Algérie

Actions en référé intentées contre la commune d'Oran: Débit d'office de 97 milliards au profit des concessionnaires privés



En pleine crise financière, la commune d'Oran, peu de temps après avoir dû s'acquitter bon gré mal gré d'un montant global de 29 milliards de créances en exécution de décisions judiciaires, a reçu un autre coup dur : 97 milliards de débits d'office à partir de son compte au profit des concessionnaires privés faisant dans la collecte de déchets.C'est le wali qui a dévoilé ce fait fâcheux lors d'un récent conseil exécutif consacré au nouveau schéma directeur de gestion des déchets ménagers et assimilés dans la commune d'Oran. «Il y a fort à parier que ces concessionnaires ont été tuyautés par des enfants de la maison (des gestionnaires communaux, en l'occurrence) qui leur ont montré le chemin à suivre pour avoir leur argent. Il y a l'odeur de la traîtrise dans cette histoire en tout cas», a soupçonné le chef de wilaya. 97 milliards, soit 30% du BP communal, «siphonnés» du compte de la collectivité en l'espace de neuf mois. En douceur. A l'APC, au service juridique précisément, on ne compte plus le nombre de batailles judiciaires perdues. En règle générale, le débit d'office est effectué, pour la plupart des cas, quand l'APC engage une dépense à travers des consultations ou par délivrance d'un bon de commande -c'est le cas des fameux concessionnaires propriétaires de bennes tasseuses- ou d'un avenant, avant qu'elle ne soit visée par le contrôleur financier (CF).
QUI A DONNE LE TUYAU À QUI '
Si certains agissent sous le sceau de l'urgence, d'autres sont mus par des objectifs inavoués. Une fois «le service fait», les entreprises ou le prestataire ne sont pas payés et sont contraints de recourir à la justice. Et pas besoin de rappeler qu'on paie beaucoup plus qu'on en doit réellement lorsqu'on est invité à le faire par voie d'amputation sur compte ou par voie d'huissier de justice, avec les dommages et intérêts qui vont avec. Et là se pose la question, dans le cas des 29 milliards de créances en tout cas, de savoir s'il était dans l'intérêt de la commune de laisser des contentieux sans règlement jusqu'à se retrouver à les défendre, bon gré mal gré, devant le tribunal administratif, et les perdre finalement, avec en sus les honoraires d'avocats et les frais de justice sur le dos. Le département juridique de la commune ne doit-il pas avoir assez de clairvoyance et de discernement pour conseiller à l'APC d'éviter d'aller vers une affaire «perdue d'avance» et recourir à un arrangement, mauvais soit-il, qui vaut mieux qu'un (bon) procès.
MAIS LES CONSEILLEURS NE SONT PAS LES PAYEURS
Autant dire que le wali sait de quoi il en retourne lorsqu'il parle d'odeur de la traitrise. Mais d'autre part, mise à mal par des conventions «public-public » qui lui pompent la trésorerie en contrepartie de services surfacturés, l'APC n'en peut plus aujourd'hui, elle qui peine à couvrir même sa propre masse salariale. Or, la solution au problème -c'en est un à l'heure actuelle- ne doit pas être radicale, en effaçant tout, en optant pour la résiliation -si tant est que cela soit pratiquement faisable- qu'elles qu'en soient la forme et la voie. La démarche de la commune n'a pas pour vocation d'annihiler ce partenariat, qui lui a été d'ailleurs imposé par cette même tutelle autoritariste qui a usé des moyens communaux pour le sevrage d'entités créées « ex-nihilo », mais a pour but d'en rationaliser l'impact financier. Et il est devenu handicapant celui-là pour la bonne marche de la commune d'Oran à en juger du poids des dettes et des contrats-programmes qui pèsent sur les frêles épaules de celle-ci. D'où cette décision du P/APC prise en 2017 (mais qui malheureusement fera long feu): l'installation d'une commission de vérification et de contrôle des dettes communales. Comprenant entre autres membres, le SG, le DRG, la directrice des finances, le délégué aux finances, l'avocat-conseil de l'APC assisté par un huissier de justice, cette commission a pour tâche principale de passer au peigne fin toutes les factures de vente de biens ou de service et autres pièces comptables transmises pour paiement auprès de la commune par les différents créanciers, au premier rang desquels figurent les EPIC «Oran Propreté», «Ermes Oran», «Oran Vert» et «Oran CET».
LES RECETTES PATRIMONIALES EN CHUTE LIBRE
Il y a près de trois ans, la commune a fait des mains et des pieds pour améliorer ses recettes, qui demeuraient jusque-là en deçà de son potentiel et de ses perspectives et après le renforcement du recouvrement, l'actualisation des loyers et autres droits domaniaux, l'instauration de nouveaux droits et la concession de nouveaux espaces, l'équipe de Boukhatem envisageait alors d'agir sur un autre levier : la fiscalité. A l'instar de toutes les communes du pays, Oran est totalement tributaire de la redistribution de la fiscalité ordinaire, soit un taux de 20%. La commune d'Oran n'échappe pas à cette situation. L'Algérie dispose d'une mosaïque d'impôts. Et ils sont au nombre de 30. Toutefois, il y a des inadéquations entre cette redistribution et les missions attribuées aux communes. Pire, il y a des taxes et des impôts qui ne sont point recouvrés par les APC, à l'image de la taxe sur l'assainissement, la taxe foncière. Cette dernière est considérée, par excellence, comme l'impôt fondamental. Depuis le changement des prérogatives des services extérieurs du Trésor, les impôts ne recouvrent pas les redevances qui ne leur sont pas directement dus ou qui ne constituent pas des recettes pour le budget de l'Etat. Il n'y a que 10% de la taxe foncière qui est recouvrée. «A quoi cela sert d'instaurer des taxes si elles ne profitent pas des communes ' », s'interroge un vice-président de l'APC d'Oran.


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