Algérie

Accord d'association avec l'UE: Les demandes algériennes



En comptant avec le réajustement du démantèlement tarifaire qu'elle a fait accepter à l'Union européenne conformément

aux dispositions de l'accord d'association, l'Algérie a remis au conseil d'association une requête de 56 points par lesquels elle formule de nombreuses demandes à l'Union européenne.

Il faut admettre que l'Algérie a réussi pour une fois à faire réviser une disposition fondamentale de l'accord d'association qui la lie à l'UE à savoir le démantèlement tarifaire en matière commerciale. En effet, l'esprit même de cet accord repose essentiellement sur la levée des barrières douanières d'ici à 2017, échéance prévue - et c'est l'objectif principal recherché par les Européens, le reste comptant bien peu - pour la mise en place d'une zone de libre-échange.

 Dans la 5ème session du conseil d'association qui l'a réunie le 15 juin dernier à Luxembourg avec l'UE, l'Algérie a présenté une requête de 56 points par laquelle elle a tenté de défendre sa position de partie lésée par la mise en Å“uvre des dispositions de l'accord.

 Le réajustement du démantèlement tarifaire qu'elle a revendiqué est évoqué dans le 47e point. Elle l'appuie en soulignant à l'attention de l'UE que «les exportations européennes vers l'Algérie ont connu depuis 2005, une forte croissance passant de 11 à 20 milliards de dollars. Durant la même période, les exportations de produits algériens hors hydrocarbures sont demeurées insignifiantes et plafonnées à environ 500 millions de dollars par an.» Dans le point 48, elle fait savoir qu'«à ce déséquilibre inquiétant s'ajoutent les pertes substantielles en recettes douanières (2,5 milliards de dollars depuis 2005). L'accélération du démantèlement tarifaire, même en cas de stabilisation du volume des importations algériennes, engendrera une perte estimée à 8,5 milliards de dollars d'ici à 2017(…). «L'Algérie demande ainsi « la convocation du comité d'association pour examiner les solutions appropriées pour corriger ce déséquilibre persistant» et auquel elle affirme « soumettre prochainement (…) ses propositions pour le réaménagement du régime préférentiel pour certains produits inscrits dans les protocoles et annexes de l'accord d'association.»

Les effets d'une navigation à vue

 L'on apprend que depuis la mise en Å“uvre de l'accord en septembre 2005 conjuguée à l'entrée en vigueur de la loi de finances complémentaire en 2009, de nombreuses PME de production ont été obligées de mettre la clef sous le paillasson, faute de pouvoir rebondir face à ces déferlantes irréfléchies et mal anticipées de règlements et d'impositions. Beaucoup d'experts ont pensé qu'en signant l'accord d'association avec l'UE, l'Algérie devra se voir obligée de remettre à niveau son appareil de production et ce en s'astreignant à une discipline rigoureuse en matière de gestion économique et commerciale et en réfléchissant convenablement avant de décider d'un quelconque changement législatif ou managérial. Ce qui n'a pas été le cas. La prospective et l'anticipation n'ont jamais été le fort d'un gouvernement qui s'est médiocrement accommodé d'une navigation à vue déconcertante. D'ailleurs, il ne donne pas l'impression de vouloir changer les choses même si l'on dit ici et là que la loi de finances complémentaire pour 2010 apportera des changements qui atténueraient fortement de l'ardeur des législateurs qui se sont empressés par exemple d'imposer le crédit documentaire à tous les secteurs de production sans réfléchir aux effets négatifs qu'il engendrerait à leur rythme de travail. Réputé pour être en permanence en panne d'idées fructueuses, le gouvernement semble sommé uniquement d'exécuter les plans quinquennaux initiés par la présidence de la République à coups d'investissements publics colossaux et effarants leur concevoir en face, une contrepartie productive.

L'anguille algérienne interdite en Europe

Dans le point 35 de sa requête au conseil d'association, l'Algérie prend la peine de rappeler son souci «d'identifier les contraintes et formuler des propositions en vue de diversifier et d'améliorer le volume des exportations agricoles algériennes vers le marché européen». Elle estime que le séminaire sur la problématique de l'accès des produits agricoles et agricoles transformés algériens sur le marché européen organisé en juin 2010 et celui prévu à la fin octobre de la même année, visent justement à aller dans ce sens. Elle se félicite, par ailleurs, de la levée de l'interdiction imposée aux exportations algériennes de produits de la pêche mais «appelle à lever l'interdiction qui frappe encore les exportations d'anguilles en application d'une nouvelle réglementation européenne».

