a fait Docteur Honoris Causa. Ben Bella reviendra à Alger dès l'élection de Bouteflika à la première présidentielle. Il y restera jusqu'à sa mort, mercredi dernier, pour reposer aux côtés de ses compagnons pour «le mal et pour le pire». Venu à la rédaction hier, l'un de ces militants de la première heure, Hocine Guermouche, a tenu à nous raconter des anecdotes qui confirment la grandeur de l'Homme, son amour du pardon et sa dimension humaine et humaniste. «Ben Bella nous avait appelés pour soutenir la campagne pour la concorde civile et aussi pour la réconciliation nationale», rappelle d'ailleurs Ouadhah. «Nous avons mené une importante campagne en France pour la réconciliation nationale avec à mes côtés Benelhadj et l'actuel ministre de la Jeunesse, El Hachemi Djiar», ajoute-il. Interrogé sur ce qu'il pensait de l'appel des militants pour un retour du MDA, Hocine Guermouche nous dira «pourquoi faire? Que reste-t-il du MDA? Le MDA sans Ben Bella n'est rien».




bjr - ce tte page d'histoire est forte interessante et je vous remercie - je souhaiterai que ceu qui ont connu le mda de l'eil et puis du retour qu'ils se joignent dans ce site pour évoquer et clarifier cette période quand le mda se faisait gérer par les taupes - bon courage
bouabdellah medjahed - artisan - paris, Algérie

16/06/2012 - 34233

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