Action humanitaire

Constat ? Les missions de l'humanitaire ne sont plus perçues sur le terrain comme un mouvement voué à porter aide et assistance aux populations en extrême difficulté sécuritaire et en détresse.«Faut-il ?'désoccidentaliser'' l'humanitaire pour construire un monde solidaire '» est le thème de la rencontre organisée, hier, à l'Institut français d'Alger, animée par Djamel Misraoui, formateur à l'Humacoop. Ce dernier, travaillant dans l'humanitaire et actif sur le terrain dans plusieurs pays et de par les expériences vécues, estime que le système est dévalorisé dès lors que l'humanitaire est totalement ou en partie utilisé à des fins géopolitiques et économiques. Il n'y a aucune raison de cacher le soleil avec un tamis, nombre d'ONG sont ou seraient assujetties aux bailleurs de fonds lesquels imposent un mode opératoire humanitaire lié à leurs intérêts. Ainsi en est-il, relève le conférencier, de la doctrine humanitaire dangereuse des Etats-unis qui impliquent sur le terrain des militaires dans les actions humanitaires à l'exemple de l'Afghanistan où cette notion de duo «humanitaire-armée» suscite un rejet et de la suspicion au sein de la population afghane.Djamel Misraoui a mis en évidence ces contraintes visant à discréditer le mouvement humanitaire qui est ainsi pressenti comme une ingérence au sein des populations locales. Il dira : «Dans son essence, une ONG fonctionne avec un esprit de neutralité et est à but non lucratif. Aujourd'hui, la donne est toute autre puisque les ONG occidentales se professionnalisent et fonctionnent comme des entreprises». Les investissements pour certaines d'entre elles sont colossaux, explique Djamel Misraoui «à l'instar de World Vision, une des plus grandes organisations humanitaires et de développement dans le monde fonctionnant avec un chiffre d'affaires de plus de deux milliards de dollars». Ce qui lui fera dire que : «le modèle occidental humanitaire touche à ses limites», puisqu'il est perçu comme le porte drapeau d'une doctrine occidentale conquérante et dominatrice. D'où ce sentiment d'hostilité de la part des populations envers cet étranger peu crédible en ses principes humanitaires. Djamel Misraoui mettra en exergue l'arrivée d'un deuxième bloc humanitaire venu interférer sur le terrain.Il s'agit du mouvement humanitaire islamique. En mettant en avant l'appui qu'il apporte à la Oumma, la communauté musulmane dans son ensemble, il ne se priverait pas de faire de «la récupération idéologique». Cependant, le conférencier mettra l'accent sur le nouveau système humanitaire issu de Grande Bretagne, à tonalité occidentale certes, mais plus universaliste. En effet, les ONG britanniques se regroupent en des organisations confessionnelles et non confessionnelles : «Elles mettent en avant la portée universelle de l'humanitaire et non son coté partisan.»Monsieur Misraoui a contesté le rôle des medias qui focalisent leurs couvertures des crises humanitaires uniquement sur les actions venues du Nord. Ce parti-pris excessif et inéquitable envers le ou les autres acteurs de l'humanitaire renforce l'idée de la désoccidentalisation de l'humanitaire. Le mythe humanitaire venu de l'Occident serait-il entrain d'être gommé par une nouvelle forme d'intervention humanitaire moins paternaliste, moins coloniale, plus universaliste ' Il semble que l'on s'achemine vers cette référence. Aussi, l'animateur de la rencontre pense que : «Désoccidentaliser l'aide humanitaire, c'est s'adapter avec l'évolution de l'environnement du secteur humanitaire. Ce qui tend à rapprocher l'universalisme européen et les acteurs du Sud en s'appuyant sur la compréhension réciproque.» Bref, il n'y a plus aucune raison pour identifier l'humanitaire à l'Occident. Enfin, le conférencier fera référence à L'Emir Abdelkader précurseur du droit humain international et de l'aide humanitaire.