 Elle fait mention dans le point 33 de la signature le 6 juin dernier du mémorandum portant sur le Programme Indicatif National (PIN) 2011-2013 pour un montant global de 172 millions d'euros et couvrant 6 projets de coopération liés au développement durable, à la culture, à la croissance économique et à l'emploi. «Elle apprécie l'accord de la partie européenne pour le recours à l'appui budgétaire sectoriel, mécanisme qui permettrait l'appropriation des projets par l'Algérie et l'amélioration de la capacité d'absorption des crédits». Elle exprime cependant relativement à ce dernier point «sa préoccupation pour les coupes substantielles opérées sur les enveloppes financières dédiées au PIN 2007-2010 et prend acte de la disponibilité de la partie européenne à procéder à la restitution partielle du montant correspondant, soit 43 millions d'euros, en vue du financement d'autres projets à convenir d'un commun accord».

 L'Algérie a réitéré son intérêt pour l'organisation à Alger d'un forum d'investissements européens dans le courant 2010. Elle a déclaré dans le point 45 «manifester de nouveau son désappointement quant à la modestie des investissements européens réellement créateurs d'emplois et de richesses enregistrés depuis l'entrée en vigueur de l'accord d'association». Elle affirme que «l'étude d'évaluation commandée par l'UE dévoile que les IDE européens, au-delà de leur volume insuffisant, sont issus d'un nombre limité d'Etats membres et concentrés dans le secteur des hydrocarbures». Elle rappelle qu'elle déjà fait remarquer relativement à l'article 9 de l'accord que «l'accroissement du flux des IDE européens en Algérie constitue un des objectifs essentiels de l'accord. Elle invite la communauté et ses Etats membres à apporter leur soutien à la concrétisation de cet objectif, en particulier dans le contexte de la libéralisation des échanges et du démantèlement tarifaire. (…)»

Le principe du traitement national

Tout en soulignant dans le point 42 sa disponibilité à développer la coopération dans le domaine énergétique, «en particulier à travers la modernisation institutionnelle, l'efficacité énergétique, le développement des énergies nouvelles et renouvelables, l'énergie nucléaire, la protection de l'environnement et singulièrement la lutte contre la pollution marine», elle exprime « sa disponibilité à entamer des négociations pour la conclusion d'un mémorandum d'entente dans le domaine de l'énergie». Elle précise cependant que «ayant consenti d'énormes investissements afin de contribuer à la sécurité énergétique de l'Europe, elle appelle l'UE à lever toutes les entraves pour l'accès des entreprises algériennes au marché énergétique européen, en application du principe du traitement national consacré dans l'accord d'association.» (Point 43). L'Algérie dit dans le point 44 enregistrer «avec satisfaction l'acceptation par l'UE de son argumentaire sur le prix du gaz et insiste pour recevoir une notification écrite à ce sujet». Dans ce cadre, ajoute-t-elle, «elle réitère sa demande d'une levée définitive du droit anti-dumping imposé sans fondement à ses exportations d'urée de nitrate d'ammonium (UAN) et qui affecte un des principaux avantages comparatifs dont jouit l'Algérie».

 Autre grief qu'elle retient contre l'UE, «la décision d'extension, sans concertation préalable, de l'application à partir de 2012 de la directive «ETS» à ses compagnies de transport aérien». Elle considère que «cette mesure unilatérale va à l'encontre de l'esprit de l'accord d'association et des principes du droit international, notamment la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques et le protocole de Kyoto». L'Algérie invite l'UE «à surseoir à l'application de cette directive pour les pays tiers dans l'attente d'une solution mutuellement acceptable».

 Dans le point 38, elle affirme «se féliciter des progrès enregistrés dans les négociations visant la conclusion d'un accord de coopération scientifique et technologique avec l'UE». Elle exprime cependant «le souhait que ce projet d'accord couvre également l'aspect innovation qui constitue un des facteurs essentiels du développement économique». Aspect qui, faut-il le rappeler, figure comme segment fondamental dans l'une des 5 politiques que Hamid Temmar a inscrites dans la stratégie industrielle.

Une UPM «essentiellement pour la réalisation de projets» ?

