Obama a limogé le commandant en chef des troupes alliées en Afghanistan après ses insultes parues dans le Rolling Stone. Les talibans, indifférents, affirment qu'ils continueront à combattre.
C'est certainement l'un des choix les plus décisifs et les plus spectaculaires pris par Barack Obama au cours de sa jeune présidence. Le président américain limoge le commandant en chef des forces de l'OTAN en Afghanistan, le général Stanley McChrystal. M. Obama a jugé que les remarques faites à la presse par le général et son équipe rapprochée violaient un principe constitutionnel fondamental : la prééminence du pouvoir civil sur les militaires. Dans un reportage publié par le mensuel américain le Rolling Stone, le général et ses collaborateurs multiplient les remarques désobligeantes sur l'ambassadeur américain à Kaboul, l'envoyé spécial du département d'Etat pour l'Afghanistan et le Pakistan, le chef du Conseil national de sécurité à la Maison-Blanche, parmi quelques autres.Le ton d'ensemble est celui d'un mépris ouvertement affiché pour l'« échelon civil » dans la chaîne de commandement. Selon les propos retranscrits dans l'article, le général McChrystal et ses adjoints se sont aussi moqués du vice-président Joe Biden, connu pour son scepticisme face à sa stratégie en Afghanistan. Le limogeage du général reflète le fiasco qui se dégage, jour après jour, de cette interminable guerre d'Afghanistan (déjà huit ans et demi de combats). Avec Stanley McChrystal, c'est un homme-clé qui s'en va. En poste depuis tout juste un an, il est l'auteur de la doctrine militaire aujourd'hui appliquée en Afghanistan : amener des renforts (le « surgé ») pour chasser l'insurrection islamiste talibane du sud du pays, puis rester sur le terrain afin d'y garantir la sécurité et offrir un début d'administration économique et sociale aux populations concernées.Cette doctrine est unanimement soutenue par les alliés des Etats-Unis en Afghanistan, longtemps mal à l'aise avec le « tout militaire » lourdement appliqué par l'armée américaine. Elle est aussi approuvée par le chef de l'Etat afghan, Hamid Karzaï, un homme au comportement erratique et aux relations douteuses, mais avec lequel le général McChrystal était l'un des rares à entretenir une relation de confiance.Le mois le plus meurtrierLe moment où intervient cette démission n'est pas le fruit du hasard. Alors que la doctrine McChrystal est testée dans la région de Marjah, dans le Sud, le mois de juin s'est avéré le plus meurtrier pour les quelque 142 000 soldats étrangers déployés en Afghanistan : 79 morts en trois semaines. Et ce chiffre vient rappeler l'immense difficulté et le peu de succès de l'OTAN, depuis 2001, en cette terre d'Asie centrale où se sont brisées les précédentes interventions extérieures. Le général McChrystal sera remplacé par le général David Petraeus, un soldat très expérimenté, actuellement commandant des forces américaines en Irak et en Afghanistan. « Il s'agit d'un changement d'homme mais pas de politique », a souligné M. Obama.Cette décision a été prise « à regret, mais avec certitude », selon les propres mots du président américain. Le Washington Post raconte les dessous de cette révocation, décidée moins de deux jours après la divulgation des propos de Stanley McChrystal. « Pendant trente-six heures, Obama a flirté avec une réponse à la Jimmy Carter ' exprimer sa colère en paroles, mais pas en actes ' avant de finalement opter pour une action résolue », explique le quotidien. « J'accepte le débat au sein de mon équipe, mais je ne tolère pas la division », s'est justifié Barack Obama. Le président afghan, Hamid Karzaï, qui avait manifesté son soutien au général McChrystal, respecte la décision de M. Obama, a annoncé son porte-parole, saluant en David Petraeus un « général expérimenté ».Agé de 57 ans, ce général quatre étoiles est considéré comme l'artisan de la stratégie gagnante des Etats-Unis en Irak. Pourtant, il ne fait pas peur aux talibans. Ces derniers ont annoncé qu'ils étaient indifférents au limogeage du chef des forces internationales en Afghanistan et qu'ils continueront à combattre jusqu'au départ des troupes étrangères. « On se moque de savoir qui commande, McChrystal ou Petraeus. Notre position est claire. Nous combattrons les envahisseurs jusqu'à leur départ », a déclaré, à l'AFP, Yousuf Ahmadi, un porte-parole régulier du commandement taliban, qui a contacté l'agence française par téléphone depuis un endroit inconnu. C'est que la situation que va trouver Petraeus n'est pas rassurante. L'insurrection talibane ne paraît pas sur le recul. L'opération Marjah-Kandahar, laboratoire de la guerre, ne semble pas satisfaisante. Hamid Karzaï tarde à nouer un dialogue politique avec les talibans. Et l'opinion publique internationale semble de plus en plus pressée, elle veut une stratégie de sortie et des signes de succès. Ces derniers ne sont toujours pas à l'ordre du jour en Afghanistan.
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Posté Le : 25/06/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Ahmed Tazir
Source : www.elwatan.com