Dans le point 50, l'Algérie déclare que l'adhésion à l'Organisation mondiale du commerce demeure pour elle une option stratégique. Elle demande à l'UE «de concrétiser son engagement à l'appuyer dans le cadre de ses négociations pour une accession à l'OMC dans des conditions raisonnables». Une accession qui, écrit-elle, «ouvrira la voie à des négociations avec l'UE sur la libéralisation du commerce des services dans le cadre de l'accord d'association». Elle considère dans le point 51 que «la facilitation de la circulation des personnes constitue un des piliers de l'accord d'association, qui doit se concrétiser sur le terrain afin de donner une harmonie et un aspect global à la relation entre les deux parties». Elle estime «nécessaire que l'objectif de la libre circulation des marchandises, dans l'optique de la mise en place d'une zone de libre-échange, soit accompagné par une meilleure circulation des personnes, à travers une plus grande facilitation des conditions de délivrance des visas». Elle réitère son appel à l'UE «pour la ratification par les Etats membres de la convention des Nations unies sur les droits des travailleurs migrants et des membres de leurs familles». Elle invite l'UE «à promouvoir les droits des immigrés algériens légalement établis sur son sol et à combattre toutes les formes de xénophobie, de discrimination et d'atteinte à leurs valeurs cultuelles et culturelles.» (Point 52).

 Dans le point 19, l'Algérie rappelle qu'en tant que membre fondateur du processus de Barcelone et de l'Union pour la Méditerranée (UPM), elle affirme être «en faveur d'une coopération méditerranéenne rénovée, solidaire et équilibrée». Elle enregistre la mise en place de son secrétariat, organe technique qu'elle estime «dédié essentiellement à la réalisation de projets». Pour souligner dans le point 20 qu'elle se montre «favorable à une coopération basée sur la règle de la géométrie variable à l'image du dialogue méditerranéen 5+5» mais «réitère sa conviction qu'il ne peut y avoir de coopération euro-méditerranéenne féconde et pérenne sans un règlement global, juste et définitif du conflit du Proche-Orient». Elle fait part dans d'autres points de sa préoccupation à propos du blocage du processus de paix dans la région et du déni des droits du peuple palestinien. Tout en dénonçant le blocus contre Ghaza et en condamnant l'attaque barbare d'Israël contre la flottille de la liberté, elle invite l'UE « à s'impliquer davantage dans le processus de paix, et l'appelle également à s'opposer à la politique de judaïsation d'El Qods et le déploiement de colonies de peuplement dans les territoires palestiniens occupés ». (Points 31-32).

Le soutien algérien à l'Iran

L'Algérie relève dans le point 23 que «le processus d'intégration maghrébine n'a pas exploité toutes ses potentialités en raison de l'absence d'un règlement juste et définitif du conflit du Sahara Occidental». Elle exprime sa préoccupation au sujet des atteintes aux droits de l'homme au Sahara Occidental ainsi que des arrestations arbitraires d'activistes sahraouis.

 Elle invite l'UE à Å“uvrer dans le cadre des Nations unies à l'élargissement du mandat de la MINURSO, au respect des droits de l'homme «et de manière plus générale à agir pour un règlement juste et définitif du conflit qui pourvoie à l'autodétermination du peuple sahraoui». Elle appelle également l'UE et ses Etats membres à s'abstenir d'être partie prenante à des accords et contrats visant l'exploitation illégale des ressources naturelles du Sahara Occidental. L'Algérie affirme par ailleurs appuyer les efforts déployés en faveur de la stabilité de la région du Sahel, entre autres celui visant à organiser un sommet régional sur la sécurité et le développement dans cette région.

 L'Algérie a annoncé dans sa déclaration au conseil d'association la mise en place prochaine du sous-comité «Dialogue politique, sécurité et droits de l'homme». Comité qu'elle n'a eu de cesse de revendiquer la création et qu'elle tient à inscrire dans le dispositif institutionnel qui doit servir «d'instrument efficace de suivi de la mise en Å“uvre de l'accord d'association». Elle rappelle aussi qu'elle plaide pour la révision du fonctionnement du Conseil des droits de l'homme «dans le sens d'une plus grande transparence dans ses missions et mandats». (Point 9). Elle milite, dit-elle, »de concert avec l'UE, en faveur de l'adoption dans le cadre des Nations unies, d'un moratoire sur l'application de la peine de mort».

 Elle n'a pas omis de rejeter dans le point 18 «toute mesure visant à restreindre le droit inaliénable des Etats parties à l'utilisation pacifique de l'énergie nucléaire pour le développement socioéconomique». Tout en mettant l'accent «sur l'importance de l'universalité du TNP pour préserver sa crédibilité», elle déclare «militer pour un traitement équilibré de la mise en Å“uvre des trois piliers du TNP à savoir le désarmement, la non prolifération et l'utilisation pacifique de l'énergie nucléaire».




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